Le PS « coupé en deux » au lendemain de son élection interne

Un score très serré, des nerfs mis à vif par des semaines de campagne interne tendue : il n’en fallait pas plus pour que le parti socialiste s’inflige une nouvelle crise ouverte vendredi, au lendemain de l’élection pour le poste de premier secrétaire.

Un communiqué signé du service de presse du PS a proclamé en début de matinée la victoire du sortant Olivier Faure, avec 50,83% (12.076 voix), soit 393 suffrages de plus que son rival le maire de Rouen Nicolas Mayer-Rossignol (49,17%, 11.683 voix).

Cette annonce a été immédiatement contestée par l’élu normand, qui revendique lui aussi la victoire.

« Le choix des militants doit être respecté, l’unité du parti socialiste préservée. Je demande que la commission de récolement soit réunie. Sans elle aucun résultat ne peut évidemment être proclamé », a réagi sur Twitter Nicolas Mayer-Rossignol, appelant « à l’apaisement », car « les Français nous regardent ».

– « Je suis triste » –

La direction sortante a justement indiqué que la commission s’était réunie peu avant 05h00, en présence de membres du camp Mayer-Rossignol. Mais « nous n’avons rien signé », a expliqué un proche de l’élu normand.

Les « huit représentants » de Nicolas Mayer-Rossignol « ont refusé d’examiner les résultats », demandant la reprogrammation de la commission, a confirmé la numero 2 du parti, Corinne Narassiguin.

« Le PS apparaît coupé en deux, pas sur les idées mais sur la stratégie. Nous avons tous une responsabilité pour trouver une voie d’union », a résumé dans un tweet Valérie Rabault, députée PS et soutien de Nicolas Mayer-Rossignol.

« Ce matin je suis triste pour mon parti. Si on en reste là le congrès de Marseille sera terrible », prédit un élu soutien du maire de Rouen, dénonçant un « coup de force » d’Olivier Faure, « pour imposer un résultat ».

Le vainqueur doit être officiellement intronisé lors d’un congrès dans une semaine à Marseille.

Dans le camp d’Olivier Faure, ses partisans revendiquent « le score de 54% qui est, nous en ferons la preuve, une fois le vote lavé de toutes irrégularités, le résultat du scrutin », dans un communiqué vendredi.

C’est peu après 1h30 que chaque camp a revendiqué la victoire, avec de part et d’autre des accusations d’irrégularités massives.

Les militants « ont exprimé ce soir, par un vote clair, leur volonté de poursuivre le rassemblement de la gauche et des écologistes en me renouvelant leur confiance », a ainsi assuré Olivier Faure sur la chaîne YouTube du PS.

« Vous nous avez fait confiance en nous plaçant en tête du scrutin », lui répliquait dans la foulée l’élu normand dans une courte vidéo postée sur Twitter.

– Congrès de Reims en 2008 –

Les entourages respectifs ont multiplié dès avant minuit les accusations réciproques de triche organisée. Surveillants de scrutin non autorisés à entrer dans des bureaux de vote, bourrage d’urnes, une agression physique à Elbeuf (Seine-Maritime)… Ils ont déjà demandé l’annulation du vote dans plusieurs sections.

Le maire de Rouen a ciblé en particulier Liévin (Pas-de-Calais) où, selon lui, des policiers municipaux ont vidé la salle, ainsi que Pierrefitte-sur-Seine (Seine-Saint-Denis).

Du côté du premier secrétaire sortant, son mandataire Pierre Jouvet a dénoncé une « déstabilisation inadmissible » de la part du camp adverse, et « des méthodes qu’on a trop vues outre-Atlantique », dans une allusion à la défaite jamais reconnue de Donald Trump à la présidentielle américaine de 2020.

Pour les militants PS historiques, l’épisode évoque le congrès de Reims, en 2008.

Ségolène Royal et Martine Aubry avaient contesté pied à pied les résultats, la seconde finissant par être déclarée victorieuse à l’issue d’un psychodrame de plusieurs jours.

Ce nouvel épisode survient neuf mois après le désastre de la candidature d’Anne Hidalgo à la présidentielle (1,7%).

Le parti avait réussi, en juin, à sauver sa trentaine de sièges de députés au prix d’une adhésion à la Nupes, dirigée par les Insoumis de Jean-Luc Mélenchon, un critique acerbe du parti socialiste.

Le résultat final aura des conséquences sur cet accord Nupes conclu avec LFI, EELV et le PCF, défendu par Olivier Faure, seul moyen selon lui de faire barrage à la droite et à l’extrême droite en 2027.

Soutien de la troisième candidate, Hélène Geoffroy, clairement hostile à la Nupes, Nicolas Mayer-Rossignol ne cache pas ses réticences vis-à-vis du parti de Jean-Luc Mélenchon.

Par Cécile AZZARO

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