Élections législatives le jeudi 8 février au Pakistan, 5e pays le plus peuplé au monde

Quelque 128,5 millions de Pakistanais sont appelés à voter jeudi 8 février pour élire leurs représentants aux Assemblées provinciales et nationales. Plusieurs enjeux sont au cœur de ces élections législatives. Parmi ceux-ci, la grave crise politique et économique que traverse le pays depuis quelques années, crise qui s’est accentuée au cours de ces deux dernières années.

De notre correspondante à Islamabad – RFI

57 millions de jeunes Pakistanais sont appelés à voter, soit 44% du corps électoral. C’est un enjeu majeur du scrutin. Que sait-on sur l’état d’esprit de cet électorat décisif ?

La jeunesse est particulièrement déçue. Plus de 30 % des jeunes diplômés sont au chômage. Sur les campus universitaires, on ne se fait pas d’illusion, c’est ce que nous a confié une étudiante en communication à l’université du Pendjab à Lahore : « Je ne vois personne qui mérite mon vote pour l’instant. Les politiciens ont tous été décevants. Donc, ils ne méritent pas d’avoir une autre chance. »

On entend la désillusion, la lassitude chez cette jeune femme. On l’entend dans toutes les bouches des jeunes Pakistanais. D’ailleurs, ils étaient peu à se mobiliser lors du précédent scrutin en 2018. Seul un tiers des jeunes électeurs était allé voter. Cette lassitude, ce manque de perspective de la jeunesse, mène chaque année des milliers de jeunes Pakistanais à fuir leur pays. Certains de façon illégale. 40% de la population n’aspire qu’à l’exil selon le rapport du think tank Gallup.

Il y a un décalage entre la population et la classe politique. Comment l’expliquer ?

Les partis politiques qui gouvernent depuis des décennies au Pakistan sont des partis historiques, traditionnels et dynastiques. Ce sont des grandes familles de politiciens qui se transmettent le flambeau, de génération en génération. La politique au Pakistan est une grande saga interminable avec toujours les mêmes personnages. Il n’y a pas de renouvellement de la classe politique, d’où ce sentiment que ce sont toujours les mêmes qui se partagent le pouvoir et les privilèges qui vont avec, dans un pays où la corruption et le népotisme sont endémiques. Et il y a donc une vraie défiance à l’égard des politiciens et de l’establishment, c’est-à-dire l’armée qui contrôle la politique et qui a le vrai pouvoir de faire et de défaire les dirigeants du pays.

On comprend que la participation est un enjeu. Est-ce que les électeurs pakistanais sont attendus en masse ?

Il y a une inquiétude à ce sujet, d’autant que beaucoup expriment leur inquiétude quant au trucage du scrutin. On entend aussi parler depuis des semaines d’élections jouées d’avance et acquises au parti de Nawaz Sharif. Des personnalités se mobilisent sur les réseaux sociaux pour inciter les électeurs à aller voter jeudi.

C’est le cas d’un humoriste, Tabish Hashemi, qui traite du sujet de la participation et du risque de manipulation des résultats sur le ton de l’humour. « Si vous ne votez pas, le travail des gens qui veulent manipuler les élections sera très facile, ils s’ennuieront et n’auront plus qu’à passer le temps à fumer des cigarettes. Faites-les travailler, rendez leur vie misérable, votez ! Il faut que nous soyons nombreux à voter, comme ça, ils devront travailler comme des fous pour manipuler les élections », déclare-t-il dans une de ses récentes vidéos diffusées sur les réseaux sociaux :

Tabish Hashemi, humoriste pakistanais qui veut motiver les électeurs à se rendre aux urnes. Ce sera un défi, mais on voit autour de nous, qu’il y a malgré tout un désir de vote même chez les plus déçus. Des travailleurs journaliers, parmi les plus pauvres, qui nous ont affirmé qu’ils feraient huit heures de route le jour J pour aller dans leur village, où ils sont enregistrés afin de glisser leur bulletin dans l’urne.

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