5 ans après le Covid 19, le monde est-il prêt à affronter une nouvelle pandémie ?

Cinq ans après l’apparition en Chine du Covid-19, qui a fait des millions de morts et dévasté l’économie mondiale, le monde est-il préparé pour une nouvelle pandémie ? Qu’en pensent les experts et l’Organisation mondiale de la santé ? État des lieux.

Illustration. Des membres d’équipage d’Air China en combinaison de protection contre les matières dangereuses à l’aéroport international de Los Angeles, le 30 novembre 2021. L’OMS a déclaré que les pays membres ont approuvé le 1er juin 2024 une série de nouvelles mesures pour améliorer la préparation et la réponse mondiales aux pandémies telles que la COVID-19 et la mpox. 

« Oui et non » 

Le monde est-il mieux préparé pour affronter une autre pandémie ? « La réponse est oui, et non », a récemment affirmé Tedros Adhanom Ghebreyesus, le chef de l’OMS, une organisation qui a été au coeur de la bataille contre le Covid-19.
 

Si la prochaine pandémie survenait aujourd’hui, le monde serait toujours confronté à certaines des mêmes faiblesses et vulnérabilités. Mais le monde a également retenu de nombreuses et douloureuses leçons de la pandémie et pris des mesures importantes pour renforcer ses défenses.

Tedros Adhanom Ghebreyesus, chef de l’OMS
 

covid

Des hommes en combinaison incinèrent les corps des victimes du COVID-19 alors que le nombre de décès augmente près du temple de Pashupatinath à Katmandou, au Népal, le 5 mai 2021.

@AP Photo/Niranjan Shrestha

Selon Maria Van Kerkhove, l’épidémiologiste américaine qui dirige le département Prévention et préparation aux épidémies et pandémies à l’OMS : 

Beaucoup de choses se sont améliorées grâce à la pandémie de grippe (H1N1, Ndlr) de 2009, mais aussi grâce au Covid. Mais je pense que le monde n’est pas prêt pour une nouvelle pandémie ou épidémie de masse.

Maria Van Kerkhove, épidémiologiste américaine

« Le monde n’est pas prêt » 

Le groupe d’experts indépendants pour la préparation et la réponse aux pandémies, créé par l’OMS, le dit tout net : « En 2025, le monde n’est pas prêt à combattre une nouvelle menace pandémique », en raison des inégalités qui persistent en matière d’accès aux financements et aux outils de lutte contre les pandémies, tels que les vaccins.
 

La virologue néerlandaise Marion Koopmans a expliqué à l’AFP que le succès et la rapidité de production des vaccins fondés sur la technique de l’ARN messager (ARNm) pouvait « changer la donne » lors de la prochaine crise sanitaire mondiale.
 

Mais elle s’inquiète que leur utilisation face à une future menace ne rencontre des « problèmes majeurs » notamment en raison du niveau « stupéfiant » de désinformation.


 Et Tom Peacock, virologue à l’Imperial College de Londres, considère que la possibilité d’une pandémie de grippe aviaire H5N1 doit être prise « très au sérieux ». Pour l’heure, le virus ne se transmet pas entre humains mais il circule massivement dans nombre d’espèces animales.
 

« Je ne pense pas que nous soyons davantage préparés que nous ne l’étions avec le Covid », renchéri auprès de l’AFP Meg Schaeffer, épidémiologiste à l’institut américain SAS. Elle estime qu’il faudrait encore quatre à cinq ans aux autorités de santé publique pour détecter et partager des informations plus rapidement.
Mais elle a « confiance » dans les leçons apprises par la population durant le Covid-19 pour se protéger, telles que la distanciation sociale et le port du masque.
 

Un centre sur la prévention des pandémies 

Inauguré en 2021 à Berlin, le nouveau centre de l’OMS sur la prévention des pandémies est consacré à la collecte de renseignements pour mieux détecter les menaces et les atténuer.
Né en 2022, le Fonds de lutte contre les pandémies de la Banque mondiale a jusqu’à présent approuvé des financements d’une valeur de 885 millions de dollars, alloués à près de 50 projets couvrant 75 pays.
Un centre de transfert de technologie pour les vaccins à ARNm a été inauguré en Afrique du Sud en 2023 avec le soutien notamment de l’OMS, ainsi en 2022 qu’un centre mondial de formation à la biofabrication en Corée du Sud pour stimuler la production pharmaceutique locale.
 

