Concertations sur le processus électoral, en vue des législatives: Atel boude, Tine contre-attaque
Le ministre de l’Intérieur, Jean-Baptiste Tine, a organisé le samedi 21 septembre dernier les premiers échanges sur le processus électoral en vue des législatives anticipées du 17 novembre prochain. Tenue à Dakar, cette rencontre a été marquée par le boycott des membres de l’Alliance pour la transparence des élections (ATEL), après le refus du ministre de l’Intérieur d’acter leur exigence de retrait de tous les décrets déjà pris dans le cadre de ces législatives anticipées.
Les échanges sur le processus électoral en vue des législatives anticipées du 17 novembre prochain, convoqués par le ministre de l’Intérieur, Jean-Baptiste Tine, le samedi 21 septembre dernier, ne se sont pas déroulés comme c’était prévu. Les membres de l’Alliance pour la transparence des élections (ATEL) ont boudé la salle quelques heures seulement, après le début des travaux. En effet, invité à prendre la parole à son tour, l’ancien responsable libéral Oumar Sarr qui s’exprimait au nom de ses camarades membres de le l’alliance Atel, a accusé le Général Jean-Baptiste Tine, d’avoir outrepassé ses prérogatives en proposant au chef de l’Etat les projets de décret portant convocation du corps électoral et répartition des sièges sans concertation préalable avec les acteurs politiques. Poursuivant son propos, il a demandé le retrait de tous les décrets et autres arrêtés signés dans le cadre de ce processus électoral et l’ouverture de concertations en vue d’un accord sur un nouveau calendrier de ces législatives. « Vous avez pris des décrets pour organiser les élections sans concertation. Il y a des questions préjudicielles à considérer. Nous voulons savoir si cette discussion aboutira à un retrait des décrets déjà pris, afin de permettre des échanges plus larges et de parvenir ensemble à des consensus. Nous avons toujours discuté du processus avant toute décision », a-t-il martelé à l’endroit du ministre de l’Intérieur Jean-Baptiste Tine.
Et ce dernier de rétorquer : « M. Sarr, ce qui nous amène ici, c’est la discussion que nous voulons mener avec les acteurs sur tout le processus. Nous avons différents points à aborder aujourd’hui et nous prenons en compte vos préoccupations. Ceci étant, nous aviserons le président de la République de l’aboutissement de nos échanges sur le processus ». Suite à cette réponse, Oumar Sarr a arraché la parole nonobstant les demandes pressantes du ministre qui lui disait de permettre à son suivant sur la liste des orateurs de prendre la parole. « Monsieur le ministre, ici, ce n’est pas l’armée. Nous sommes dans une démocratie », a-t-il lancé à l’endroit de l’ancien Haut commandant de la Gendarmerie nationale (2019-2021) qui a réagi par un large sourire sous les applaudissements de certains participants. Seulement, cette atmosphère détendue n’a pas empêché les membres de l’Alliance pour la transparence des élections (ATEL) de quitter la salle, laissant ainsi le ministre de l’Intérieur poursuivre le programme avec les autres partis.
JEAN-BAPTISTE TINE, MINISTRE DE L’INTÉRIEUR
« Cette opposition n’est pas encore prête pour affronter les urnes »
Prenant la parole à la fin de cette rencontre, le ministre de l’Intérieur et de la Sécurité publique n’a pas manqué de déplorer cette décision des responsables de l’Alliance pour la Transparence des Élections (ATEL). « Je regrette qu’une partie d’un cadre politique ait choisi de quitter la réunion après avoir tenté, sans succès, de bloquer les travaux. Il est impossible d’entamer des discussions en imposant des conditions préalables, comme retirer des décrets et arrêtés avant même de dialoguer ». Poursuivant son argumentaire, le Général Jean-Baptiste Tine a estimé que « l’histoire prouve que le boycott n’a jamais été une stratégie politique constructive » et a invité « fraternellement Atel à rejoindre ce processus électoral avant qu’il ne soit trop tard ». « J’ai été chargé d’initier des concertations avec toutes les parties prenantes du processus électoral des législatives anticipées du 17 novembre 2024. Aujourd’hui, dans le cadre de cette initiative, nous avons accueilli 123 formations politiques ainsi que les principaux acteurs de la société civile. L’objectif est de construire des consensus solides afin d’assurer des élections transparentes, démocratiques et inclusives », a-t-il ajouté. Avant de lancer à l’endroit des responsables de Atel : « C’est dommage qu’ils soient partis. Cette opposition semble ne pas être prête en tant que formation politique à affronter les urnes. Je n’étais pas là aux dernières élections, j’ai l’impression qu’ils ne se sont pas encore réorganisés. Je les appelle à revenir à la table des discussions ».
MOUNDIAYE CISSE DE LA SOCIETE CIVILE
« Les revendications de l’opposition sont légitimes… »
S’exprimant sur cet incident survenu lors de cette rencontre, le Directeur exécutif de l’ONG 3D, Moundiaye Cissé, semble prendre faits et cause pour les membres de l’Alliance pour la Transparence des Élections (ATEL) en disant que leur « interpellation était légitime ». « Ceci est tout sauf des concertations ». Il faut que le ministère de l’Intérieur arrive à impliquer les acteurs. Déjà, c’est une bonne chose que tous les acteurs viennent répondre à son appel. Ce dialogue doit aboutir à des consensus forts. Il faut que le ministre sache que le processus, nous le connaissons déjà », a-t-il indiqué avant d’insister. « Le décret convoquant le collège électoral est problématique en ce sens qu’il s’arroge des dispositions législatives. L’État aurait dû poser une question plus ouverte sur les dispositions, par exemple concernant la loi organique liée à la répartition des sièges, des commissions, etc. » Pour sa part, l’expert électoral Ndiaye Sylla a fait savoir dans une publication partagée sur son profil facebook que « Le ministre de l’Intérieur, Ministre chargé des Élections, n’avait pas à verser dans la polémique politique. Il aurait dû préserver une supposée neutralité ! ».
NANDO CABRAL GOMIS
SUDQUOTIDIEN