Pourquoi le prix du gaz américain fâche les Européens

Les États-Unis profitent-ils de la guerre russe en Ukraine sur le dos des Européens ? C’est le soupçon exprimé par des responsables politiques du vieux continent. Ils sont très remontés contre le prix du gaz américain.

Le gaz américain est bon marché mais le GNL, gaz naturel liquéfié, a un prix exorbitant quand il arrive en Europe. Or, les Vingt-Sept en ont le plus grand besoin pour compenser partiellement les achats effectués auparavant auprès de la Russie. Une fois extrait du sol, le gaz américain coûte environ 6 dollars l’unité (MBtu). Il faut ensuite le liquéfier, le transporter et le vendre en Europe.

Une fois toutes ces opérations effectuées, son prix atteint alors les 37 dollars. Un prix astronomique, se plaint Robert Habeck, le ministre allemand de l’Économie, sur la même longueur d’onde que son homologue français Bruno Le Maire. Le président Macron, actuellement en visite à Washington, a sans doute abordé le sujet avec Joe Biden dans l’espoir de trouver un terrain d’entente car lui aussi trouve que ce prix n’est pas un prix d’ami.

Les Américains mettent en cause le manque de gaz russe

Ils réfutent un prix imposé des États-Unis. En creux, ils soulignent que les Européens ont été bien imprudents de se reposer sur le gaz bon marché fourni par Gazprom. Ils auraient pu diversifier leur approvisionnement et élargir leur production électrique à d’autres énergies comme l’atome. Un caillou dans le jardin allemand, qui a renoncé au nucléaire.

Cette bisbille sur le prix du GNL exprime surtout la nervosité grandissante des Européens. Ils sont en pleine crise de l’énergie tandis que les États-Unis sont au contraire en position de force sur ce terrain. Le premier producteur mondial de pétrole est autosuffisant pour ses besoins en or noir et il exporte une partie de son gaz. Les montants ont doublé cette année, faisant des États-Unis le premier pays exportateur de GNL alors qu’ils n’étaient que le troisième l’an dernier, derrière l’Australie et le Qatar.

Une énergie abondante et bon marché sur le sol américain

C’est particulièrement vrai pour le gaz dont le prix est fixé sur un marché continental, contrairement au pétrole. Aux États-Unis, il est actuellement quatre fois moins cher qu’en Europe grâce au schiste exploité à outrance. Un avantage compétitif déterminant pour les activités gourmandes en énergie. À tel point que les groupes européens préfèrent dorénavant investir dans de nouvelles usines… américaines !

C’est ce que vient de décider le chimiste Solvay. Le suédois Northvolt, qui s’apprêtait à construire une giga-factory de batterie en Allemagne, pourrait finalement choisir une localisation outre-Atlantique. D’autant plus qu’avec l’Inflation Reduction Act (IRA), le programme américain de lutte contre l’inflation présenté cet été, tous les projets en rapport avec la transition énergétique bénéficieront à partir de janvier de copieuses subventions.

Éreintée par la crise énergétique qui a déjà contraint une partie de l’industrie à réduire la voiture, l’Europe redoute une désindustrialisation de masse. Le président Macron a tenté de sensibiliser les parlementaires américains aux préoccupations des Vingt-Sept, déplorant l’agressivité de ce plan anti-inflation à l’égard des Européens.

Quelles sont les pistes pour empêcher ce déclin ?

L’Europe pourrait s’inspirer du modèle américain avec un Buy European Act privilégiant les entreprises du cru. L’idée a déjà été avancée par la France et les grands patrons y sont favorables, mais pas l’Allemagne. Elle redoute les mesures de rétorsion qui pénaliseraient ses exportations. Pourtant, outre-Rhin le sujet est brûlant. 20% des entreprises du Mittelstand, ces PME solides qui constituent la base de l’économie allemande, disent rêver d’investir ailleurs, dans un pays où l’énergie est moins chère et l’État plus généreux en subventions. Il s’agit bien sûr des États-Unis.

SOURCE RFI

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