Centrale de Sendou : la BAD attaque la Compagnie d’Électricité du Sénégal devant la Justice

Une affaire lourde aux enjeux financiers majeurs est désormais entre les mains du tribunal de Commerce de Dakar. Comme le révèle Libération, la Banque africaine de développement (BAD) a officiellement assigné en justice la Compagnie d’Électricité du Sénégal (CES), partenaire historique du projet de la centrale électrique de Sendou, pour une « difficulté d’exécution du concordat » qui menace, selon elle, la viabilité même de l’accord de redressement judiciaire.

 Un concordat qui tourne à la bataille juridique

La CES avait été placée en procédure de redressement judiciaire, laquelle avait abouti à un concordat homologué le 28 février 2022. Mais la BAD, créancier senior du projet de Sendou, estime que certaines clauses du concordat ont été modifiées sans son consentement, en violation des engagements initiaux.

Selon les informations obtenues par Libération, la BAD s’appuie sur une requête solide : la modification litigieuse concerne le taux d’intérêt appliqué à sa créance.

Taux variable vs taux fixe : le point de rupture

Au terme de la Convention sur les termes communs (CTA) signée le 19 décembre 2012, la créance de la BAD était soumise à un taux d’intérêt variable, indexé sur :

  • l’Euribor,
  • la marge contractuelle,
  • et les coûts obligatoires.

Or, le concordat homologué en 2022 impose un taux fixe de 3,5 %, que la BAD qualifie de « modification unilatérale » et surtout non validée par ses instances décisionnelles.

La Banque affirme avoir formellement exprimé son désaccord, en réunion puis par écrit, notamment le 21 février 2022, soit avant même l’assemblée concordataire. Le courriel avait été adressé à Malick Seck, alors administrateur général de la CES (aujourd’hui DG), avec le syndic Chérif Mbodji en copie.

 Entre mises en demeure et refus : un dialogue bloqué

Face à cette situation, la BAD a multiplié les démarches :

  • 11 octobre 2024 : mise en demeure de la CES pour appliquer la méthode de calcul des intérêts prévue par la CTA.
  • 6 et 7 novembre 2024 : réunions à Paris avec toutes les parties, sous la médiation du syndic-contrôleur Chérif Mbodji.
  • 30 décembre 2024 : réponse de la CES, qui oppose un refus catégorique, invoquant la force de chose jugée attachée au concordat.

La BAD affirme que les tentatives de médiation n’ont pas été suivies d’actions réelles, laissant le désaccord s’enliser.

Une argumentation juridique détaillée… ignorée par la CES

Le 20 mars 2025, la BAD dépose un mémoire circonstancié, exposant l’inopposabilité de la clause imposant le taux fixe à son égard. Mais dans un dernier courrier daté du 12 juin 2025, la CES maintient sa position, sans, selon la BAD, fournir de réponse juridique pertinente.

Pour la Banque, ce silence et cette fermeture ont rendu inévitable la saisine du tribunal de Commerce de Dakar.

 Une affaire à enjeu national

Au-delà du différend contractuel, cette assignation pourrait avoir des conséquences sur :

  • la stabilité financière de la CES,
  • la pérennité du projet de la centrale de Sendou,
  • et les relations entre la BAD et les porteurs de projets énergétiques au Sénégal.

SOURCE DAKARACTU

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *