Modou Sall, consultant en service financier numérique : La saga d’un banquier reconverti bitcoiner

Avec une quinzaine d’années d’expérience au niveau des banques, Modou Sall, actuellement consultant en service financier numérique, s’est reconverti bitcoiner depuis 2021. Avec cette reconversion, Modou aide les fintechs à respecter la conformité de la Banque centrale, mais aussi à élaborer des produits et des services digitaux.

Par Abdou Khadim THIAM(Quotidien Tv) – En cette matinée du vendredi 1er décembre, les «cryptoenthousiasts» se sont donné rendez-vous au Grand Théâtre national Doudou Ndiaye Coumba Rose pour vivre ensemble la seconde édition des «Dakar Bitcoin Days». Dans une salle bondée, nous retrouvons un homme aux fonctions bien controversées. Modou Sall, un des panélistes de ce forum, était jadis banquier. Un métier qu’il a pratiqué pendant plusieurs années. Aujourd’hui, il devient bitcoiner. Du haut de son mètre 70 et vêtu d’une tenue africaine, cet homme aux cheveux un peu grisâtres prend du plaisir dans ses nouvelles fonctions. Avec un air très décontracté, le sieur Sall explique comment s’est passée sa reconversion en tant que bitcoiner. Après sa formation en tant que comptable, il a travaillé pour le Crédit Mutuel du Sénégal en tant qu’agent de crédit et responsable d’agence pendant sept ans à Dakar et à l’intérieur du pays. Ceci lui confère une belle expérience dans la microfinance. En 2013, il intègre Ecobank pour devenir ainsi gestionnaire de compte. Cette structure bancaire l’affecte à Ziguinchor pour qu’il gère ses clients particuliers dans cette zone. Après l’obtention de son diplôme à l’Itb (Institut technique de banque) en 2019, il est rappelé à Dakar pour gérer les agences de Yoff, Guédiawaye et Parcelles Assainies, en plus de la gestion du portefeuille et de la distribution des produits et des services financiers et de commerce international pour les clients de cette unité commerciale. En mars 2021, il démissionne pour mener ses activités de consultance. Il a aussi commencé à enseigné à l’Ecole multinationale des télécommunications comme professeur de finance digitale.

«Je suis procureur de la République passé avocat de la défense»


«Ma formation dans le monde des cryptomonnaies a commencé depuis 2017, lorsqu’Ecobank m’a nommé responsable réseau agency banking. Je ne savais pas comment piloter un tel projet. C’est ainsi que j’ai commencé à faire des formations pour avoir des certifications. C’est en faisant la formation sur «Digital frontiers institute» qui est basé en Afrique du Sud que j’ai découvert le bitcoin. Depuis lors, je m’y suis intéressé, parce qu’avec bitcoin, on peut gérer ses propres comptes, être son propre moyen de paiement. Bitcoin est venu remplacer le compte bancaire, la banque commerciale et la Banque centrale.» Cependant, il sera vite rattrapé par les réalités du moment. Il ne pouvait pas accéder à bitcoin pour des questions d’inclusion financière. En effet, il n’y avait pas encore une liaison entre bitcoin et les mobiles money comme c’est le cas aujourd’hui et il fallait au minimum 100 000 francs Cfa pour s’en procurer. Il a dû creuser pour affiner ses connaissances dans le bitcoin avant de se lancer exactement dans la chose. Selon lui, lorsqu’on est banquier, on ne cesse de critiquer et de dénigrer les cryptomonnaies. Pour se rattraper, il endosse un nouveau rôle d’éducateur et de sensibilisateur pour l’adoption des cryptomonnaies. C’est pourquoi il se qualifie «procureur de la République passé avocat de la défense». Il renchérit que bitcoin doit être adopté comme monnaie alternative pour toutes les solutions qu’il offre.

«Les cryptomonnaies sont réellement le mobile money pour les Africains»


«Les gens ne connaissent pas ce qu’est bitcoin véritablement. Et ce qui a emmené cela c’est que même nous qui sommes banquiers, on nous dit que tout ce qui n’est pas règlementé n’est pas bon, c’est dangereux de l’utiliser. A côté de ça, les systèmes ponzis avec petronpay, greengold et les autres ont emmené une certaine réticence de la part des populations. Les arnaques ont existé bien avant bitcoin et elles continueront d’exister. Ce qu’il faut éviter c’est de penser que bitcoin a une liaison avec les ponzis. C’est totalement faux. Ce n’est pas parce qu’on a utilisé un téléphone pour t’arnaquer et qu’après on utilise un téléphone pour t’offrir un service qu’on va t’arnaquer encore.» Tout ça, conjugué au problème d’accès surtout dans les zones reculées, constitue un frein à l’adoption de bitcoin. Monsieur Sall ajoute que les fintechs ont posé des jalons pour faciliter le travail, mais qu’il reste du chemin à parcourir. Il faut ainsi maintenir le cap en insistant sur la sensibilisation et la formation. A en croire cet ex-banquier, il ne faut pas oublier que ce qui fait le charme des cryptomonnaies, c’est la décentralisation. Donc de ce point de vue, elles sont différentes des mobiles money qui sont centralisés. Modou conclut en disant «les cryptomonnaies sont réellement le mobile money pour les Africains».

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