Présidentielle 2024: Portrait-robot du probable candidat de Macky Sall
Face au choc des candidatures dans la mouvance présidentielle, quel est le meilleur profil pour maintenir le flambeau ? La question est sur toutes les lèvres depuis que le Chef de l’État a annoncé, le 3 juillet dernier, sa décision de ne pas briguer un nouveau mandat. Des analystes politiques ont dessiné un portrait-robot, soulignant d’emblée la difficulté de la tâche.La non-candidature inattendue du Chef de l’État, Macky Sall, de la course à la présidentielle de 2024 a déjoué les pronostics dans la mouvance présidentielle. Les membres de cette instance s’attendaient, pour la plupart, à ce que leur leader puisse se maintenir au pouvoir pour poursuivre sa mission au service de la Nation, eu égard à son bilan jugé reluisant. Depuis, les spéculations vont crescendo et des noms sont avancés aussi. Mais, la coalition « Benno Bokk Yaakaar » (Bby) a donné la latitude à son président, le Chef de l’État, Macky Sall, de choisir un candidat pour l’élection présidentielle du 25 février 2024. Ainsi, plusieurs candidats à la candidature sont annoncés du côté de la mouvance présidentielle. Et ces derniers seraient en train d’être auditionnés, au nom du Président Sall, par le Président Moustapha Niasse. Cependant, le dernier mot revient au Chef de l’État.Si plusieurs scénarii se dessinent de part et d’autre, les spécialistes des questions politiques évoquent la difficulté de dresser le portrait de la personne qui sera désignée pour défendre les couleurs de la mouvance présidentielle lors des joutes de 2024. Ils s’accordent, pour autant, sur un point : il doit incarner naturellement un leadership avéré et être en mesure de prendre des décisions alignées sur les visions des différents alliés.« Le successeur du Chef de l’État au niveau de sa formation politique doit regrouper autour de lui des positions différentes et fédérer des personnes qui ne sont pas de même obédience.
Le défi est énorme,
car la particularité de Bby est qu’elle est l’une des rares coalitions politiques à relever le défi de la longévité et de l’unité. Elle a une durée de vie extrêmement longue. Cela est dû à la posture fédératrice du Président Macky Sall », souligne d’emblée l’analyste politique Seydou Nourou Dia.
Pour maintenir cet héritage, il considère que le dauphin doit de prime abord répondre à un impératif : disposer de la carrure d’un homme d’État expérimenté. « Il doit avoir une bonne maîtrise du fonctionnement de l’État avec une trajectoire plus ou moins semblable à celle de son prédécesseur. Il doit aussi faire l’unanimité au sein de la mouvance présidentielle. Ce sont des éléments essentiels sur le plan politique. Il est aussi attendu qu’il ait une facilité de contact avec les familles religieuses », ajoute notre interlocuteur.
Une tâche fastidieuse
En dépit de la pluralité des candidatures, M. Dia pense qu’une personnalité pondérée a plus de chances de sortir du lot. Un choix qui ne sera pas facile vu qu’il est question de préserver les équilibres sur lesquels repose le pays. « Il faut s’attendre à ce que d’autres candidatures soient déclarées, mais face au contexte politico-social, un homme capable de garder son calme face à la clameur populaire a plus de chance d’explorer les perspectives qui s’offrent à notre pays, car il y a lieu de reconnaître que le Président Macky Sall a su se distinguer par sa froideur, voire sa capacité à rester serein face à des situations tendues », explique Seydou Nourou Dia.
Pour sa part, Ababacar Fall, du Groupe de recherches et d’appui à la démocratie participative et la bonne gouvernance (Gradec), déclare qu’il est difficile de dresser un portrait-robot en raison des fortes exigences des populations sénégalaises. « C’est un exercice difficile eu égard au contexte actuel. Pendant 12 ans de gestion du pouvoir, on n’a pas assisté à l’émergence d’un numéro 2 au niveau du parti au pouvoir. Chacun des candidats, révélés actuellement, a des atouts et des faiblesses. Mais, il est important de tenir compte de plusieurs paramètres, dont les dernières manifestations politiques enregistrées dans notre pays, qui vont influencer forcément le cours politique », indique M. Fall.
Il estime qu’un débat interne dans les rangs du parti au pouvoir, de même qu’au niveau de la coalition présidentielle, peut aider à trancher la question de la succession. Mais, souligne-t-il, « personne ne peut mesurer les conséquences du choix qui sera fait, avec notamment des risques d’implosion de la coalition présidentielle », pense-t-il. Le profil idéal renvoie, selon ses explications, à une personnalité en mesure d’être sur plusieurs fronts et d’apporter des réponses appropriées à la question de la gouvernance, de l’éducation, de la santé, du chômage endémique des jeunes. « Il faut vraiment quelqu’un qui soit capable de remettre le pays au travail et le placer sur une trajectoire de croissance. Notre pays a besoin de relever d’énormes défis en termes de développement et de bonne gouvernance. L’homme de la situation doit disposer d’une vision assez large et d’une bonne maîtrise des rouages de la constitution d’un État sur le plan économique, social et politique », souligne M. Fall. Et d’ajouter : « Il doit prendre en compte les besoins des Sénégalais qui ne veulent plus du sur-place. Qui sera-t-il ? On ne saurait le dire, mais il faut une personne de consensus, travailleuse et capable de fédérer toutes les énergies ».
Un profil à la fois technocrate et politique
L’analyse politique Mamadou Sy Albert s’inscrit dans la même veine. Le maintien du flambeau exige, d’après ses explications, un choix judicieux. « Il faut un profil à la fois technocrate et politique. On s’attend à ce qu’il soit une personne suffisamment préparée à la gestion de la gouvernance politique et économique, un homme du Gouvernement ou un militant assez visible de l’Apr et de « Benno ». Un candidat bien préparé pour avoir participé à l’élaboration et à la mise en œuvre des politiques publiques déclinées par le Président Macky Sall. L’idéal est qu’il ait été suffisamment imprégné du Plan Sénégal émergent (Pse), mais qu’il soit également un militant capable de fédérer son parti et la coalition qui soutenait l’action du Gouvernement », explicite-t-il.Dans le même sillage, il indique que des profils existent et correspondent à cet idéal. « Mais, les difficultés du choix résident dans la prise en compte de critères objectifs. L’homme de la situation doit susciter la confiance », estime M. Sy. Il reconnaît également les possibilités, pour le Chef de l’État, de choisir un candidat hors de la coalition présidentielle. « Il y a des pressentis sur la base de critères objectifs et subjectifs. Mais, il ne faut pas exclure l’hypothèse que le Chef de l’État choisisse quelqu’un qui n’est trempé ni dans son parti ni dans Bby ou dans le Gouvernement. Cet autre choix est possible en raison des défis qui interpellent le pays », souligne-t-il.Mamadou Sy Albert va plus loin dans les explications. Le meilleur candidat, estime-t-il, est celui qui dispose d’une expérience avérée sur le plan politique et étatique. « Le Chef de l’État va porter son choix sur celui en qui il a confiance pour conduire leur camp vers la victoire. Il peut jouer la carte de la surprise parce que politiquement, cela peut avoir un réel impact », soutient-il. Pour lui, il ne faut pas aussi perdre de vue que les élections présidentielles recèlent de fortes exigences. « Le dauphin doit être capable de mener une bonne campagne électorale, de convaincre les électeurs et d’avoir la chance de remporter les élections. C’est le peuple souverain qui va choisir en fonction de ses compétences et de la confiance qu’il inspire », estime-t-il.
Matel BOCOUM
LESOLEIL