Mouvement de protestation au Kenya, le gouvernement revient sur ses promesses fiscales
Pris en étau entre les revendications de la population et les exigences des bailleurs internationaux, le gouvernement kényan envisagerait de réintroduire des taxes qu’il avait promis de retirer pour calmer le mouvement de protestation qui a accompagné la présentation du projet de budget.
Manifestation contre le président kényan William Ruto à Nairobi, le 16 juillet 2024.© Tony Karumba/AFP
Le ministre kényan des Finances John Mbadi a annoncé que le gouvernement kényan envisage de réintroduire certaines taxes qu’il avait été contraint de retirer fin juin du projet de budget sous la pression d’un mouvement de contestation ayant dégénéré en manifestations meurtrières. Le gouvernement entendait mettre en place 49 mesures fiscales pour lever environ 150 milliards de shillings (1,2 milliard de dollars). John Mbadi a notamment évoqué la réintroduction de taxes environnementales, y compris sur les biens électroniques et les emballages en plastique, qui visent à réduire les déchets. « Si vous portez atteinte à l’environnement, vous devez payer pour contribuer à réparer le mal que vous avez causé », a déclaré le ministre des Finances, l’un des quatre membres de l’opposition qui ont fait leur entrée en juillet au sein d’un gouvernement remanié.
Défendre les plus modestes
Le président William Ruto, arrivé au pouvoir en 2022 sur la promesse de défendre les plus modestes, a dû retirer fin juin un impopulaire projet de budget, après des manifestations, initialement pacifiques, qui ont viré au chaos. Le 25 juin, la police a répliqué par des tirs à balles réelles face à des manifestants qui avaient pris d’assaut le Parlement. Selon des organisations de défense des droits humains, au moins 60 personnes ont été tuées et des dizaines d’autres sont portées disparues depuis le début de ce mouvement de protestation né au sein de la jeunesse. Les autorités assurent, elles, avoir agi uniquement face aux « criminels » ayant infiltré les manifestations.
Après avoir annoncé le retrait du projet de budget le 26 juin, le président kényan a annoncé une hausse des emprunts – d’environ 169 milliards de shillings (1,2 milliard d’euros) – ainsi qu’une baisse des dépenses de l’ordre de 177 milliards de shillings (1,3 milliard d’euros). Le budget 2024-25 prévoyait 4 000 milliards de shillings (29 milliards d’euros) de dépenses, un record, financé par des hausses de taxe d’abord sur le pain, puis sur les carburants dans une seconde version.
À la suite du retrait du projet de budget, les agences de notation Moody’s et Fitch avaient abaissé la note du Kenya. William Ruto est pris en étau entre des bailleurs internationaux qui le pressent de trouver des recettes pour rembourser une dette nationale culminant à 78 milliards de dollars, et la population dont un tiers vit sous le seuil de pauvreté.
(Avec AFP)