Pour réduire sa dépendance alimentaire : Le Sénégal veut plus de blé

Le blé made in Sénégal est devenu une réalité dans ce pays, au sortir d’une phase-test jugée satisfaisante. La moisson des champs d’expérimentation, entamée avec celle du domaine de l’Isra à Sangalkam, avant de se poursuivre à Bud Sénégal, augure d’un futur enchanteur dans la production locale de cette céréale dont les importations annuellement trustent les 700 mille tonnes. La mise à l’échelle de la production de blé, qui démarra pour un millier d’hectares au moins à partir de novembre 2022, va permettre au pays de réduire graduellement les importations.Par Alioune Badara NDIAYE – A la parcelle de démonstration de Bud Sénégal (Diam­niadio, à 50 km de Dakar) a démarré vendredi la moisson du blé semé trois mois plus tôt. Ceci, dans le cadre du programme-pilote de culture de cette céréale qu’expérimente l’Etat du Sénégal et que conduit l’Institut sénégalais de recherches agricoles (Isra). Ouvriers agricoles et techniciens sur place, malgré le temps ensoleillé en ce mois de Ramadan, ont savouré, au rythme du vrombissement de la moissonneuse, les résultats enchanteurs des premiers pas dans la production locale de blé. «C’est un succès éclatant au vu des prévisions qui avaient été faites et qui sans doute seront largement dépassées», a posé Matar Guèye, technicien à la Direction régionale du développement rural de Dakar et ayant été de l’aventure. «Dès l’épiaison, on a senti que l’on s’acheminait vers de bons résultats», a-t-il soutenu, se disant heureux d’avoir participé à cette expérience inédite dans la culture de blé.

