Vive polémique après l’ajout du nom Trump au Kennedy Center
Aux États-Unis, le Kennedy Center est au cœur d’une vive polémique depuis le choix par son nouveau conseil d’administration de le rebaptiser en « Trump-Kennedy center ». En réponse, Toby Morton, ancien auteur de South Park, a lancé un site parodique en détournant le nom de domaine du Trump-Kennedy Center. Une satire qui illustre les tensions autour de la politisation de cette grande institution culturelle de Washington, financée à hauteur de 250 millions de dollars par le Congrès.
Le Kennedy Center est un véritable pilier de la culture américaine installé en plein cœur de Washington depuis 1971. Ce centre culturel emblématique abrite deux grandes salles de concert de 2.500 places chacune, où se déroulent chaque année des événements tels que des pièces de théâtre, des concerts classiques et des ballets.
Les Kennedy Center Honors, une soirée pour rendre hommage aux artistes américains ou étrangers qui ont contribué au rayonnement de la culture, y sont organisés chaque année. Parmi les moments mémorables, la performance de Aretha Franklin en 2015, qui avait ému aux larmes le président Obama.
« Perdre mon intégrité me coûterait plus cher que n’importe quel salaire »
Vendredi 19 décembre, des ouvriers ont rajouté sur la façade de ce bâtiment le nom de Donald Trump, le rebaptisant ainsi le Trump-Kennedy Center. Une décision, prise par le conseil d’administration du centre où siègent des proches du président républicain, jugée illégale, qui a provoqué la colère d’élus démocrates, de la famille Kennedy et de certains résidents. « C’est un sacrilège. Je suis né à Washington. Je ne vivrais pas ici avec le nom de cet homme sur ce bâtiment », réagit Andrew Howard, habitant de la ville. Des manifestations ont également eu devant le centre.
En février 2025, Donald Trump a été élu président du Trump-Kennedy Center et ses proches ont pris les rênes du conseil d’administration. Bien que Donald Trump ait exprimé sa « surprise » face à ce vote du conseil, depuis des mois déjà, il appelait le centre par ce nom sous le ton de l’humour.
Et cette prise de contrôle a provoqué des remous dans le monde artistique. Pour The Cookers, un groupe de jazz qui a décidé d’annuler son concert du 31 décembre, « le jazz est né de la lutte et d’une obstination sans relâche pour la liberté: liberté de pensée, d’expression », écrivent-ils dans un communiqué: « Nous ne tournons pas le dos à notre public, et nous voulons nous assurer que lorsque nous reviendrons sur scène, la salle pourra célébrer la présence totale de la musique et de tous ceux qui la composent. »
Doug Varone and Dancers, une compagnie de danse dont la performance à Washington était prévue en avril 2026, a justifié son choix lundi 29 décembre sur Instagram: « Suite à la dernière décision de Donald Trump de renommer la salle en son honneur, nous ne pouvons plus nous permettre, ni demander à notre public de mettre les pieds dans cette institution autrefois prestigieuse. »
Kristy Lee, une chanteuse de folk, a confié sur les réseaux sociaux qu’annuler son concert prévu en janvier 2026 « fait mal. C’est comme ça que je paye mes factures. Mais perdre mon intégrité me coûterait plus cher que n’importe quel salaire ».
Des décisions qui ont suscité l’ire de Richard Grenell, président de l’institution. « Les artistes qui annulent aujourd’hui leurs spectacles avaient été engagés par la précédente direction d’extrême gauche », a-t-il écrit sur X lundi soir, les qualifiant de « militants ». « Les arts sont pour tout le monde et la gauche en est furieuse », a-t-il ajouté, dénonçant un « boycott ».
Il est même allé jusqu’à menacé un des artistes, le jazzman Chuck Redd, de poursuites judiciaires et a demandé une compensation d’un million de dollars, selon une lettre consultée par l’AFP. Il a accusé le musicien d’« intolérance » et de « stratégies d’intimidation ».
En réponse à ce changement, Toby Morton, ancien scénariste de la série animée South Park, a anticipé l’ajout du nom Trump au Kennedy Center. Il a acheté le nom de domaine trumpkennedycenter.org, transformant le site en une parodie satirique. Sur ce site, on peut lire des annonces humoristiques, telles que la prochaine performance de la compagnie de danse fictive Epstein.
Suppression des drags shows
La Maison Blanche affirme que le nom de Trump est associé parce que le président américain a œuvré pour les travaux de restauration du bâtiment. Il a obtenu 250 millions de dollars du Congrès pour la modernisation du théâtre de Washington. Mais c’est surtout l’ultime symbole de sa prise de contrôle par le président américain pour lutter contre le « wokisme ».
Des manifestants au lendemain du changement de nom du théâtre. – AP Photo / Julia Demaree Nikhinson
La nouvelle direction y a par ailleurs supprimé les drag shows et les évènements célébrant la communauté LGBT+. À la place, ce sont des conférences de la droite religieuse qui auront lieu et des artistes chrétiens se produiront. Un changement d’identité qui a des conséquences: selon la presse américaine, les ventes de billets ont baissé depuis l’arrivée du nouveau conseil d’administration.
