3000 ELEVES SERVIS AU QUOTIDIEN- La cuisine scolaire centrale de Rufisque, un modèle de réussite malgré les difficultés (3/6)

Nichée au cœur du lycée moderne de Rufisque, la cuisine scolaire centrale de Rufisque permet à 3.000 élèves du département éponyme de se restaurer quotidiennement.

Il est 12 heures au lycée moderne de Rufisque. Le soleil au zénith, mais la chaleur n’est pas agressive.  La cloche retentit. C’est parti pour une heure de pause. Une horde d’élèves envahit la cuisine centrale de l’école. De la seconde à la terminale, une centaine d’élèves se croisent ici à l’heure de la pause. L’endroit est animé. On discute par ci, on rigole par là. Une effervescence palpable règne parmi les apprenants. Ils sont tous là pour une seule chose : manger à leur faim. Une longue file indienne d’élèves est formée devant la cuisine. Des marmites posées sur des fourneaux à gaz, sont alignées. L’odeur du menu du jour, riz à la viande, s’empare de l’air, chatouillant les narines. Les cuisinières, expertes en leur art, servent les plats avec soin. Ici, le plat est vendu à 500 FCfa. Pour se le procurer, les potaches se regroupent par cinq et cotisent chacun 100 FCfa.  Une fois leurs parts récupérées, les élèves se précipitent vers la cour pour s’installer sur les nattes étalées çà et là.

Le corps frêle, la tête négligemment voilée par un foulard rose-fuchsia, Ramata, élève en classe de terminale scientifique, a déjà fini de prendre son repas. Toute souriante, elle s’est bien régalée. « La cantine est trop cool. On aime bien les mets qu’on y prépare. Ils sont succulents », apprécie-t-elle, tout en soutenant que celle-ci a un impact positif sur les élèves car, dit-elle : « le fait de bien manger nous permet de nous concentrer en classe ». Son point de vue est partagé par sa camarade Ndèye Bousso Diop, qui souligne que les repas servis au quotidien sont « sains et bien contrôlés ». De plus, ajoute-t-elle : « le plat ne coûte quasiment rien. Un plat de riz à 500 FCfa ou un gobelet de bouillie à 50 FCfa est une aubaine pour nous ».

Assis sur une natte étendue non loin de la cuisine, Amadou Fall, Fallou Mbaye, Ousmane Ndiaye et Pape Malick, tous élèves de première, discutent à haute voix. Ils guettent avec impatience l’arrivée de leur camarade Saliou, qui doit leur apporter le tant attendu plat de riz. Quelques minutes plus tard, ce dernier arrive en souriant. Il porte fièrement le bol de riz avec un air de sauveur. « La cantine nous est bénéfique à plusieurs égards. Elle nous permet de nous nourrir et de rester à l’école. Elle constitue même une sécurité pour les élèves », expliquent-t-ils avant de souligner également qu’elle renforce les liens de solidarité et d’amitié.

Insuffisance du budget

Mamoune Owens Ndiaye est le gérant de la cuisine centrale. Son bureau a été transformé en dépôt de provisions. Ici, des sacs de riz sont entassés, tandis que des paquets de mil et de semoule de maïs s’accumulent sur une étagère. Le sol est couvert de paquets de sucre et de bouteilles d’huile. Des bols et des plats sont regroupés dans un coin. C’est un véritable capharnaüm. « Ce bureau ressemble plus à une boutique d’alimentation générale », ironise-t-il, nous cédant courtoisement sa chaise métallique avant de s’installer sur une bouteille d’huile de 20 litres.

Il explique que la cuisine centrale, initiative du Conseil départemental de Rufisque avec ses partenaires, le Groupe de de recherche et de réalisations pour le développement rural (Grdr) et Cicodev Africa, a été installée au lycée moderne depuis 3 ans maintenant. Pour le petit déjeuner, les élèves ont droit à de la bouillie de maïs ou de mil moyennant 50 FCfa le gobelet. Concernant le déjeuner c’est soit du riz au poison ou à la viande (rouge ou blanc), Yassa poisson ou Yassa poulet. Il précise que la cantine n’est pas uniquement pour le lycée moderne de Rufisque. Elle est réservée à dix écoles (primaires, collèges et lycées) qui sont toutes dans le département de Rufisque et sélectionnées suivant des critères. Il s’agit entre autres, du lycée moderne de Rufisque, du lycée Camp Marchand, du lycée Abdoulaye Sadji, du lycée de Diamniadio, du Cem de Sangalkam. « Deux marmites de riz de 17 kilos sont attribuées à chaque école. Les repas sont préparés ici avant d’être acheminés dans les autres écoles. Grâce à cette cantine, au minimum 3.000 élèves parviennent à se restaurer chaque jour », a-t-il expliqué. Selon M. Ndiaye, la cantine a pour vocation de diminuer le taux de décrochage scolaire. Elle permet, ajoute-t-il, aux élèves d’avoir une alimentation saine, équilibrée et variée. « Nous n’utilisons pas de bouillons cubes dans nos préparations et nous ne cuisinons que du riz de la vallée. Ainsi, les enfants ne consomment que des produits locaux », précise-t-il. D’après lui, toutes les femmes qui préparent les plats ont reçu une formation en hygiène, en propreté et en techniques de cuisson. Elles savent comment doser les ingrédients pour les menus et mesurer la quantité d’huile à utiliser. Un défi majeur persiste : le manque de moyens financiers. « Notre budget est insuffisant, et les contributions de nos partenaires ne suffisent pas à garantir la qualité des repas que nous souhaitons offrir. Nous dépensons un million de FCfa par semaine, du lundi au vendredi, une somme que nous ne sommes pas toujours en mesure de réunir. Ces difficultés financières entraînent malheureusement des ruptures d’approvisionnement», déplore-t-il, avant d’insister sur l’urgence d’un soutien étatique.

Aliou DIOUF – LESOLEIL

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