Budget: le Premier ministre Michel Barnier, sous la pression des macronistes, affronte sa première motion de censure

Le projet de budget va être présenté jeudi 10 octobre en Conseil des ministres. Un exercice de haute voltige pour Michel Barnier qui a annoncé son ambition de ramener les déficits publics à 5% en 2025 et cherche 60 milliards d’euros pour y parvenir. Mais les choix budgétaires envisagés par le Premier ministre, notamment des hausses d’impôts, lui ont attiré les foudres des députés du camp présidentiel, Gabriel Attal et Gérald Darmanin en tête… Michel Barnier est sous pression. 

Par :RFI

Un Premier ministre de droite qui défend des hausses d’impôts, c’est « paradoxal », a pointé Gérald Darmanin dans une interview aux Échos… Ministre des Comptes publics d’Emmanuel Macron en 2017, c’est lui qui a lancé l’offensive contre les propositions de Michel Barnier accusé de vouloir un « choc fiscal » et qui est allé jusqu’à menacer de ne pas voter la partie recettes du budget, car augmenter les impôts, c’est remettre en cause le fondement de la politique économique menée depuis sept ans.

Les entreprises mettront la main à la poche

A deux jours de la présentation du budget 2025, Matignon affine sa copie avec un objectif : trouver 60 mds d’euros pour redresser les finances publiques. Baisses du nombre fonctionnaires, fusion de services publics, surtaxe pour les ménages les plus fortunés, le gouvernement égraine ses mesures. Et les entreprises ne devraient pas y échapper, au risque pour certains d’entraver la compétitivité et la croissance de la France. Mais qu’en est il vraiment ?

Côté recettes, c’est l’une des pistes pour faire rentrer dès l’année prochaine 8 mds d’euros dans les caisses de l’Etat : taxer les bénéfices de 300 entreprises qui réalisent plus d’1 md d’euros de chiffre d’affaires. Philippe Crevel, économiste et directeur du Cercle de l’épargne juge la mesure supportable, joint par Nicolas Feldmann, du service économique, juge la mesure supportable : « Les hausses d’impôts proposées ne remettent pas en cause la compétitivité, on est sur une majoration de l’impôt sur les sociétés. En plus, il est indiqué que c’est temporaire. »

La potion pourrait être plus douloureuse pour les petites entreprises. Pas question pour elles d’augmenter leurs impôts, mais plutôt de revoir certaines aides et des allègements de charge mis en place par Emmanuel Macron… De quoi inquiéter Laurent Munerot, vice-président de l’U2P.. l’Union des entreprises de proximité, au micro de Nicolas Feldmann. « Si on revient sur les allègements de charges sur les bas salaires, ca veut dire un coût pour l’entreprise supérieur à celui qui est actuellement, donc derrière ca veut dire une compétitivité en déshérence. »  

Faire des économies au risque de freiner l’activité.. c’est la mise en garde des macronistes au gouvernement Barnier qui tient son cap : et mise sur une croissance d’un peu plus d’1% l’année prochaine pour réduire le déficit. 

Gabriel Attal a, lui aussi, été piqué au vif. Surtout quand Michel Barnier lui a lancé à l’Assemblée : « Je serai très attentif à vos propositions d’économies supplémentaires pour faire face au déficit que j’ai trouvé en arrivant »… histoire de le renvoyer à sa responsabilité, avant de calmer le jeu en reconnaissant qu’il avait besoin de Gabriel Attal qui dirige le groupe Ensemble, le plus important de son socle parlementaire et en se disant ouvert à d’autres solutions que des impôts pour faire rentrer les milliards.

Des solutions : mettre fin aux 35 h, pour Gérald Darmanin, mettre en œuvre de la réforme de l’assurance chômage, pour Gabriel Attal, pointe Valérie Gas, du service politique de RFI. Les discussions risquent d’être animées entre Michel Barnier et les députés macronistes, lors de la réunion du groupe à laquelle le Premier ministre va assister le mardi 8 octobre.

Une première motion de censure

C’était devenu presque une habitude pour ses prédécesseurs Elisabeth Borne et Gabriel Attal, mais la première motion de censure à affronter est toujours un moment particulier que va découvrir Michel Barnier ce mardi, après la réunion de groupe.

Le Premier ministre a très peu de chances de voir son gouvernement être renversé, même si quelques incertitudes persistent quant au nombre total de voix que va rassembler le texte déposé par le Nouveau Front Populaire, rapporte Aurélien Devernoix du service politique. 

Dans les colonnes de La Tribune du Dimanche, le Premier ministre reconnaissait être « dans la main du Parlement » mais rappelle que sa majorité bien que relative, reste « la plus importante de l’Assemblée ». Encore faut-il que cette majorité lui soit totalement acquise, et rien n’est moins sûr : dans les rangs des députés macronistes, certains – on l’a vu – ne cachent pas leur hostilité au plan d’augmentation des impôts concocté par le chef du gouvernement. Jusqu’à censurer Michel Barnier ? Celui-ci n’y croit pas : « j’ai confiance en mes alliés » se rassure-t-il.

La « motion du chaos » selon Eric Ciotti

Dans l’état actuel des choses, seul un scénario peut en réalité provoquer sa chute et le Premier ministre le sait très bien : « la conjonction de la gauche et du Rassemblement National.» Or le RN l’a annoncé, il ne votera pas la censure. La motion devrait donc avoir du mal à réunir les 289 voix nécessaires : il y aura les 192 issues du NFP et sans doute quelques votes venus des indépendants…

Quand à l’Union des Droites pour la République d’Eric Ciotti, son chef de file a précisé sa position ce mardi matin au micro de Charlotte Urien-Tomaka, du service politique. L’ancien patron des Républicains ne soutiendra pas un texte venu de la gauche. « Nous n’avons pas à ce stade connaissance du budget de la loi de finances initiale. Elle sera présentée dans quelques jours. Nous, nous voterons pas cette motion de censure préalable orientée, dirigée par Monsieur Mélenchon qui guide les parties prenantes de cette coalition extraordinairement dangereuse. Donc nous ne voterons pas la motion du chaos. Nous jugerons sur pièce et nous ferons tout dans le respect de nos institutions, sans déstabiliser notre pays. Je ne crois pas qu’on puisse être accusé d’être une béquille du gouvernement.» 

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