CEDEAO : la défection des pays de l’Alliance des États du Sahel aura un impact ‘’relativement faible’’ sur le commerce ouest-africain
Dakar, (APS) – La décision prise par les trois pays de l’Alliance des États du Sahel (AES) de quitter la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) devrait avoir un impact ‘’relativement faible’’ sur le commerce régional, même s’il est souhaitable de les voir réintégrer cette organisation, a analysé l’économiste Malick Sané, enseignant à l’université Cheikh-Anta-Diop de Dakar.
‘’Il faut relativiser le poids des pays de l’AES au sein de la CEDEAO. Ce sont les trois pays les plus pauvres. Ils n’ont pas beaucoup d’offres’’, a relevé M. Sané dans un entretien avec des journalistes, en marge d’un panel sur ‘’la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAF) et son impact en Afrique de l’Ouest’’.
Dès lors, ‘’l’impact de leur départ de la CEDEAO sera relativement faible pour les autres pays de l’organisation’’, pense ce spécialiste de l’économie du développement.
Toutefois, ‘’mieux vaut être ensemble que de se séparer. Espérons qu’on puisse, dans un avenir proche, les faire revenir au sein de la CEDEAO. C’est ce qui est souhaitable’’, a-t-il poursuivi.
— ‘’La CEDEAO a l’un des accords commerciaux régionaux les plus performants en Afrique’’ —
‘’Ça, c’est quelque chose qui peut arriver à toutes les organisations. C’est un problème qu’il faut espérer résoudre’’, a dit M. Sané en parlant de la défection du Burkina Faso, du Mali et du Niger.
Il signale, par ailleurs, que la CEDEAO reste l’une des plus fortes communautés économiques régionales du contient, lesquelles tentent, depuis cinq ans, de construire une zone de libre-échange, sous la houlette de l’Union africaine.
‘’La CEDEAO a l’un des accords commerciaux régionaux les plus performants en Afrique […] Elle a un tarif extérieur commun’’, c’est-à-dire un droit de douane commun à ses pays membres, a-t-il signalé.
Momar Sourang, le coordonnateur du Collectif des professionnels des transports routiers du Sénégal, estime que ‘’l’Alliance des États du Sahel et la CEDEAO doivent s’entendre’’. ‘’Aucune d’entre elles n’a intérêt à aller seul, parce que nous avons en face de nous le reste du monde, alors que nos économies sont faibles.’’
Il a déploré, par ailleurs, la faible implication du secteur privé dans la politique menée par l’Union africaine en vue de la promotion du commerce entre les pays d’Afrique. ‘’Ce qui est regrettable, c’est que tout est fait seulement par les gouvernants, le secteur privé n’est pas impliqué. Et puisque c’est une directive de l’Union africaine (la zone de libre-échange continentale), nous demandons à cette organisation de dire aux États avec insistance de nous associer au débat, au niveau de la conférence des chefs d’État, pour leur faire part de nos préoccupations’’, a dit M. Sourang aux journalistes.
— Inexistence d’un ‘’cadre réglementaire sécurisé’’ —
‘’Quand je vais [dans un pays membre de la CEDEAO], je veux me sentir comme au Sénégal. Pour cela, il faut harmoniser les règlements’’, a-t-il ajouté en prenant part au panel organisé par le Laboratoire d’analyse des politiques de développement, un démembrement de la Faculté des sciences économiques et de gestion de l’université Cheikh-Anta-Diop.
‘’Il faut que l’Union africaine ait un dispositif de veille et d’alerte, pour que nos préoccupations puissent être prises en compte’’, a proposé Momar Sourang.
Il a dénoncé les ‘’tracasseries’’ auxquelles sont confrontés les transporteurs, dans les pays membres de la CEDEAO.
‘’Nous avions proposé à la CEDEAO de faire en sorte que les camions qui empruntent ses corridors puissent avoir un identifiant ZLECAF (zone de libre-échange continentale africaine), pour que ceux qui les conduisent ne subissent plus des traitements discriminatoires’’, a rappelé M. Sourang.
Prenant part au panel en tant que représentant du secteur privé sénégalais, il a déploré l’inexistence d’un ‘’cadre réglementaire sécurisé’’ dans les pays de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest.
À cause de l’absence d’un tel ‘’cadre’’, a-t-il relevé, ‘’dans l’espace communautaire de la CEDEAO, la carte brune est déchirée [dans certains pays], où son titulaire est ensuite jeté en prison alors que ces pays ont ratifié la règlementation à l’origine de ladite carte’’.
‘’Comment peut-on investir dans ces conditions-là ?’’, s’est-il ensuite demandé.
— Un réseau de transport efficace et une législation correcte —
‘’Aujourd’hui, il y a plein de choses qu’on peut faire entre pays africains. Et il faudrait que l’Union africaine mette en place des infrastructures routières de dernière génération combinées au ferroviaire et au maritime, mais de façon intelligente’’, a ajouté M. Sourang. ‘’Si on a un réseau de transport efficace et une législation correcte, l’Afrique pourra davantage commercer avec l’Afrique.’’
Il a déploré la priorité qu’accordent les États à leur souveraineté nationale sur la règlementation communautaire. ‘’Quand on est dans un espace communautaire, il faut parler de souveraineté communautaire et de préférence communautaire. Quand on brandit la préférence nationale, ça ne va pas’’, a martelé le coordonnateur du Collectif des professionnels des transports routiers du Sénégal.
Momar Sourang plaide pour la protection des industries des pays d’Afrique de l’Ouest contre la concurrence étrangère.
‘’Au Sénégal, il y avait la SOTIBA Simpafric (Société de teinture, impression et blanchiment africaine), ICOTAF (Industrie cotonnière africaine), etc. Beaucoup de Sénégalais ont essayé d’investir, mais ils se sont heurtés aux importations. Une industrie, on la protège. Aujourd’hui, des Chinois et les Indiens débarquent avec leurs marchandises. Est-ce normal ? […] Il faut surveiller les importations. Quand on fabrique des chaussures au Sénégal, on ne doit pas importer des chaussures au Sénégal’’, a-t-il soutenu.
M. Sourang estime qu’il n’existe pas en Afrique ‘’une communauté économique intégrée à proprement parler’’.
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