Elargissement de l’assiette fiscale: Le Fmi indique la voie aux pays en développement
Représentant environ 13,2 % du Pib en moyenne, les recettes fiscales des pays en développement à faible revenu sont bien inférieures au niveau qu’elles pourraient atteindre (19,9 %), à structure économique et qualité des institutions comparables, indique le Fmi dans une note publiée début février. Le document donne des enseignements et des orientations pratiques sur la manière d’améliorer la capacité fiscale en s’appuyant sur l’expérience sur le terrain et les travaux empiriques de ses services.
Les Pays en développement à faible revenu (Pdfr) ont besoin de recettes annuelles supplémentaires représentant en moyenne près de 16 % de leur Pib pour atteindre les Odd à l’horizon 2030. Mais, selon le Fmi, malgré les progrès réalisés, le potentiel fiscal est encore loin d’être pleinement exploité dans les Pdfr. « Les recettes fiscales ont progressé dans les Pdfr, avec une augmentation des ratios impôts/Pib moyens d’environ 3,5 points de pourcentage depuis les débuts des années 90 pour atteindre 13,8 % en 2020 », souligne l’institution de Bretton Woods dans un rapport intitulé « Renforcer la capacité fiscale dans les pays en développement » et publié début février. Si la situation varie selon les pays, le caractère durable de l’augmentation des recettes reste fragile face aux chocs.
Les nouvelles données empiriques figurant dans le rapport du Fmi laissent à penser qu’une nouvelle augmentation notable est possible. « Pour atteindre cet objectif, il faudra s’engager fermement à améliorer les institutions qui administrent le système fiscal et gèrent la réforme du système fiscal et à améliorer la conception des impôts de base », préconisent les auteurs du rapport. Selon le document, les Pdfr peuvent augmenter leur ratio impôts/Pib de 6,7 points de pourcentage en moyenne pour réaliser pleinement leur potentiel, compte tenu des institutions et des structures économiques actuelles. « En amenant ces dernières au niveau des pays émergents, la réforme institutionnelle peut leur faire gagner 2,3 points supplémentaires. Le total, à savoir 9 points de pourcentage du Pib, permettrait à l’État de jouer plus pleinement son rôle dans le développement durable, inclusif et résilient », mentionne le rapport.
Toutefois, cette augmentation des recettes nécessite de renforcer la conception des impôts de base (Tva et accises, impôts sur le revenu des personnes physiques et impôts sur les sociétés). Pour le Fmi, l’accent doit être mis sur l’élargissement de l’assiette fiscale par la réforme de dépenses fiscales inefficaces, une imposition plus neutre des revenus du capital et une meilleure utilisation de l’impôt foncier en tenant compte à la fois de l’efficacité et de l’équité. Ainsi, l’amélioration des institutions qui administrent le système fiscal et gèrent la réforme est essentielle. « Il faut, pour cela, créer des unités de politique fiscale adéquates chargées de prévoir et d’analyser l’incidence des politiques fiscales sur tous les aspects de la politique économique, accroître la professionnalisation des fonctionnaires responsables de la conception et de la mise en œuvre des impôts, mieux utiliser les technologies numériques pour renforcer les administrations fiscales ainsi que la clarté dans la façon dont la politique et l’administration sont transposées dans la législation », souligne le rapport.
Lien entre fiscalité et gouvernance
Cependant, ajoute la source, la capacité fiscale doit continuer à reposer au premier chef sur l’amélioration de la conception et de l’administration des impôts nationaux de base. La coopération internationale dans l’imposition des bénéfices des entreprises multinationales, bien qu’importante, est insuffisante pour répondre aux besoins des Pdfr en matière de recettes et ne doit pas détourner l’attention de l’objectif plus général de renforcement de la capacité fiscale au service du développement.
Au-delà de sa fonction budgétaire, la capacité fiscale va de pair avec une accélération de la croissance et l’amélioration des institutions. Ainsi, une politique inclusive et une classe dirigeante stable sont « des éléments déterminants pour éviter que des groupes d’intérêt ne s’approprient les politiques et surmonter les obstacles à la réforme de l’économie politique ».
« En l’absence de conditions politiques favorables, les réformes fiscales socialement sensibles, par exemple, la rationalisation des exonérations inefficaces de la Taxe sur la valeur ajoutée (Tva), peuvent être difficiles à mettre en œuvre », met en garde le Fmi, précisant que la capacité juridique, à savoir le système judiciaire et les droits de propriété, contribue également, de façon fondamentale, au recouvrement efficace de l’impôt.
En effet, à quelques exceptions près, les pays où la production économique est plus importante et les institutions plus solides ont été en mesure de mobiliser davantage de recettes fiscales. Pour les Pdfr, le ratio impôts/Pib tourne autour de 10 %, avec seulement quelques pays où ce chiffre est supérieur à 15 %. Enfin, la pandémie de Covid-19 a eu d’importantes répercussions négatives sur les recettes fiscales dans les Pdfr, mais elle a été le moteur d’une accélération du passage au numérique des administrations fiscales.
Seydou KA