Le “robot cannibale”, nouvelle prouesse technologique ou fausse bonne idée?

Des robots simples qui pourraient “manger” d’autres robots dans leur environnement afin de s’adapter en se donner une nouvelle forme. Selon un laboratoire de l’Université de Columbia, ça n’est plus forcément de la science-fiction: les premières expériences sont aussi fascinantes que prometteuses. Reste à donner un “but” à cet “écosystème robotique” en devenir.

Matthias Bertrand Source: Futurism, Ars Technica

Pour qu’apparaisse une “vie” synthétique réellement autonome, il faut, en science-fiction, deux critères. D’abord qu’elle soit intelligente, c’est-à-dire capable d’apprendre par elle-même et de tirer des conclusions, et d’autre part qu’elle puisse être capable de croître, de s’adapter, voire de se reproduire. Pour le premier point, l’essor des IA promet beaucoup, mais dans les faits, les supposées intelligences artificielles restent de simples prompteurs très efficaces.

Cannibaliser d’autres robots

Sur le second par contre, une équipe de chercheurs de l’université Columbia a mis au point un robot fascinant. Un prototype capable de cannibaliser d’autres éléments afin de grandir et de se développer. De quoi, selon ses concepteurs, rendre crédible un “écosystème robotique”, capable de se développer comme le font les organismes vivants.

Pas encore de machine prédatrice, toutefois ; ce premier robot capable de se “sustenter” ressemble plutôt à un jeu de type mécano. L’engin s’appelle “Truss Link”, et il s’agit d’une tige métallique dotée d’une batterie, qui peut s’étendre et se contracter, ramper et utiliser ses extrémités magnétiques pour se connecter à d’autres modules semblables.

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Une tige “Truss Link” n’a l’air de rien. Mais plusieurs d’entre elles peuvent se combiner, pour créer un unique robot en deux, puis en trois dimensions. Celui-ci peut cannibaliser d’autres tiges, pour former un tétraèdre composé de six modules. Le robot utilise son environnement pour s’aider à prendre cette forme, et peut encore, si l’option se présente, absorber une septième “Truss Link” pour s’en servir comme canne et se déplacer 66% plus vite. Et si l’un des modules tombe en panne, il l’abandonne plutôt que de s’encombrer.

Des robots qui s’adaptent et grandissent

Un comportement qui semble très “vivant”, insiste l’ingénieur en charge de l’étude, Philippe Martin Wyder. “Une véritable autonomie signifie que les robots doivent non seulement penser par eux-mêmes, mais aussi se maintenir physiquement. Tout comme la vie biologique absorbe et intègre des ressources, ces robots grandissent, s’adaptent et se réparent en utilisant des matériaux provenant de leur environnement ou d’autres robots.”

Les images diffusées par l’université de Columbia sont fascinantes. On peut même y voir un tétraèdre complètement formé en aider un autre à s’assembler pour obtenir cette forme très pratique pour se déplacer. Mais il y a un truc: les modules “Truss Link” sont télécommandés, rappelle Futurism. Ce qui, selon l’équipe, permettait surtout un gain de temps. Les chercheurs ont estimé, par simulation informatique, que le même système avec des robots autonomes nécessiterait 2.000 essais pour former de lui-même la majorité des formes utiles à son développement. Sauf sans doute le fameux tétraèdre, qui nécessite d’expérimenter avec son environnement pour se former correctement. Mais les ingénieurs américains estiment que le développement des IA rend crédible une version réellement autonome de leur création.

C’est là un facteur d’expérimentation logique, pour un système qui veut mimer l’assemblage des premières vies complexes. Celle-ci est vraisemblablement apparue après des milliers, voire des millions, de connexions inefficaces entre acides aminés, à l’aube des temps.

L’environnement hostile de la Lune comme but?

“La vie utilise environ 20 acides aminés différents pour fonctionner, c’est pourquoi nous nous concentrons actuellement sur l’intégration de modules supplémentaires avec divers capteurs”, argumente Wyder. Le “Truss Link” n’est l’équivalent que d’une seule de ces “briques élémentaires de la vie” et, comme un jeu de mécano, différents types de modules pourraient permettre à des robots plus complexes de s’assembler.

Les ingénieurs américains admettent qu’il s’agit là d’un tout premier pas, qui peut sembler anecdotique. Mais à terme, Wider assure, dans une interview à Ars Technica, que cet écosystème robotique pourrait se trouver un but: “Imaginons que cet objectif soit de construire une colonie lunaire. Plusieurs petites unités se disperseraient d’abord pour explorer la zone, puis s’assembleraient pour former une structure plus grande, comme un bâtiment ou une grue. Et cette grande structure absorberait, recyclerait ou, si vous préférez, mangerait tous ces petits robots pour les intégrer et les utiliser.”

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