Renforcement du système de surveillance à la frontière entre la Chine et la Corée du Nord
La frontière entre la Chine et la Corée du Nord de plus en plus surveillée. Route d’exil pour les Nord-Coréens souhaitant faire défection, le passage de la frontière chinoise est de plus en plus difficile. La surveillance renforcée augmente le risque d’être repéré par les autorités chinoises, qui patrouillent tout l’arrière-pays rural à la recherche de nord-coréens passés entre les mailles du filet. Leur capture se solde souvent par un renvoi en Corée du Nord où ils peuvent faire face à de grave sanctions.
Avec Celio Fioretti correspondant RFI à Séoul,
Dans sa nouvelle politique et son budget dédié à la surveillance des immigrés illégaux, la Chine a largement investi dans la frontière nord-coréenne. Pékin a mis en place de nouveaux centres d’expulsion, des centaines de caméras intelligentes à reconnaissance faciale et des patrouilles de bateaux supplémentaires le long de sa frontière de 1 400 km avec la Corée du Nord. Pour la première fois, un système de quota a même été mis en place pour récompenser la capture d’au moins 10 Nord-coréens et le traitement de leur dossier sous les 30 jours.
Pour cela, Pékin s’aide de toute la technologie à sa disposition. La police chinoise a commencé à surveiller de près les comptes de réseaux sociaux des Nord-Coréens en Chine et à collecter leurs empreintes digitales, leur voix et leurs données faciales. Avec ce système il sera désormais beaucoup plus difficile pour les nord-coréens de prendre les transports en commun ou de s’afficher en public. Pour de nombreux Nord-Coréens vivant cachés en Chine depuis plusieurs années, en l’attente d’avoir assez de moyen pour changer de pays, la pression des autorités se fera de plus en plus sentir.
Quel est l’intérêt pour la Chine de capturer et de renvoyer chez eux ces Nord-Coréens ?
Environ 70 % des transfuges qui ont tenté de rejoindre la Corée du Sud au cours des deux dernières années ont été arrêtées par la police chinoise, contre environ 20 % auparavant.
Pour Pékin, la répression de l’immigration clandestine l’aide à gérer ses relations avec Pyongyang et la stabilité à la périphérie de la Chine. Cela permet également à la Chine d’exercer une influence potentielle sur son voisin, car Pékin peut contrôler le sort de ces Nord-Coréens sans papiers et marchander leur retour.
Signataire convention de 1951 sur les réfugiés, la Chine est tenue de ne pas refouler les personnes qui risqueraient d’être persécutées ou torturées dans leur pays d’origine. Mais le gouvernement chinois qualifie régulièrement les Nord-Coréens de « migrants économiques » illégaux afin de les rapatrier de force en vertu d’un protocole frontalier bilatéral de 1986.
Côté nord-coréen, la frontière s’est, elle aussi, renforcée avec de nouveaux dispositifs de sécurité
Depuis la pandémie de Covid-19 et la fermeture de leurs frontières les deux pays en ont profité pour renforcer les mesures de sécurité, jusqu’à être pleinement en place cette année.
Le dirigeant nord-coréen Kim Jong Un a renforcé sa sécurité aux frontières pour la rendre moins poreuse. Les images satellites montrent que les autorités nord-coréennes ont construit au moins 482 km de nouvelles clôtures le long de sa frontière en 2023. Les images montrent également de nouveaux postes de garde et la création de zones tampons pour limiter les mouvements. Ces nouvelles infrastructures frontalière s’accompagnent d’une application plus autoritaire des règles, notamment d’un ordre de tir à vue pour les gardes-frontières.
Ces mesures limitent les défections de Nord-Coréens, qui ne sont plus qu’une centaine par an contre deux mille il y a une dizaine d’années. Autre conséquence, les réseaux de contrebande qui alimentent le pays sont également mis en difficulté. Pour de nombreux Nord-Coréens, la contrebande et le marché noir sont les moyens de recevoir de la nourriture ou même de l’argent de la part de leurs proches en dehors du pays ou en revendant des produits à l’étranger.