Renégociation des contrats pétroliers, gaziers et miniers : un pari risqué pour l’Etat
Le Président de la République Bassirou Diomaye Faye avait annoncé, dans son programme de gouvernement, sa volonté de renégocier les principaux contrats économiques conclus avec des compagnies étrangères. Ainsi, au cœur de ses préoccupations, se trouvent les accords miniers, mais aussi les contrats concernant le pétrole et le gaz. Une fois au pouvoir, malgré les divergences de points de vue des experts sur cette possibilité de renégocier les contrats pétroliers et gaziers, le Chef de l’Etat et son Premier ministre campent sur leur position. La rupture de ces contrats avec les multinationales ne constitue-t-elle pas cependant un risque pour le Sénégal ? En tout cas, dans le passé, ce genre de décision a eu à causer des déboires à l’Etat du Sénégal avec la rupture des contrats qui le liaient à Hydro Quebec et à Arcelor Mittal.
Les contrats miniers et gaziers ont été toujours décriés par les acteurs politiques et la société civile sous le régime de l’ancien Président de la République Macky Sall. Ousmane Sonko, leader de l’opposition, avait promis de renégocier tous les contrats pétroliers, miniers et gaziers, s’il est élu président de la République. « Macky Sall s’accroche au pouvoir parce qu’il redoute ce qu’il a fait sur les contrats pétroliers et gaziers. C’est le motif de sa quête d’une troisième candidature. Mais nous ferons en sorte que tout soit clair après son départ », avait indiqué le leader de Pastef. Le nouveau régime dirigé par Bassirou Diomaye Faye, Président de la République, et Ousmane Sonko, Premier ministre, appelle à la renégociation des contrats miniers et d’hydrocarbures. Aujourd’hui qu’ils ont accédé au pouvoir, le premier Ministre Ousmane Sonko campe toujours sur sa position. En conférence de presse conjointe avec Jean Luc Mélenchon, il avait soutenu que les partenaires du Sénégal doivent encourager et accompagner ce processus de rééquilibrage du gain que chacun doit avoir dans la gestion de ses ressources naturelles. Cette question qui a été agitée a alimenté les débats, ces derniers mois. Malgré le fait que des experts ont eu des avis divergents sur cette possibilité de renégocier les contrats gaziers et miniers, le Chef de l’Etat, plus que jamais déterminé à passer à l’acte, revient à la charge. Selon lui, cela va permettre au Sénégal de profiter davantage des retombées de ses ressources naturelles. «Ma conviction est qu’on aurait pu mieux négocier ces contrats. Notre stratégie est de voir les pistes de renégociation. De ce fait, nous allons renégocier les contrats et essayer de voir comment investir dans d’autres secteurs pour leur développement et éviter la malédiction du pétrole», a-t-il fait part.
En tentant la renégociation des contrats déjà signés, notre pays peut toutefois s’exposer à des risques. Dans le passé, l’Etat du Sénégal a eu à rompre des contrats avec des compagnies multinationales qui lui ont causé d’énormes préjudices. Après son élection en 2000, l’une des premières mesures que le président Abdoulaye Wade a prise a été de rompre le contrat qui liait l’Etat du Sénégal au groupe franco-québécois, Elyo Hydro Québec-International. Cette entreprise qui avait réussi à s’adjuger la Société Nationale d’Electricité (SENELEC), en mars 1999, a été priée de plier bagages après la persistance des délestages due à un déficit criant d’investissement dans le réseau d’énergie électrique. En 2012 aussi, le gouvernement de Macky Sall avait rompu le contrat qui le liait à ARCELOR Mittal à cause des lenteurs dans l’exécution du projet et le faible taux d’investissement dans les composantes de celui-ci par le partenaire. Le 20 août 2024, une commission d’examen des contrats dans le secteur stratégique, constituée de cadres de l’administration, a été installée par le Premier Ministre. Le Sénégal n’est-il pas en train de devenir un pays risqué pour les investisseurs si l’on sait que ces ruptures de contrats peuvent peser sur la destination sénégalaise pour l’investissement?
NDEYE AMINATA CISSE
SOURCE : SUDQUOTIDIEN