Lequotidien – J

Le blé made in Sénégal est devenu une réalité dans ce pays, au sortir d’une phase-test jugée satisfaisante. La moisson des champs d’expérimentation, entamée avec celle du domaine de l’Isra à Sangalkam, avant de se poursuivre à Bud Sénégal, augure d’un futur enchanteur dans la production locale de cette céréale dont les importations annuellement trustent les 700 mille tonnes. La mise à l’échelle de la production de blé, qui démarra pour un millier d’hectares au moins à partir de novembre 2022, va permettre au pays de réduire graduellement les importations.
Par Alioune Badara NDIAYE – A la parcelle de démonstration de Bud Sénégal (Diam­niadio, à 50 km de Dakar) a démarré vendredi la moisson du blé semé trois mois plus tôt. Ceci, dans le cadre du programme-pilote de culture de cette céréale qu’expérimente l’Etat du Sénégal et que conduit l’Institut sénégalais de recherches agricoles (Isra). Ouvriers agricoles et techniciens sur place, malgré le temps ensoleillé en ce mois de Ramadan, ont savouré, au rythme du vrombissement de la moissonneuse, les résultats enchanteurs des premiers pas dans la production locale de blé. «C’est un succès éclatant au vu des prévisions qui avaient été faites et qui sans doute seront largement dépassées», a posé Matar Guèye, technicien à la Direction régionale du développement rural de Dakar et ayant été de l’aventure. «Dès l’épiaison, on a senti que l’on s’acheminait vers de bons résultats», a-t-il soutenu, se disant heureux d’avoir participé à cette expérience inédite dans la culture de blé.
Tests concluants
Cette phase-pilote a été menée avec quatre variétés de blé dont trois en provenance d’Egypte, a expliqué à Anadolu, Amadou Tidiane Sall, spécialiste à l’Isra. «Dans les champs d’expérimentation, on a eu trois fois 0.25 hectare avec les semences d’Egypte et également 0.25 hectare avec une variété locale homologuée par l’Isra ; ce qui fait 1 hectare par champ expérimental», a-t-il expliqué. Sall a indiqué que l’Isra a joué sur la variation des types de sols, des types d’irrigation et d’usage de fertilisants pour disposer d’indicateurs fiables au sortir de l’expérimentation. «Il faudra attendre la moisson au niveau de tous les champs pour une évaluation exhaustive, mais les résultats en­grangés jusque-là présagent d’un futur radieux pour la culture du blé au Sénégal», a-t-il toutefois précisé. En plus des périmètres de Bud Sénégal et de Sangalkam, les deux dans la région de Dakar, trois autres se trouvent dans la vallée du fleuve Sénégal, au Nord du pays. Selon Sall, l’intervalle novembre-mars, correspondant à la saison sèche fraîche, est le moment opportun pour cultiver le blé au Sénégal. Quelque dix jours avant le démarrage de la moisson à Bud Sénégal, Aly Ngouille Ndiaye, ministre de l’Agriculture, de l’équipement rural et de la souveraineté alimentaire (Maersa), s’était rendu dans les deux périmètres d’expérimentation pour constater de visu les premiers résultats.
«La preuve est là», s’était-il alors extasié après sa visite des lieux. «Ce que nous avons vu nous encourage, et cela montre qu’avec le type de sol que nous avons, nous pouvons faire du blé. J’ai le sentiment que nous aurons des rendements de loin supérieurs à ceux dans les fiches que nous avaient données nos partenaires égyptiens», avait poursuivi le Maersa. «Je me rappelle que lorsque je suis parti en Egypte (à la Cop 27) pour ramener le blé, il a fallu batailler pour convaincre les chercheurs. Je leur ai juste dit que j’allais ramener de la semence et qu’ils devaient en faire ce qui était possible», a-t-il rappelé.
Réduire considérablement les importations
«De bonnes perspectives se présentent pour la production de blé au Sénégal, (…) Les résultats satisfaisants obtenus permettent déjà d’envisager une production de semences de blé en quantité et en qualité, et une mise à l’échelle à partir de novembre prochain», a ainsi dégagé en perspective Aly Ngouille Ndiaye. La volonté de produire du blé local a été déclenchée par les tensions notées sur cette céréale après l’éclatement de la guerre entre la Russie et l’Ukraine. Elle cadre aussi parfaitement avec la stratégie de souveraineté alimentaire qu’a déclinée le Président Macky Sall lors du Conseil ministériel du 6 janvier 2023. «Dans le cadre de la stratégie, le blé a été retenu parmi les céréales à développer», a ainsi assuré Ndiaye. «Le pays a la capacité d’économiser des milliards de francs à travers ce programme qui va fortement réduire les importations de blé», a indiqué Momar Talla Seck, directeur de l’Isra. D’après des chiffres officiels de l’Agence nationale de la statistique et de la démographie (Ansd), le pays importe annuellement 700 mille tonnes de blé pour une valeur de 110.4 milliards francs Cfa (183 millions Usd). «Il ne s’agira pas de revendiquer une autosuffisance en blé, mais de produire pour graduellement ré­duire les importations. L’ob­jec­­tif de la stratégie de souveraineté alimentaire, c’est de produire ce que nous consommons et de consommer ce que nous produisons», a fait savoir le Maersa. «Notre défi pour le blé, c’est de réduire de moitié les importations dans quel­ques années», a-t-il en­chaîné.
Beaucoup de gens étaient sceptiques, mais il est bien possible de cultiver du blé au Sénégal et cette expérimentation l’a conforté, a laissé entendre Sall. «L’Isra a homologué huit variétés de blé et avec les semences obtenues dans le cadre de cette phase-pilote, une production d’échelle va suivre à partir de novembre 2024», a-t-il dit. Pour le ministre, il sera question d’emblaver au moins 1000 hectares pour le démarrage effectif de la culture de cette céréale. «Nous pensons déjà commencer avec 1000 hectares, mais des partenaires privés nous disent qu’il faut aller vers 5000 hectares pour la culture d’échelle qui démarre en novembre 2024», a-t-il noté.
Substitution du blé par les céréales locales, un autre pas
L’Association des meuniers du Sénégal (Amis) est déjà enchantée par les perspectives enchanteresses brandies par le ministre et l’Isra. Et, dans sa volonté de participer au combat pour la réduction des importations de blé, elle ne manque pas de propositions.
«C’est un sentiment de fierté que d’entendre les responsables de l’Isra décliner ses résultats dans la culture du blé», a indiqué Claude Demba Diop, président de l’Amis. «Il y a certains qui proposent d’introduire le mil, le maïs ou d’autres céréales cultivées dans le pays pour la fabrication du pain, pour réduire les quantités de blé importées. C’est une très belle idée et certains l’ont commencé dans certaines boulangeries», a-t-il posé. Le seul bémol, selon lui, c’est qu’au-delà de 15% de substitution, la qualité du pain sera altérée. «N’em­pêche, c’est déjà quelque chose», a-t-il estimé, appelant les professionnels de la nutrition et de la diététique à s’y pencher davantage.
Une voie déjà sillonnée par l’Institut de technologie alimentaire, à en croire le nutritionniste Abdoulaye Cissé. «L’Institut de technologie alimentaire a obtenu des résultats significatifs sur la combinaison du blé et d’autres céréales locales telles que le mil ou le maïs, avec un taux d’incorporation jusqu’à 15% pour fabriquer du pain de qualité du point de vue nutritionnel et gustatif», a-t-il indiqué.
Une nouvelle ère s’ouvre pour le pays qui ambitionne de devenir un grenier local au service de ses 17 millions d’habitants, à travers une stratégie de souveraineté alimentaire décrétée cette année pour un coût total de 5000 milliards francs en investissement.

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