La Côte d’Ivoire de retour en force sur les marchés internationaux
Pari réussi pour la Côte d’Ivoire. Le pays a opéré un retour en force sur les marchés internationaux en levant près de 2,6 milliards de dollars via deux obligations d’échéances respectives de 9 et 13 ans. Concrètement, cela signifie qu’Abidjan paiera des intérêts annuels sur ces durées avant de rembourser les montants levés.
En tout cas, la performance est saluée par de nombreux experts et économistes après deux ans d’absence du pays sur le marché international des euro-obligations. « L’émission a suscité l’intérêt de plus de 400 investisseurs dans le cadre d’une opération record qui a généré un carnet de commandes dépassant les 8 milliards de dollars », a indiqué le gouvernement dans un communiqué, ce qui représente le niveau de commandes le plus élevé jamais enregistré par un État d’Afrique de l’Ouest.
Premier eurobond de l’ère post-Covid
Il faut souligner que, ces dernières années, l’accès au marché des euro-obligations s’est soudainement tari pour les États africains, notamment depuis que la Réserve fédérale américaine a commencé à augmenter de manière agressive les taux d’intérêt, en 2022, pour lutter contre une inflation élevée. La majorité des économies d’Afrique subsaharienne ont été durement touchées par les effets de la pandémie de Covid-19, puis les retombées de la guerre russe en Ukraine et la hausse des taux d’intérêt mondiaux. En conséquence, le coût de la dette en devises étrangères est devenu prohibitif.
« Cette transaction a été le témoin d’une mobilisation historique de la part des principaux investisseurs mondiaux, notamment des détenteurs existants d’obligations ivoiriennes et de nouveaux investisseurs de référence », a indiqué le ministère du Budget et des Finances dans le communiqué. Les fonds doivent servir à racheter et refinancer les euro-obligations existantes du pays, et des prêts bancaires internationaux. De quoi remobiliser de nombreux gouvernements africains qui espèrent revenir sur les marchés obligataires cette année afin de refinancer leurs dettes arrivant à échéance à des taux d’intérêt abordables et ainsi d’éviter d’avoir à puiser dans leurs réserves de change pour les rembourser. D’après l’agence américaine Moody’s, environ 5 milliards de dollars d’obligations souveraines africaines en devises étrangères arriveront à échéance cette année, et environ 6 milliards de dollars supplémentaires l’année prochaine.
Mais l’heure n’est pas à l’éclaircie alors que le continent doit composer avec un dollar en hausse, la chute de certaines monnaies locales et la baisse brutale des prêts chinois, autant d’éléments qui ne sont pas de nature à rassurer les investisseurs. 2023 a été la première année depuis 2009 et la crise financière mondiale sans émission de dette extérieure en Afrique subsaharienne.
La confiance du marché financier international
Au-delà de ces éléments, cette levée a une portée symbolique très forte pour le pays : elle confirme la confiance retrouvée du marché financier international dans la Côte d’Ivoire. Et pour cause, le pays dispose de nombreux atouts, à commencer par son économie. « Le gouvernement poursuivra la transformation structurelle de l’économie ivoirienne, l’accélération des investissements dans de nombreux secteurs, tels que le numérique et les transports, ainsi que l’exploitation des récentes découvertes pétrolières et gazières », avait déclaré le président Alassane Ouattara dans une allocution à la télévision d’État mi-janvier. La Côte d’Ivoire, premier producteur de cacao au monde, devrait être l’une des économies à la croissance la plus rapide de la région en 2024 ? la Banque mondiale prévoit un taux de croissance du PIB de 6,5 % en 2024 et 2025 contre moins de 4 % pour l’ensemble du continent. Après la pandémie de Covid-19, le pays avait très rapidement renoué avec une forte croissance. Aujourd’hui, il continue de jouer un rôle important en tant que pôle économique régional. « Grâce à la gestion proactive de sa dette publique, la Côte d’Ivoire apporte flexibilité et liquidités à l’ensemble de la région », a dit Adama Coulibaly, ministre des Finances et du Budget. Seul bémol, une dette qui atteint 57 % du PIB.