La tournée d’Emmanuel Macron en Asie du Sud-Est, entre enjeux économiques et stratégiques
Emmanuel Macron est en visite d’État au Vietnam ce lundi 26 mai, première étape d’une tournée de six jours en Asie du Sud-Est. L’objectif est de renforcer la coopération bilatérale avec le Vietnam donc, mais aussi l’Indonésie. Dernière étape et point d’orgue de ce voyage : Singapour, vendredi, où il s’exprimera devant les ministres de la Défense des pays de la région au dialogue de Shangri-La, la grande réunion sur la sécurité dans la zone Asie-Pacifique.
Par :Nicolas Rocca
Une dizaine d’accords ont déjà été annoncés au palais présidentiel et, en tout, il devrait y en avoir une trentaine durant ce passage au Vietnam. L’enjeu commercial est au cœur de la visite présidentielle à Hanoï. Emmanuel Macron a détaillé dans une allocution l’étendu des futurs partenariats bilatéraux.
« Nous allons ensuite continuer à bâtir un partenariat de souveraineté qui est un axe au cœur de notre approche dans l’Indo-Pacifique. Cet objectif passe par une coopération de défense renforcée, mais aussi par de nombreux projets dans des secteurs comme l’espace. Vous faites confiance aux entreprises françaises pour disposer de moyens satellitaires, en matière de métaux critiques, de transports avec la disponibilité de la France à vous accompagner pour la construction d’une ligne de train à grande vitesse, mais aussi d’énergie décarbonée avec en particulier le nucléaire civil », a énuméré le président français. Au total, « ce sont, à l’occasion de cette visite d’État, neuf milliards d’euros de contrats qui sont signés et qui marquent, en matière de défense, d’aéronautique, de ferroviaire, le lien très fort qu’il y a entre nous », a encore déclaré le président aux journalistes.
Le Vietnam, un enjeu économique majeur
Des accords structurants, selon l’Élysée, avec en porte-étendard la vente de 20 avions Airbus supplémentaire à la compagnie aérienne Vietjet Air, une coopération autour des satellites et la participation à la construction d’un terminal portuaire par la CMA-CGM.
L’enjeu économique est de taille pour la France, car le Vietnam est le pays à la croissance la plus rapide de l’Asean (l’Association des Nations d’Asie du Sud-Est). Coincé entre la Chine et les États-Unis, Hanoï est au cœur de la guerre commerciale et cherche à diversifier ses partenariats et la France espère se présenter comme une option fiable, respectueuse du droit du commerce international. Mais difficile de s’imposer sur les dossiers clés comme le nucléaire, l’énergie, la modernisation du réseau ferroviaire où la France a un train de retard en termes d’échanges commerciaux sur d’autres pays comme la Russie, la Chine, la Corée du Sud ou les États-Unis.
Avec l’Indonésie, le partenariat est en revanche nettement plus avancé. Jakarta est l’une des priorités françaises dans la région, porte-étendard de sa stratégie indo-pacifique, formule utilisée à nouveau ce lundi par Emmanuel Macron pour traduire sa volonté d’élargir l’influence de la France dans cette région très contestée et dominée par la Chine et les États-Unis.
Partenariats de défense
Au-delà des échanges économiques, des partenariats de défense sont également en discussion. Le porte-avions Charles-de-Gaulle était de passage en janvier et l’Indonésie a acheté deux sous-marins Scorpène et 42 avions Rafale. Le président viendra aussi défendre l’avion de chasse français et peut-être lever le voile sur les doutes qui se font entendre dans la région après que le Pakistan a affirmé en avoir abattu trois lors de ses affrontements avec l’Inde.
Il sera aussi question des grands conflits avec l’Ukraine, qui accapare l’Europe, mais aussi Gaza, un sujet particulièrement suivi en Indonésie, le plus grand pays musulman du monde et l’un des rares à ne pas reconnaître Israël. Alors que la France est à la manœuvre sur la reconnaissance de l’État palestinien avant la conférence de l’ONU en juin sur une solution à deux États, Emmanuel Macron sera attendu de pied ferme sur le sujet, notamment lors d’un échange avec des étudiants indonésiens.
Lors de son discours au dialogue de Shangri-La, la grand-messe sur les questions de sécurité en Asie, il devra s’exprimer sur les points de tensions clés de la zone, Taïwan, la mer de Chine méridionale, et ce, malgré l’absence remarquée du ministre chinois de la Défense. Pete Hegesth, le dirigeant du Pentagone et de nombreux ministres asiatiques seront présents et certainement attentifs aux propos d’Emmanuel Macron sur la guerre en Ukraine et le réarmement de l’Europe. En Asie, beaucoup s’interrogent sur les capacités de l’Union européenne à assurer sa sécurité face au désengagement américain.
Moment de complicité ou coup au visage : l’image d’Emmanuel Macron qui fait parler
Les images tournées dimanche soir par l’agence américaine Associated Press à l’aéroport de Hanoï, au Vietnam, montrent la porte de l’avion du président qui s’ouvre, et la silhouette d’Emmanuel Macron qui apparaît, encore à l’intérieur de l’appareil. À ce moment-là, les deux bras de son épouse surgissent, sans qu’on puisse la voir en entier, et elle porte vivement les deux mains au visage du président dans ce qui peut ressembler à un petit coup.
Le chef de l’État semble surpris, mais se tourne rapidement pour faire un salut vers l’extérieur. Le couple présidentiel s’engage sur l’escalier, Emmanuel Macron tend son bras à son épouse comme il en a l’habitude, mais elle ne le saisit pas. L’image a circulé rapidement durant la nuit sur les réseaux sociaux, notamment sur plusieurs comptes habituellement hostiles à Emmanuel Macron.
L’Élysée a d’abord démenti la véracité des images, avant qu’elles ne soient authentifiées. Un proche du président a ensuite parlé d’une banale « chamaillerie » de couple. « C’était un moment où le président et son épouse décompressaient une ultime fois avant le début du voyage en chahutant », a finalement commenté lundi l’entourage d’Emmanuel Macron auprès des journalistes qui suivent la tournée. « C’est un moment de complicité. Il n’en suffisait pas plus pour donner du grain à moudre aux complotistes », a-t-on ajouté de même source, attribuant les commentaires négatifs en premier lieu aux sphères prorusses. « On plaisantait », a fini par dire M. Macron qui a démenti toute scène de ménage.
(RFI avec AFP)

