Législatives en Israël : qui sont les alliés d’extrême droite de Benyamin Nétanyahou, possibles faiseurs de rois du prochain gouvernement ?

Le Parti sioniste religieux est arrivé en troisième position des élections, mardi, selon des résultats provisoires.

FRANCEINFO

S’il revient au pouvoir, ce sera en partie grâce à eux. L’ancien Premier ministre israélien, Benyamin Nétanyahou, s’est dit « près d’une grande victoire », mercredi 2 novembre, après l’annonce des premiers résultats des élections législatives, marqués par la percée d’une formation d’extrême droite. Le chef du Likoud a vu ses alliés de la liste Sionisme religieux (ou Parti sioniste religieux) arriver en troisième position, avec 14 sièges, doublant leur précédent nombre d’élus, après le dépouillement de 87% des bulletins. Emmené par Bezalel Smotrich, le Parti sioniste religieux est également incarné par Itamar Ben Gvir, chef du parti anti-arabe Force juive, qui a fait campagne sous cette bannière commune. « Israël est sur le point d’entamer une révolution de droite, religieuse et autoritaire », redoute le grand quotidien de gauche Haaretz.

Franceinfo vous présente les deux hommes qui détiennent peut-être les clés du prochain gouvernement israélien.

Itamar Ben Gvir, l’agitateur

Longtemps cantonné au rôle de trublion infréquentable de l’extrême droite, Itamar Ben Gvir est devenu une figure incontournable de la politique en Israël. Sa ligne idéologique est inspirée d’un des rabbins les plus radicaux de l’histoire, Meïr Kahane, fondateur d’une formation suprémaciste juive bannie du pays pour « terrorisme » après un attentat en 1994. Itamar Ben Gvir est lui-même connu, depuis son adolescence, pour avoir été inculpé des dizaines de fois pour incitation à la haine ou pour des violences et se vante d’avoir été innocenté dans 46 cas sur 53.

En 1995, dans un climat tendu après les accords d’Oslo conclus entre Israël et les Palestiniens, il s’était fait remarquer en arrachant le symbole Cadillac de la voiture du Premier ministre Yitzhak Rabin. « On est arrivé jusqu’à ce symbole. On arrivera jusqu’à lui », avait alors lancé le jeune homme. Quelques semaines plus tard, le dirigeant israélien était assassiné par un autre militant d’extrême droite.

Après des années de militantisme, Itamar Ben Gvir, avocat de formation, est devenu député en avril 2021. Soucieux de se rendre plus respectable, le leader du parti Force juive (Otzma Yehudit) a assuré, quelques mois plus tard, avoir « changé » depuis ses débuts.

« Je disais il y a vingt ans qu’il fallait expulser tous les Arabes, je ne le pense plus, mais je ne vais pas m’excuser. »Itamar Ben Gvir, leader de Force juive

à l’AFP

Itamar Ben Gvir prône quand même l’expulsion vers des pays voisins d’une partie des Arabes d’Israël, en ciblant « ceux qui agissent pour saper l’existence » de l’Etat hébreu. Il affirme n’avoir « pas de problème » avec la population arabe « loyale » à l’Etat d’Israël. Installé dans une colonie parmi les plus radicales de Cisjordanie occupée, il défend aussi l’annexion de ce territoire, où vivent 2,9 millions de Palestiniens et 475 000 colons israéliens. A 46 ans, ce père de six enfants est également connu pour ses positions LGBTphobes.

Itamar Ben Gvir salue ses partisans, le 2 novembre 2022, à Jérusalem, après les législatives en Israël. (MATAN GOLAN/SIPA USA/SIPA)
Itamar Ben Gvir salue ses partisans, le 2 novembre 2022, à Jérusalem, après les législatives en Israël. (MATAN GOLAN/SIPA USA/SIPA)

Quel pourrait être son rôle dans le futur gouvernement ? Itamar Ben Gvir a fait savoir mardi qu’il briguait le ministère clé de la Sécurité intérieure, ce que Benyamin Nétanyahou n’a pas exclu. « C’est un paradoxe quand on sait qu’il n’a pas effectué son service militaire, l’armée le considérant comme trop radical », souligne Frédérique Schillo, historienne spécialiste d’Israël, dans La Croix. Cette figure montante n’a jamais caché son goût pour les armes – il avait récemment brandi un pistolet lors de heurts à Jérusalem-Est. Une telle nomination pourrait donner lieu à un tour de vis sécuritaire, Itamar Ben Gvir déplorant qu’Israël fasse jusqu’ici un usage trop limité de la force face aux Palestiniens.

Bezalel Smotrich, le chef de file radical

Plus discret et pacifiste que son colistier, Bezalel Smotrich est le président du Parti sioniste religieux (HaTzionut HaDatit), nouveau nom, depuis 2021, du parti Résurrection (Tkuma). Ce fils de rabbin a fréquenté l’une des écoles talmudiques les plus prestigieuses de Jérusalem. Dans un Etat qui compte 20% d’habitants arabes, il défend une vision radicale d’Israël. Ce colon affirmé considère le pays comme une terre juive pour les juifs, qui devrait être davantage régie par la Torah, et s’oppose à la solution à deux Etats que Benyamin Nétanyahou a soutenu par le passé.

Lui aussi avocat, Bezalel Smotrich s’est frotté à la vie militante et politique lors de manifestations pour « défendre la présence juive » dans les territoires palestiniens, comme le relevait Libération en 2017. L’une de ses mobilisations lui a valu une arrestation, en 2005, en marge d’incidents contre le démantèlement des colonies de Gaza, projet porté à l’époque par le Premier ministre Ariel Sharon.

Elu député en 2015, Bezalel Smotrich s’est fait remarquer à la Knesset comme l’un des élus les plus pauvres et les plus studieux du Parlement, ne voyant ses enfants que pour Shabbat, selon un récent article de Libération. A la même période, ce père de sept enfants s’est dit « fier d’être homophobe » et ne cache pas son racisme. Il s’est notamment indigné que son épouse ait eu à croiser des femmes arabes à l’hôpital après un accouchement. Entre 2019 et 2020, il a été promu au poste de ministre des Transports dans le gouvernement de Benyamin Nétanyahou.

Betzalel Smotrich est évacué de la Knesset, le 13 juin 2021, à Jérusalem, après avoir perturbé un discours du futur Premier ministre Naftali Bennett. (ARIEL SCHALIT/AP/SIPA)
Betzalel Smotrich est évacué de la Knesset, le 13 juin 2021, à Jérusalem, après avoir perturbé un discours du futur Premier ministre Naftali Bennett. (ARIEL SCHALIT/AP/SIPA)

L’un de ses chevaux de bataille est désormais la réforme du système judiciaire israélien, qu’il veut soumettre davantage à ses aspirations politico-religieuses, notamment par la nomination gouvernementale des juges de la Cour suprême et par la restriction de la possibilité de censurer des lois votées à la Knesset. Certaines poursuites contre des parlementaires seraient rendues impossibles, ce qui pourrait mettre fin au procès visant Benyamin Nétanyahou, relève Le Monde.

La garantie d’une telle réforme a été présentée comme un préalable nécessaire à toute alliance avec le parti de Benyamin Nétanyahou à l’issue des législatives, rapporte The Times of Israël. Le Parti sioniste religieux a fait savoir qu’il réclamerait le ministère de la Justice en cas d’accord de coalition. Son chef, Bezalel Smotrich, viserait, lui, le poste de la Défense, selon Le Monde.

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