Rencontre à Bissau entre la junte et la Cedeao

© 2025 AFP – le Nigeria accorde l’asile à l’opposant Dias – Une délégation de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) a rencontré lundi à Bissau les militaires qui se sont emparés du pouvoir en Guinée-Bissau, renouvelant sa condamnation du coup d’Etat et réclamant le retour à l’ordre constitutionnel.

Le Nigeria a parallèlement annoncé lundi soir avoir accordé l’asile à l’opposant Fernando Dias. Adversaire lors de la présidentielle du 23 novembre du président sortant Umaro Sissoco Embalo, il avait assuré avoir échappé à l’arrestation le jour du coup d’Etat et être caché depuis.

Le 26 novembre, veille de l’annonce prévue des résultats des élections présidentielle et législatives dans ce pays lusophone d’Afrique de l’Ouest, des militaires ont renversé le président sortant Embalo et suspendu le processus électoral en cours.

« Nous avons eu des discussions productives, les deux parties ont exprimé leurs inquiétudes », a déclaré à la presse, à l’issue de la rencontre avec la junte, Alhaji Musa Timothy Kabba, ministre des Affaires étrangères de Sierra Leone, dont le président Julius Maada Bio dirigeait la délégation de l’organisation régionale ouest-africaine.

La délégation a « condamné le coup d’Etat et demandé le rétablissement immédiat de l’ordre constitutionnel, ce qui implique notamment de permettre au processus électoral d’aboutir à sa conclusion logique », a ajouté M. Kabba.

Président en exercice de la Cedeao, Julius Maada Bio, a indiqué sur X son « soutien inconditionnel au rétablissement de l’ordre constitutionnel ». Depuis le putsch, la Cedeao a suspendu la Guinée-Bissau de « tous ses organes décisionnels ».

De son côté, Joao Bernardo Vieira, ministre des Affaires étrangères tout juste nommé par la junte, a salué une « réunion très productive » et s’est engagé à « poursuivre les discussions pour trouver une solution le plus rapidement possible ».

« impératif de paix »

Le Nigeria a accordé l’asile politique à Fernando Dias qui avait raconté le lendemain du putsch à l’AFP « être en sécurité » et se cacher dans le pays, après avoir pu échapper la veille à des hommes armés arrivés à son siège de campagne à Bissau pour l’arrêter.

Il avait affirmé le même jour avoir remporté la présidentielle, accusant M. Embalo d’avoir « organisé » le putsch ayant interrompu le processus électoral et porté des militaires au pouvoir.

Le gouvernement fédéral du Nigeria a décidé « d’accorder l’asile politique et de fournir protection à Fernando Dias Da Costa », a indiqué dans un texte envoyé à l’AFP le porte-parole du ministère nigérian des Affaires étrangères Alkasim Abdulkadir.

Cette décision n’est « guidée que par les seuls impératifs de la paix, de la sécurité des personnes et de la stabilité régionale », conformément au « rôle historique du Nigeria comme force de stabilisation en Afrique de l’Ouest », selon le porte-parole.

Brièvement arrêté par les militaires le jour du putsch, puis parti au Sénégal le lendemain dans un vol affrété par le gouvernement sénégalais, le président sortant Embalo est de son côté arrivé samedi « à Brazzaville pour y rester », selon une source proche de la présidence congolaise ayant requis l’anonymat.

L’histoire de la Guinée-Bissau, pays lusophone d’Afrique de l’Ouest un peu plus grand que la Belgique, est jalonnée de coups de force, réussis ou ratés, et de troubles politiques.

La junte dirigée par le général Horta N’Tam, un proche de M. Embalo, a formé samedi un nouveau gouvernement composé de 28 membres, en majorité des civils.

Les militaires avaient invoqué la découverte par les « renseignements généraux » d’un « plan visant à déstabiliser le pays avec l’implication des barons nationaux de la drogue » pour justifier leur prise de pouvoir.

La Guinée-Bissau est considérée comme une plaque tournante du trafic de drogue entre l’Amérique latine et l’Europe, au point que certains analystes le considèrent comme un « narco-Etat » et que certains de ses responsables sont qualifiés par les Etats-Unis de « barons de la drogue ».

Situé entre le Sénégal et la Guinée (Conakry), le pays avait déjà connu quatre coups d’Etat et une kyrielle de tentatives de putsch depuis son indépendance du Portugal en 1974. La proclamation des résultats électoraux y a souvent donné lieu à des contestations.

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