Contrat minier au Panama: les raisons environnementales de la colère

Au Panama, depuis une dizaine de jours, des manifestations massives ont lieu contre un nouveau contrat minier signé par le gouvernement. Au cœur de la colère : l’impact environnemental de cette mine gigantesque.

Il s’agit de la mine de cuivre à ciel ouvert la plus grande d’Amérique centrale. Elle exporte 300 000 tonnes de cuivre chaque année et s’étend sur près de 17 000 hectares si l’on compte la zone d’extraction du métal, les énormes bassins d’eau nécessaires pour cela, la route et le port dont dispose la mine. Une surface qui a été déforestée dans une zone tropicale qui regorge d’une biodiversité parmi les plus riches du monde. Jaguars à l’affût, aigles majestueux, oiseaux flamboyants… Nous sommes au cœur du corridor biologique méso-américain, un enchaînement de forêts qui vont de Mexique jusqu’au nord de la Colombie. Au sein de ce système naturel, le Panama fait office de pont pour de nombreuses espèces.Rivières polluéesLa mine, aujourd’hui aux mains de l’entreprise canadienne First Quantum Minerals, opère depuis plusieurs années et a déjà essuyé des protestations populaires.Mais les manifestations sont massives cette fois-ci, « parce que la population a maintenant constaté les dégâts sur l’environnement », estime la présidente de l’association Panama Durable, Raisa Banfield. Elle énumère : « Des eaux de rivières polluées, des poissons morts, des problèmes de peau signalés par les paysans alentour. »Les manifestants dénoncent aussi les conditions d’attribution de la concession minière. Un premier contrat avait été déclaré inconstitutionnel par la Cour suprême parce qu’il n’y avait pas eu d’appel d’offre public. Pour le remplacer, le gouvernement a de nouveau négocié en catimini et choisi une procédure accélérée. La loi attribuant la concession pour 20 ans supplémentaires a été débattue, approuvée et promulguée en seulement trois jours.Et Raisa Banfield explique que selon les nouveaux termes du contrat, l’entreprise canadienne aura encore plus de droits : « Elle pourra désormais dévier ou retenir des cours d’eau et revendre l’eau aux populations voisines. » Et le port d’où part le cuivre sur la mer des Caraïbes, est « aux mains de la firme ». Pour l’activiste et ex-vice maire de la ville de Panama, « c’est une véritable enclave privée créée sur le territoire ».Des royalties plus importantesFace aux manifestants, les arguments du gouvernement sont économiques. L’entreprise apporte 4% du PIB du Panama. Et dans ce nouveau contrat, First Quantum Minerals s’engage à payer à l’État au moins 375 millions de dollars chaque année. Le président Laurentino Cortizo fait valoir que c’est dix fois plus que dans le contrat initial. Il insiste aussi sur les 8 000 emplois directement et les 40 000 emplois indirectement liés à la mine et sur le fait que si le pays rompt ce contrat, il pourrait devoir payer des millions d’indemnités.Enfin, le chef de l’État a tenté de calmer la colère en proposant un référendum en décembre prochain. Les manifestants, beaucoup de jeunes rejoints ensuite par de nombreux syndicats ouvriers, de médecins, du secteur des transports et de l’éducation, réclament, eux, l’arrêt de tous les projets miniers en cours.

Par :Lucile Gimberg

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