QUAND L’EUROPE S’INSPIRE DES FONDAMENTAUX DU BITCOIN POUR SON EURO NUMÉRIQUE

Inclusion financière, protection de la vie privée, monnaie publique… Certaines caractéristiques du projet d’euro numérique font écho aux fondamentaux du bitcoin.

Les décideurs européens se sont-ils inspirés des fondamentaux du bitcoin pour leur projet d’euro numérique? La question peut se poser lorsque l’on jette un oeil à la présentation, faite mercredi dernier, d’une proposition législative de la Commission européenne visant à mettre en place un « possible » euro numérique émis par la Banque Centrale Européenne (BCE).

Sans jamais nommer la reine des cryptomonnaies, certains de ses fondamentaux sont pourtant mis en exergue: monnaie publique, inclusion financière, protection de la vie privée… Pourtant, si cet euro numérique venait à voir le jour, il ne ressemblerait évidemment en rien au bitcoin.

Monnaie publique

L’Europe avait donné peu de détails sur ce projet depuis le lancement d’une première consultation publique en 2020. Or, l’empressement de la BCE se fait sentir: non seulement les autres banques centrales travaillent au lancement de leur propre monnaie digitale, mais il y a aussi la menace des cryptomonnaies, comme le reconnaît la Commission européenne elle-même.

L’euro numérique sera « accessible à tous, partout et gratuitement » dans les 20 pays utilisant la monnaie unique, a expliqué le vice-président de la Commission européenne, Valdis Dombrovskis. Sans remplacer les autres formes de paiement, l’euro numérique permettrait « d’utiliser dans la zone euro un mode de paiement numérique économique, sûr et fiable, basé sur une forme de monnaie publique acceptée partout, et qui viendrait compléter les solutions privées déjà existantes », souligne un communiqué. Pour rappel, le bitcoin est une monnaie décentralisée et publique, accessible à tous sans discrimination.

Vie privée

L’euro numérique permettrait « de payer aussi bien en ligne que hors ligne, c’est-à-dire directement d’un appareil à un autre, sans connexion internet, à partir d’un lieu éloigné ou d’un parking souterrain », ajoute la Commission européenne.

Si les transactions en ligne offriront des niveaux de confidentialité équivalent aux formes de paiement actuelles, les paiements hors ligne garantiront la protection de la vie privée des citoyens, assurent les décideurs européens.

« (Les citoyens) pourraient effectuer des paiements numériques en communiquant moins de données à caractère personnel qu’ils ne le font aujourd’hui lorsqu’ils paient par carte, exactement comme lorsqu’ils paient en espèces, ou comme lorsqu’ils retirent de l’argent à un distributeur automatique. Personne ne pourrait voir ce qu’ils paient hors ligne en euros numériques », indique la Commission européenne.

« 1984 nous y voilà »

Malgré cette affirmation, cela fait plusieurs mois que de nombreux experts de la communauté crypto alertent sur une atteinte à la vie privée des utilisateurs si un euro numérique venait à voir le jour.

Ainsi, Gilles Cadignan, le co-fondateur de la société crypto Woleet, avait déclaré dans une interview sur BFM Crypto que « contrairement au cash, on pourra avec les monnaies digitales de banques centrales savoir qui utilise l’argent et pourquoi! 1984 a eu un peu de retard mais nous y voilà pour de bon ». Contrairement à l’euro numérique qui devra faire ses preuves en la matière, les cryptomonnaies, qu’elles soient pseudonymes ou anonymes, permettent aux citoyens de protéger leur vie privée lorsqu’ils effectuent des transactions.

Autre caractéristique prêtée à l’euro numérique, celle de l’inclusion financière.

« Les personnes dépourvues de compte bancaire pourraient ouvrir et détenir un compte auprès d’un bureau de poste ou d’une autre entité publique, par exemple une administration locale. L’euro numérique serait en outre facile à utiliser, y compris par les personnes handicapées », souligne le communiqué de presse.

Ainsi, quatre millions d’Européens sans compte bancaire pourraient en bénéficier. Parmi les fondamentaux du bitcoin, la question de l’inclusion financière est fondamentale.

« Bitcoin est construit pour être une monnaie de dernier recours. J’entends par là que le bitcoin s’adresse surtout aux personnes qui sont dans l’incapacité de réaliser certaines transactions. Ceux qui n’ont pas de compte bancaire. Ceux qui ne peuvent pas faire des paiements en ligne », a déclaré le bitcoiner maximaliste Kevin Loaec sur BFM Crypto.

La BCE décidera à l’automne de la suite à donner à la proposition de la Commission européenne. Le Parlement européen et le Conseil devront ensuite adopter cette proposition, avat que la BCE ne décide de choisir si elle souhaite mettre en circulation un tel euro numérique, d’ici 2027 ou 2028.

Pauline Armandet

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