Face aux tensions dans le sud du Liban, le Hezbollah s’affiche en protecteur
En lien avec la guerre à Gaza, les affrontements sont quotidiens entre Israël et le Hezbollah libanais. L’organisation politico-militaire, proche de l’Iran, mène des attaques de roquettes et de drones auxquelles répliquent des raids israéliens. Plus de 80 000 habitants du sud du Liban ont été déplacés de la région frontalière. Dans ce fief du Hezbollah, la milice chiite est active sur le plan militaire, mais aussi sur le plan civil, en prenant notamment en charge le relogement des familles déplacées.
Par :Nicolas Falez envoyé spécial RFI dans le sud du Liban,
La voiture devant nous s’arrête et par la fenêtre l’un des passagers nous montre du doigt des débris noircis sur le bord de la route. C’est ici qu’en janvier une frappe attribuée à Israël a tué Wissam Tawil, un important commandant du Hezbollah. Son portrait s’affiche désormais sur des bannières flottant dans les rues du village : l’homme barbu porte une casquette assortie à sa veste de camouflage et les affiches font du disparu un « martyr sur le chemin de Jérusalem ». C’est en effet pour affirmer sa solidarité avec les Palestiniens que le Hezbollah attaque le nord d’Israël depuis quatre mois. « Oui, c’est un héros. C’est sûr », nous dit cette habitante du village lorsqu’on l’interroge sur la mort de Wissam Tawil. « Il nous protégeait. Tout ce qu’on dit de lui ne suffit pas à décrire ce martyr. Dieu le sait », termine-t-elle.
Un drone grésille dans le ciel bleu. « Invisible, mais israélien », nous dit-on. Ici, c’est Khirbet Selm, village chiite des montagnes du Liban du Sud, à une dizaine de kilomètres seulement de la frontière israélienne. Pour des journalistes, il est impossible de circuler sans y être autorisé et accompagné par des membres du Hezbollah. Ce sont eux qui nous ont indiqué le lieu de la frappe qui a coûté la vie à Wissam Tawil, dans son village natal.
Poing vert sur fond jaune
Dans ces collines, le Hezbollah contrôle tout. L’armée et la police libanaise sont absentes du paysage. Poing vert brandissant un fusil automatique sur fond jaune, le drapeau du Hezbollah, lui, est partout. Des portraits du guide suprême iranien Ali Khamenei ou du général des Gardiens de la révolution Qassem Soleimani, assassiné en 2020, rappellent la proximité entre la République islamique d’Iran et le Hezbollah libanais. Ce dernier est à la fois un parti politique et une puissante organisation armée, dont les roquettes et les drones visent quotidiennement le nord d’Israël depuis le début de la guerre à Gaza.
Ici, nous n’entendrons que des voix favorables au « Hezb » (« le Parti »), comme le surnomment les habitants. « Par la volonté de Dieu, Israël va cesser d’exister », dit Hassan qui s’indigne de « ce qu’Israël fait endurer au peuple libanais et au peuple palestinien. Que le Hezb gagne si Dieu le veut et que nous puissions retourner dans nos villages ! », continue-t-il. Car Hassan est un déplacé, un ouvrier agricole du village de Mhaibi, littéralement collé à la ligne bleue qui fait office de frontière entre le Liban et Israël. Dès que la région s’est embrasée en octobre 2023, Hassan a fui la zone devenue trop dangereuse. « Si le Hezbollah ne nous aidait pas, on n’aurait pas pu s’installer », explique le quinquagénaire au visage buriné qui nous reçoit dans le grand appartement où il est hébergé avec son épouse et leurs quatre enfants. « Ils nous donnent une somme d’argent chaque mois, de l’aide alimentaire… Tout ce dont on a besoin, on le demande et ils l’apportent. Et il y a tout ce qu’il faut : l’eau, l’électricité, des vêtements. Ils ont même apporté des meubles pour l’appartement », poursuit-il.