Après le verdict du procès: Le débat s’enflamme, la violence recule

Malgré le verdict, les Sénégalais ont vaqué à leurs occupations. Des motos ont même circulé. La vie a repris son cours normal à Dakar, se disputant l’espace avec les débats.

Par Ousmane SOW – On ne parle plus de manifestation et de casse. Le verdict du procès opposant Ousmane Sonko à Mame Mbaye Niang s’est peu à peu imposé dans les espaces publics, au fur et à mesure que la journée avançait hier. Après trois reports successifs au cours des derniers mois, le procès a pu enfin connaître son épilogue, mais au moins 5 personnes ont auparavant trouvé la mort. «Ce qui est dommage, ce sont les personnes qui ont perdu la vie au cours de ces manifestations», regrette un vendeur de journaux trouvé devant son kiosque. Secouée pendant des jours par des vagues de manifestations violentes, Dakar semblait avoir retrouvé le calme hier.

Les rues et ruelles, entre autres artères aux environs de Grand-Yoff, Castors, Liberté 6, étaient vides de manifestants, laissant place à la contestation verbale. Il faut signaler que l’Etat avait déployé un fort dispositif sécuritaire en prévision de manifestions interdites et de la comparution du leader du parti Pastef, devant la Chambre correctionnelle du Tribunal de Dakar pour son procès. Mais, une fois le verdict tombé, les choses ont vite changé de couleur, car le débat ne se situait plus sur l’affaire de la diffamation opposant Mame Mbaye Niang à Ousmane Sonko, mais sur l’éligibilité du leader du parti Pastef pour la Présidentielle de 2024.

Matar Cissé, un commerçant du marché de Grand-Yoff, trouvé à la devanture de sa maison à Cité millionnaire, commente : «Ils n’ont rien compris. Le pouvoir a complètement renversé le jeu en sa faveur. Apparem­ment, Me Wade n’a pas échoué sur sa formation politique», ironise-t-il. Cet observateur de poursuivre : «Le procès politique ne se gagne pas devant les magistrats. Par contre, ils se gagne devant l’opinion.» Il n’est pas le seul commerçant à avoir baissé le rideau de sa boutique hier. Sanar Ngom, vendeur d’accessoires de téléphone portable, est un ancien étudiant de l’Ecole des hautes études polytechniques de Dakar (Hepo). Il rétorque que la question qui se pose, ce n’est pas l’éligibilité de leur leader. «Savons-nous vraiment pourquoi on se battait», s’interroge-t-il, en appelant à la «Résis­tance» pour le 3 avril prochain pour une autre manifestation annoncée par Ousmane Sonko.

Dans les rues, se dégage une impression d’un jour férié. Les Forces de l’ordre ont étouffé les tentatives de manifestations et Dakar semble trouver un nouveau souffle. Les commerces sont fermés, transport suspendu avec une forte présence policière dans certains coins et endroits stratégiques des fauteurs de troubles. Mais malgré l’arrêté du Gouverneur de Dakar, interdisant la circulation des deux-roues, certains d’entre eux ont quand même circulé, comme si rien de n’était. Au même moment, les places publiques et même certains ateliers se sont aussi transformés en lieux de débats.

Certains, pour exprimer leur déception, d’autres pour tirer sur le pouvoir en place. «Que ceux qui disaient que l’Etat restera fort se montrent. Des morts, des blessés, les écoles, banques, commerces et l’Admi­nistration tous aux arrêts à la solde d’une seule personne. Si cet Etat n’est pas faible, je dirais qu’il est misérable et pitoyable», fustige Abdou Touré. Il ne comprend pas cette décision de la Justice.

Très remonté, il affirme que son leader n’est pas condamné à 2 mois avec sursis, mais «plutôt» condamné à être le Président des Sénégalais. «Il faut vraiment être de mauvaise foi pour nier l’existence du rapport du Prodac», a-t-il rebondi. Une idée que ne partage pas son compagnon. Casquette vissée sur la tête, ce jeune ayant préféré garder l’anonymat n’avait pas imaginé une telle décision de Justice. Mais il estime que Sonko va conduire le Sénégal à sa perte, car il oblige les gens à arrêter leur business, fermer des entreprises, juste parce qu’il n’assume pas ses actes. «Dieu merci que cette affaire est bouclée», soupire-t-il.

SOURCE LEQUOTIDIEN

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