Le boycott anti-USA s’organise à travers le monde pour contrer les taxes de Trump

En relevant tous azimuts les droits de douane, Donald Trump a incité des citoyens du monde entier à boycotter les produits américains. Et même s’il n’est pas toujours facile de trouver de bonnes alternatives, ces personnes se montrent déterminées.

Kevin Dupont   Source: Courrier International, RMC, DR, Global News, National Post, L’Actualité, The Globe and Mail

Ils sont Canadiens, Européens ou encore Latino-Américains, et tous se rejoignent sur un point: si Donald Trump veut une guerre commerciale, il va l’avoir! C’est ce que plusieurs médias internationaux peuvent constater, autant avec la formation de groupes Facebook anti-produits américains, des prises de position de personnalités politiques allant dans le même sens, ou encore de pures initiatives individuelles. Un mouvement qui n’en est qu’à ses débuts mais dont l’impact économique commence déjà à se dessiner.

Plus de Coca-Cola et de Pepsi!

Le pays où ce sentiment anti-américain est peut-être le plus fort, c’est le Canada. Les Canadiens se sont d’abord vus infliger des droits de douane de 25% sur les importations venant de chez eux (bien que la mesure soit temporairement suspendue), puis 50% sur l’acier et l’aluminium (contre 25% pour la majeure partie du reste du monde), et finalement des droits de douane réciproques (cette fois-ci à l’instar de tous les pays).

Pour les habitants du pays nordique, c’en est trop, et plusieurs médias canadiens décrivent un sentiment anti-américain à des sommets historiques. La CBC parle de familles qui renoncent à leurs vacances en Californie, des femmes qui préfèrent acheter des vins italiens, des avocats mexicains et du lait canadien plutôt que d’acheter américain, ou encore d’un étudiant qui annule son projet de faire son master à Harvard ou Yale pour plutôt aller à l’Université de Colombie-Britannique ou même chez nous, à la KU Leuven.

Puisque le premier partenaire commercial du Canada est de très loin les États-Unis, l’impact économique s’en fait ressentir. L’US Travel Association prévoit ainsi des pertes de 2,1 milliards de dollars liées au fait que les Canadiens ne viendront plus passer leurs vacances aux États-Unis, comme le signale Forbes.

Au Danemark, la volonté de Donald Trump d’annexer le Groenland, un territoire relevant de Copenhague, a provoqué un mouvement similaire. La télévision publique, DR, note que des Danois se sont mis à boycotter le Coca-Cola, Pepsi, Burger King, Heinz Ketchup, Colgate ou encore Netflix. Des groupes Facebook listant les alternatives récoltent parfois des milliers d’abonnés.

Idem du côté des Latino-Américains, chez qui le journal argentin Diario El Norte note une colère particulièrement ciblée envers Coca-Cola. La marque est critiquée pour avoir versé 250.000 dollars pour la campagne présidentielle du nouveau dirigeant américain. Leur rancœur est si forte, surtout dans un contexte d’expulsions massives d’immigrés latinos, qu’ils ont donné un nom à leur mouvement: le “Latino Freeze Movement”.

En France aussi, des premières voix se font entendre pour ne plus acheter de produits américains. En témoigne un débat sur la chaîne RMC, où la journaliste indépendante Emmanuelle Dancourt a soutenu vaille que vaille ce boycott, face à un plateau d’intervenants globalement réticents.

De nombreux obstacles pour mener un boycott efficace

Dans le camp d’en-face, les arguments contre ce boycott s’enchaînent: pourrait-on se passer de produits américains? Des marques locales pourraient-elles vraiment les remplacer et conquérir le cœur des consommateurs? Le scepticisme règne, et cela pose aussi la question de savoir s’il faut agir de la même façon par rapport à d’autres pays critiquables.

“Si l’économie est frappée de plein fouet par les tarifs douaniers, il va y avoir des ménages affectés financière­ment”Sylvain Charlebois

Le problème serait même encore plus profond d’après Sylvain Charlebois, directeur du laboratoire de science analytique en agroalimentaire de l’université Dalhousie, en Nouvelle-Écosse. Comme il l’explique à la presse canadienne, si le boycott amène la population à mieux se renseigner sur la provenance et la qualité des produits, il restera un obstacle majeur: le prix. “Les gens ne regardent pas d’où viennent les aliments. Si l’économie est frappée de plein fouet par les tarifs douaniers, il va y avoir des ménages affectés financièrement”, explique-t-il.

Cette crainte est d’autant plus fondée que les multinationales américaines embauchent beaucoup à l’étranger. Ne plus consommer américain, c’est donc certes soutenir des producteurs locaux, mais également menacer des emplois à domicile. Au Canada, 62% des personnes employées par des multinationales étrangères sont engagées par des Américains. Il faudrait donc, dans le meilleur des cas, que tous ces travailleurs quittent leurs postes actuels pour être engagés par des Canadiens. Une transition difficile à mener.

“Nous sommes en colère, unis et déterminés”

Malgré tout, certains experts se montrent plus positifs, comme Dannie Kjeldgaard, professeur au département de gestion d’entreprise à l’Université du Danemark du Sud, qui voit dans ce mouvement un moyen pour les citoyens de se faire entendre. “Nous avons vu comment les propriétaires de Tesla au Danemark commencent à mettre des autocollants sur leurs voitures pour dire qu’ils ne soutiennent pas Elon Musk”, note-t-il.

Plusieurs médias canadiens comme le Global News et le National Post semblent vouloir ainsi soutenir le boycott et présentent des listes de produits américains facilement remplaçables. Le média québecois L’Actualité a lui aussi prodigué ses propres conseils en la matière.

Des responsables politiques appellent aussi à suivre ce boycott, à l’instar de la députée canadienne Chrystia Freeland, possible tête de liste libérale pour les prochaines élections. Interrogée par CNN, elle affirme: “Nous sommes blessés, c’est sûr, parce que nous sommes vos amis et vos voisins, mais surtout, nous sommes en colère, et nous sommes unis et déterminés.”

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