Forces politiques locales: Pastef, maître du jeu dans le département de Mbacké

Le département de Mbacké, longtemps dominé par les formations politiques traditionnelles, vit une recomposition profonde de son paysage politique depuis 2024. Les résultats des dernières élections (présidentielle et législatives) ont confirmé la suprématie de Pastef/Les Patriotes, désormais force dominante dans la zone. Face à cette poussée, les autres partis s’organisent pour tenter de regagner leur influence.

MBACKÉ – Jusqu’en 2012, le Parti démocratique sénégalais (Pds) régnait en maître dans le département de Mbacké (région de Diourbel, centre), avec Touba comme bastion incontesté. L’arrivée au pouvoir de l’Alliance pour la République (Apr), portée par Macky Sall, avait ensuite inversé les tendances, offrant au parti présidentiel de l’époque une implantation solide dans la cité religieuse. Mais l’irruption de Pastef/Les Patriotes est venue bouleverser cet équilibre, ouvrant une nouvelle période dans la vie politique locale.

À la présidentielle de 2024, le candidat du parti des Patriotes africains du Sénégal pour le travail, l’éthique et la fraternité (Pastef/Les Patriotes), Bassirou Diomaye Faye, a obtenu 172 053 voix dans le département de Mbacké. Un score inédit qui a confirmé la montée en puissance de cette formation politique. La domination s’est poursuivie aux législatives anticipées où Pastef a remporté les cinq sièges mis en jeu, totalisant 128 028 voix.

Ousmane Sonko compte toujours faire du département de Mbacké, y compris donc la ville religieuse de Touba, son principal bastion politique. Lors du « téra-meeting » qu’il a organisé le 8 novembre dernier, au parking du stade Léopold Sédar Senghor, le leader de Pastef avait invité les populations de Touba à s’inscrire massivement sur les listes électorales pour préparer les prochaines échéances.

Pour Babacar Sarr, chargé de la communication de Pastef/Touba, les résultats des dernières échéances électorales à Mbacké ne sont pas le fruit du hasard, mais celui d’un travail minutieux. « Étant donné que 80 % de l’électorat du département se trouve à Touba, le parti a mis en place une stratégie de massification en installant plus de 200 cellules dans la ville sainte », explique-t-il, soulignant que « cette implantation a été renforcée par des actions sociales visibles, telles que des dons de sang et des consultations gratuites ». Ces initiatives ont permis au parti de s’ancrer dans les quartiers.

Aux yeux de M. Sarr, un autre facteur décisif a été la présence régulière du leader du parti. « Les visites fréquentes du président du parti, Ousmane Sonko, à Touba ont également joué un rôle important, notamment ses apparitions publiques avec des guides religieux respectés de la confrérie mouride », justifie-t-il. Cette combinaison d’un travail militant, d’initiatives sociales et de proximité religieuse a porté Pastef au sommet des forces politiques locales.

Mais l’interdiction d’activités politiques dans la ville sainte oblige désormais le parti à revoir ses méthodes. « Nous comptons nous appuyer sur les réalisations du régime à Touba pour communiquer avec les populations », indique Babacar Sarr. Les projets annoncés dans le département de Mbacké constitueront, selon lui, des opportunités de dialogue en vue des prochaines échéances où ils affronteront notamment l’Apr, le Pds, Les Serviteurs, etc.

D’ailleurs, ces derniers ont connu un recul dans le département entre les législatives de 2022 et la présidentielle de 2024. Cela s’explique, selon leur coordonnateur, Abdou Khadre Diop, par la bipolarisation extrême du contexte politique. « Un référendum était en jeu et Bassirou Diomaye Faye était le candidat le plus compétent pour gagner », affirme-t-il. Le report du scrutin et le caractère anticipé des législatives ont également pesé lourd sur une formation encore jeune, qui n’a pas eu le temps de bâtir une coalition solide. Malgré ces contraintes, il estime que « Les Serviteurs avancent dans la bonne direction ».

L’Apr cherche à limiter l’hémorragie

Du côté de l’Alliance pour la République (Apr), la perte du pouvoir a laissé des traces. Leur candidat, Amadou Bâ, était arrivé deuxième à Mbacké en 2024, mais depuis, plusieurs responsables ont quitté le parti. « La perte du pouvoir a entraîné le départ de nombreux responsables qui s’étaient ralliés au parti en raison de sa position au pouvoir », constate Bassirou Diagne, responsable Apr à Touba.

Certains se sont dirigés vers le parti la Nouvelle responsabilité d’Amadou Bâ, d’autres vers l’Udp de Birima Mangara. Une initiative de rassemblement est toutefois en cours pour renouer avec les militants restés attachés au président Macky Sall. L’objectif est de reconstruire un socle solide pour les prochaines batailles électorales.

B. DIOP (Correspondant)
LESOLEIL

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