BIDC – Après la trahison de ses pairs : Macky rouge de colère
Victime d’un système de jeu dont les règles changent au gré des circonstances, le Sénégal ne compte pas pour autant subir tranquillement la loi du plus fort. Au cours d’un échange, le Président Macky Sall a fait comprendre que le pays de la Teranga avait des leviers pour rendre la banque ingouvernable, jusqu’à ce que s’amorce un changement institutionnel qui permettra de clarifier les choses.
Par Mohamed GUEYE – Après avoir pris acte de la «trahison» de ses pairs, le Sénégal n’entend pas en rester là. Interrogé sur la question par Le Quotidien, le Président Macky Sall a été on ne peut plus clair : «Puisque le Ghana, le Nigeria et la Côte d’Ivoire ont voulu jouer sur le poids de leur pourcentage de vote dans le capital pour revenir sur un accord signé en bonne et due forme par tous les chefs d’Etats membres de la Cedeao, la banque va avoir un sérieux problème de gouvernance, puisque le Sénégal ne compte pas se laisser faire.» Le Président Sall ajoutera que puisque les gens pensent revenir impunément sur leurs engagements écrits, le pays de la Teranga va aussi jouer sur les textes pour contester toutes les décisions qui seront prises par la nouvelle direction. Cette stratégie a été décidée en haut lieu, quand les dirigeants sénégalais ont compris qu’ils ne pouvaient pas facilement prendre de décision plus radicale.
«Nous avions songé très sérieusement à nous retirer de la Bidc, en signe de protestation, mais il nous a été fait comprendre que le Sénégal ne pouvait pas se retirer aussi facilement d’une institution de la Communauté économique.
Mais l’idée aujourd’hui est de faire en sorte que s’impose ce qui a été adopté pour d’autres institutions, à savoir que la présidence de la Banque d’investissement et de développement de la Cedeao (Bidc) revienne à un pays, que ce soit le Ghana ou un autre.» Macky Sall va rappeler que c’est ce système qui est en cours pour la Bceao dont le gouverneur est toujours un Ivoirien, ou l’Uemoa, «que le Sénégal a fini par récupérer alors que le Président Wade l’avait laissé tomber pour des raisons politiciennes».
Ou la Boad, accaparée depuis par le Bénin, par exemple.
De cette manière, les choses seront claires pour tous.
Faisant l’historique du conflit qui secoue actuellement la Bidc, Macky Sall rappelle que c’est en 2020, alors que le Sénégalais Abdoulaye Fall avait remporté l’appel à candidature lancé pour le poste de président de la Bidc, que le sortant Agyekum Donkor dont le mandat était arrivé à terme, avait souhaité être reconduit pour un nouveau bail de 5 ans, auquel il n’avait plus droit.
«Le Sénégal a protesté, mais le Ghana a reçu le concours du Nigeria. A eux deux, ces pays représentent environ 80% des quotes-parts, donc autant de voix en cas de vote. Nous avons dû nous soumettre, mais nous avons fait passer un accord, signé par tous les chefs d’Etats membres, et qui disait qu’en 2024, à la fin de ce second mandat illégitime, le Ghanéen devait céder sa place à un candidat sénégalais. Or, c’est cet accord que le Conseil d’administration de la Bidc vient de rejeter, en disant que le seul critère d’élection à la banque a toujours été le droit de vote.» Mis en minorité, le Sénégal s’est vite rendu compte que, avec le lâchage de la Côte d’Ivoire, et malgré le soutien de pays comme le Togo ou d’autres, ses 8% n’allaient pas l’aider à inverser la tendance.
Il est donc acquis qu’à l’issue de la prochaine élection à la Bidc, le Ghanéen Donkor sera réélu. Maintenant, le défi pour le Sénégal est de rendre les institutions ingouvernables, jusqu’à ce que soient modifiées les règles du jeu.
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