Ecole de formation par excellence de la haute administration : L’ENA est-elle devenue une fabrique de techno-politiciens ?

L’École nationale d’Administration (EnA) est un fleuron, pour avoir formé plusieurs générations de hauts commis de l’État. Mais depuis des années, force est de constater que les hauts fonctionnaires sortis de cette école, ne se contentent plus d’être des soldats du service public.

Entre le Premier ministre Amadou Bâ, l’opposant historique Ousmane Sonko, le directeur de la CDC Mame Boye Diao, le président du CESE Abdoulaye Daouda Diallo ou encore des personnalités politiques comme le président du groupe parlementaire de YAW, Birame Soulèye Diop ou Bassirou Diomaye Faye, les énarques semblent se muer en tecno-politiciens qui lorgnent la magistrature suprême.

Héritière d’une tradition d’excellence dans la formation professionnelle des hauts cadres nationaux et africains de l’Administration qui remonte à l’École fédérale d’Administration du Mali, l’ENA est devenue un établissement public à caractère administratif en octobre 2011. Ayant subi des mutations au fil des années, l’école Nationale d’Administration du Sénégal est évidemment le fruit d’une très longue histoire. Ses origines sont à chercher en effet dans l’histoire coloniale du Sénégal, de la France et de l’Afrique Occidentale française (AOF).

Elle est nommée École nationale d’Administration et de magistrature (ENAM) de 1975 à 1995. Comptant deux cycles de formation, l’ENA forme, entre autres, les administrateurs civils, les inspecteurs du Trésor, les inspecteurs des Impôts et des Domaines, les conseillers des Affaires étrangères, les inspecteurs des Douanes et les inspecteurs du Travail et de la Sécurité sociale. En somme, la crème de l’administration. Mais depuis quelques années, on note l’avènement d’une génération qui ne se contente plus de mener à bien les hautes missions de service public, mais dispute aussi le champ politique avec les autres acteurs de la vie publique. Et l’avènement du régime de Macky Sall a accentué cette ruée des hauts fonctionnaires vers la politique.

Pratiquement, ce sont eux, surtout les inspecteurs des Impôts, qui alimentent la vie publique depuis lors. D’abord au sein de la mouvance présidentielle, le Président Sall a mis sur orbite plusieurs d’entre eux, au rang desquels l’ex-ministre Mouhamadou Makhtar Cissé. Formé à l’ENAM et sorti avec le brevet de l’Inspecteur des Douanes, l’ancien directeur des Douanes et ex ministre du Budget, ce dernier est manifestement une tête bien faite, eu égard à son parcours académique et professionnel. Mais l’Inspecteur général d’Etat a été aussi Directeur de Cabinet du Président Macky Sall qu’il a soutenu, surtout à Dagana, lors des dernières joutes électorales. Écarté du gouvernement depuis 2019, beaucoup analystes ont fait savoir que c’est parce qu’il nourrissait une ambition présidentielle. Discret depuis lors, l’ancien enfant de troupe n’a pas dit son dernier mot. D’autant que sur les réseaux sociaux, certains de ses souteneurs mettent des affiches qui laissent entrevoir que ce brillant cadre sera de la partie en 2024.

Dans cette galaxie des énarques du pouvoir, figure aussi l’actuel président du Conseil Économique Social et Environnemental, Abdoulaye Daouda Diallo. Si le choix porté sur le Premier ministre Amadou Bâ est une pilule difficile à avaler pour ADD, c’est parce que l’inspecteur des Impôts a soutenu politiquement le chef de l’État durant sa longue traversée du désert, après son divorce avec le Président Abdoulaye Wade. L’ancien ministre des Finances ne peut, en effet, comprendre que son ancien patron qui a rejoint la «Cause» de l’APR tardivement et presque avec sinécure, puisse être la personne qui va stopper son ambition de devenir président de la République. Muet depuis l’annonce du choix du candidat de BBY, Abdoulaye Daouda Diallo se fera certainement entendre dans les jours à venir. Il y a aussi le directeur de la CDC, Mame Boye Diao.

Un Président énarque en 2024 ?

Mais la tâche ne sera pas de tout repos pour le fûté chef du gouvernement, qui a toujours caché avec résilience son jeu. En effet, l’idéologie du Pastef a fortement pénétré la haute administration. Et si les chances de Sonko s’amenuisent de jouer en jour, malgré l’enthousiasme encore grandissant de ses militants, il aura un rôle prépondérant à jouer en 2024. Et parmi ses potentiels remplaçants se trouvent des inspecteurs des Impôts très connus comme Bassirou Diomaye Faye et Birame Soulèye Diop, tous membres fondateurs du PASTEF.

Sans oublier les potentiels souteneurs de Mame Boye Diao et d’ADD,, si ces derniers devaient se présenter. Mais dans tous les cas les hauts fonctionnaires seront bien  »trempés » dans l’élection de 2024. L’ENAM jusque-là a produit des ministres, quatre Premiers ministres (Moustapha Niasse, Mame Madior Boye, Mamadou Lamine Loum, Amadou Bâ), des députés, directeurs généraux et présidents d’institutions (Moustapha Niasse, Abdoulaye Daouda Diallo). Peut-être qu’en 2024, on va se retrouver avec un premier énarque.

Source – L’As

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