Présidentielle en Côte d’Ivoire: qui pour incarner l’opposition à Alassane Ouattara?
La liste des candidats officiels à l’élection présidentielle du 25 octobre a été publiée par le Conseil constitutionnel ce lundi 8 septembre. Laurent Gbagbo et Tidjane Thiam, les deux principaux opposants au président sortant, Alassane Ouattara, ont été radiés. Contrairement à 2020, l’opposition ne boycotte pas le scrutin. Tour d’horizon des candidats qui pourraient, peut-être, tirer leur épingle du jeu, selon les spécialistes interrogés par TV5MONDE.
Par Séraphine Charpentier – TV5.ORG
L’opposition ivoirienne s’y attendait. Lundi 8 septembre, deux de ses figures ont été écartées de la course à la présidentielle d’octobre. L’ancien chef d’État Laurent Gbagbo a été radié par le Conseil constitutionnel pour sa condamnation judiciaire. Le patron du Parti démocratique de Côte d’Ivoire – Rassemblement démocratique africain (PDCI-RDA), le principal parti d’opposition, Tidjane Thiam, a lui vu sa candidature invalidée pour des questions de nationalité.
Pour beaucoup d’observateurs, ces mises à l’écart font de ce scrutin une élection sans grand suspense. « Alassane Ouattara, aujourd’hui, apparaît comme le favori. Du fait, notamment, que l’opposition soit divisée et du fait que ses deux grands rivaux, ne sont pas retenus pour cette élection. Les militants d’Alassane Ouattara espèrent faire ce qu’ils appellent un coup KO, c’est-à-dire gagner dès le premier tour avec plus de 50% des voix », raconte Christelle Pire, correspondante TV5MONDE à Abidjan.
« Ce sont des élections sans surprise »
Le primo sortant avait obtenu 94% des voix lors de la dernière élection en 2020, sur fond de boycott du scrutin par l’opposition. Alassane Ouattara se prépare donc, sauf surprise, à enchaîner un quatrième mandat de cinq ans. Fier, notamment, de son bilan à la tête de la principale économie francophone d’Afrique de l’Ouest.
« Je pense que ce sont des élections sans surprise. Pour moi, les jeux sont clairs. Monsieur Alassane Ouattara a un bilan, un grand parti, qui est majoritaire à l’Assemblée », commente auprès de TV5MONDE Venance Konan, écrivain et ancien candidat aux législatives pour le parti au pouvoir du RHDP, le Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix.
Une opposition émiettée
En face d’Alassane Ouattara, 4 candidats. Parmi eux, Aouha Don Mello, vice-président du parti de Laurent Gbagbo le PPA-CI, le Parti des peuples africains – Côte d’Ivoire. Il a dès le départ présenté sa candidature comme une candidature de précaution puis a été démis de ses fonctions au sein du groupe après l’annonce de son inscription à la présidentielle.
« Aouha Don Mello a toujours expliqué qu’il ne se présentait pas contre Laurent Gbagbo, mais pour éviter l’absence du PPA-CI lors de cette élection. La question à présent, c’est va-t-il réussir à convaincre les électeurs de la gauche et notamment les pro-Gbagbo, de voter pour lui? Et est-ce que le PPA-CI va donner une consigne de vote? Aujourd’hui, il est clair qu’il apparaît comme une candidature dissidente du PPA-CI », explique la correspondante de TV5MONDE, Christelle Pire.
Venance Konan, lui, voit plus en Aouha Don Mello une « nouvelle gauche » pour l’après 2030. Mais pour ces élections, il ne croit pas en ses chances: « Il n’aura pas le soutien de son parti« .
Face à Aouha Don Mello et Alassane Ouattara, Jean-Louis Billon a lui aussi vu sa candidature validée par le Conseil constitutionnel. L’homme politique, également patron de SIFCA, premier groupe privé du pays, est depuis peu à la tête du Congrès démocratique.
Le CODE est une alliance lancée le 19 août. Elle rassemble dix-huit partis et mouvements politiques qui ont choisi de faire confiance à l’ancien ministre du Commerce. Jean-Louis Billon a tourné le dos au PDCI-RDA, le Parti démocratique de Côte d’Ivoire, qui avait choisi de soutenir son président, Tidjane Thiam, avant que celui-ci ne voit sa candidature invalidée.
« Jean-Louis Billon a travaillé longtemps au sein du PDCI et n’a pas caché ses ambitions présidentielles. Tidjane Thiam a un peu perturbé ses ambitions. La question est la suivante: réussira-t-il à capter les voix de son parti originel? Le risque, c’est que les voix se dispersent entre les quatre candidats de l’opposition », analyse Christelle Pire.
Deux femmes dans la course à la présidentielle
Autre candidate au fauteuil de présidente: Simone Ehivet Gbagbo, ex-première dame et ex-femme de l’ancien président Laurent Gbagbo. Elle aussi, à 76 ans, fera face au président sortant, 83 ans, arrivé au pouvoir pendant le conflit de 2010 qui fit suite aux élections l’opposant à Laurent Gbagbo.
Laurent Gbagbo, à l’époque président sortant, avait alors refusé de reconnaître sa défaite face à Alassane Ouattara. Ce dernier pris le pouvoir après que le couple Gbagbo fut arrêté. « Simone Gbagbo est depuis longtemps dans le paysage politique. À l’époque, elle était considérée, en tant que première dame, comme la plus dure et la plus idéologique au sein du parti », se rappelle Venance Konan.
« Simone Gbagbo est celle qui a le plus de poids politique, comparée à Jean-Louis Billon et Aouha Don Mello. Ils sont tous les deux cadres de parti, mais ils n’ont pas forcément un parti entier derrière eux. Simone Gbagbo a elle lancé son Mouvement des Générations Capables (MGC) depuis quelques années. Elle a une structure derrière elle », explique Christelle Pire.
Ultime membre des cinq, Henriette Lagou Adjoua. Cette ancienne ministre, issue du Groupement des partenaires politiques pour la paix (GP-PAIX) avait déjà tenté de se présenter en 2015 mais sa candidature n’avait alors pas été retenue par le Conseil constitutionnel. Sa popularité politique, confidentielle, lui laisse peu de chance face à ses autres concurrents.

