L’hostilité grandissante de l’administration Trump: “Je partage ton aversion à aider gratuitement les Européens. C’est PATHÉTIQUE”
Plusieurs figures clés de l’administration Trump se retrouvent en mauvaise posture, après que le rédacteur en chef du magazine The Atlantic a été accidentellement ajouté à un groupe secret sur la messagerie Signal. Il a pu assister à toute une discussion sur les frappes contre les Houthis au Yémen. Ignorant totalement sa présence, le vice-président JD Vance et le secrétaire à la Défense Pete Hegseth n’ont pas bridé leur hostilité envers l’Europe. Voici le déroulé d’une petite erreur qui pourrait changer le monde.
KVDS, MB – Source: HLN, CNN
Mardi 11 mars 2025. Jeffrey Goldberg, rédacteur en chef de The Atlantic, reçoit sur l’application de messagerie Signal une demande de connexion d’un utilisateur se présentant comme Michael Waltz, le conseiller à la sécurité nationale du président Trump. Espérant qu’il s’agit du véritable Michael Waltz et qu’il pourra obtenir une interview, Goldberg accepte la demande. Ensuite, plus rien, pendant deux jours.
Jeudi 13 mars 2025 – 16h28. Goldberg reçoit une notification l’informant qu’il a été ajouté à un groupe de discussion Signal nommé “Houthi PC small group”. Michael Waltz y publie un message indiquant qu’un groupe de hauts responsables a été constitué “pour coordonner les actions contre les Houthis, en particulier pour les prochaines 72 heures”. Il ajoute: “Merci de nous envoyer le point de contact (POC) de votre équipe avec qui nous pourrons assurer la meilleure coordination dans les jours et le week-end à venir. Merci.”
18 personnes
Il semble y avoir dix-huit personnes dans le groupe, dont “MAR” (vraisemblablement le secrétaire d’État américain Marco Antonio Rubio), “JD Vance” (le vice-président), “TG” (probablement Tulsi Gabbard, la directrice du renseignement national), “Scott B” (le secrétaire au Trésor Scott Bessent), “Pete Hegseth” (le secrétaire à la Défense), “John Ratcliffe” (le directeur de la CIA), “Steve Witkoff” (le secrétaire spécial du président pour le Moyen-Orient et l’Ukraine) et “Susie Wiles” (la cheffe de cabinet de la Maison Blanche). Jeffrey Goldberg lui-même est répertorié sous ses initiales “JG”.
JD Vance critique envers Trump
Le lendemain, à 8h05, Michael Waltz publie un message indiquant que tout le monde devrait avoir reçu un document détaillant les tâches assignées par le président via un système de communication sécurisé. Une liste a également été établie “pour informer les alliés et partenaires régionaux” et pour préciser “un ordre des événements plus détaillé pour les jours à venir”.
S’ensuit une discussion intéressante au sein du groupe. Bien que JD Vance ne critique presque jamais Donald Trump en public, dans cette discussion il s’oppose frontalement au président. “Je pense que nous faisons une erreur”, écrit-il dans la conversation. “3% de notre commerce passe par le canal de Suez, contre 40% pour l’Europe. Il existe un réel risque que le public ne comprenne pas ou ne voie pas la nécessité de cette action. […] Je ne suis pas sûr que le président se rende compte à quel point cela est incompatible avec son message actuel sur l’Europe.”
Aider les Européens: “pathétique”
Vance propose alors de reporter l’opération d’un mois “pour mieux travailler sur la communication concernant son importance, analyser l’état de l’économie, etc.” Mais Pete Hegseth s’y oppose fermement, affirmant que ce délai “ne changera rien” et plaidant pour une action immédiate. Il répond toutefois à Vance qu’il comprend son point de vue: “Je partage ton aversion à aider gratuitement les Européens. C’est PATHÉTIQUE”.
Waltz intervient en soulignant que “la marine européenne a des capacités limitées” et que “seuls les États-Unis sont en mesure de rouvrir ces routes maritimes”. Finalement, Vance finit par céder, tout en exprimant une dernière fois le fond de sa pensée: “Je déteste tout simplement venir en aide à l’Europe une fois de plus.”
Le lendemain, samedi 15 mars, 11h44. Hegseth publie une mise à jour sur la situation. Selon Jeffrey Goldberg, il partage alors “des détails opérationnels” sur les frappes imminentes au Yémen, y compris “des informations sur les cibles, les armes que les États-Unis comptent utiliser et le planning des attaques”.
Le seul à réagir est Vance, qui écrit : “Je prierai pour la victoire.”
Des explosions au Yémen
D’après le planning publié par Pete Hegseth, les premières frappes au Yémen doivent survenir deux heures plus tard. Et c’est exactement ce qui se produit.
À 13h48, un nouveau message de Michael Waltz tombe dans le groupe Signal. Il qualifie l’opération de “travail remarquable”, un avis partagé par John Ratcliffe : “Un bon début.”
Les autres suivent: même Susie Wiles, la cheffe de cabinet de la Maison-Blanche – souvent qualifiée de “seule adulte dans la pièce” – fait part de son enthousiasme. “Félicitations à tous – en particulier à ceux sur le terrain et à CENTCOM (le Commandement central des forces armées américaines)! Vraiment impressionnant. Que Dieu vous bénisse.”
Plus tard, une réunion de débriefing est organisée pour évaluer les dégâts causés. Le ministère de la Santé du Yémen, contrôlé par les Houthis, rapportera ensuite qu’au moins 53 personnes ont été tuées dans les attaques, un chiffre qui n’a pas pu être vérifié de manière indépendante.
Un échange authentique
D’après Jeffrey Goldberg, rédacteur en chef de The Atlantic, cette conversation Signal était “vraisemblablement authentique”, ce que le porte-parole du Conseil national de sécurité, Brian Hughes, a confirmé depuis.
Depuis le début de la guerre à Gaza, il y a deux ans, les Houthis ont lancé une campagne de frappe et de détournement contre les cargos qui transitent en mer Rouge et dans le golfe d’Aden. Les rebelles chiites présentent ces actions comme un soutien à la lutte des Palestiniens. Ces attaques ont perturbé la sécurité maritime et les routes commerciales internationales, entraînant le déployement de plusieurs navires de guerre occidentaux, ainsi que des frappes de représailles de la part des États-Unis et du Royaume-Uni.