Le 30 janvier 2020, l’OMS a déclaré que le Covid-19 constituait une urgence de santé publique de portée internationale (USPPI), son plus haut niveau d’alerte mais aux sonorités trop bureaucratiques.
Et la plupart des pays et le grand public n’ont réagi que quand le chef de l’OMS a utilisé pour la première fois le terme « pandémie », beaucoup plus évocateur, le 11 mars 2020.
Afin de déclencher une collaboration internationale plus efficace, les pays membres de l’OMS se sont mis d’accord sur la notion d’« urgence due à une pandémie », désormais le plus haut niveau d’alerte mondiale.


En décembre 2021, les pays membres de l’OMS ont décidé d’élaborer un accord sur la prévention des pandémies et la préparation à celles-ci pour éviter les graves erreurs du Covid.
Mais des questions de taille restent en suspens, dont celle du partage des données sur les agents pathogènes émergents et les avantages qui en découlent, à savoir les vaccins, les tests et les traitements mais aussi la surveillance des pandémies.
Les négociateurs se sont donnés mai 2025 comme date butoir pour arriver au consensus.
Par ailleurs plus de 200 scientifiques de plus de 50 pays ont évalué les données sur 1.652 agents pathogènes, principalement des virus, permettant à l’OMS de dresser cette année une liste d’environ 30 agents pathogènes susceptibles de provoquer de futures pandémies, tels que le Covid-19, la fièvre de Lassa et les virus Ebola, Zika et de Marburg.

Plus de 7 millions de morts selon l’OMS

Plus de cinq ans après son apparition en Chine, le virus à l’origine du Covid-19 a officiellement atteint 777 millions de personnes et causé plus de sept millions de morts, beaucoup plus en réalité, selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS).
Mais, au fil du temps et des vagues, la répercussion de l’infection respiratoire sur les décès et les hospitalisations s’est fortement amenuisée, grâce à l’immunité acquise par les populations via la vaccination et/ou les infections.
Le Covid tue encore (plus de 3.000 morts d’octobre à novembre 2024 dans 27 pays, selon l’OMS), mais l’écrasante majorité des décès a été enregistrée entre 2020 et 2022.
La pandémie est terminée depuis le printemps 2023 et la levée, par l’OMS, du niveau d’alerte maximal.
Le virus n’a, jusqu’ici, pas de saison spécifique mais semble devenir progressivement endémique, avec des résurgences régulières, un peu à l’image de la grippe, observent divers experts.
 

Le monde veut oublier ce pathogène qui est toujours avec nous, les gens veulent renvoyer le Covid au passé et à bien des égards, faire comme si rien ne s’était passé, parce que cela a été si traumatisant.

Dr Maria Van Kerkhove, responsable de la préparation aux épidémies et pandémies à l’OMS
 

L’ère d’Omicron se prolonge depuis l’automne 2021 : un sous-variant en remplace un autre, sans être plus sévère.
Il ne faut cependant pas entièrement écarter le scénario de nouveaux variants plus virulents ou échappant à l’immunité, jugent certains scientifiques.

Futures pandémies ?
 

Le Covid-19 n’est pas la dernière pandémie, les scientifiques en sont certains. La question est de savoir quand arrivera la prochaine, et si le monde sera mieux préparé.
Environ 60% à 70% des maladies émergentes sont des zoonoses, découlant d’agents pathogènes transmis des animaux vertébrés à l’homme, elles se multiplient du fait de la déforestation, qui accroît les contacts avec la faune sauvage, réservoir de virus inconnus.

La grippe aviaire est actuellement scrutée, spécialement depuis un premier décès humain lundi 6 janvier aux États-Unis. Il s’agissait d’un patient âgé qui souffrait d’autres pathologies et qui avait été contaminé via des oiseaux de basse-cour et sauvages.

Par Pascale Veysset – AFP

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *