Coupe du Monde 2026: les supporters sénégalais et ivoiriens pourraient être privés de matchs aux États-Unis

Un décret signé mardi 16 décembre 2025 par le président américain Donald Trump menace d’exclure les supporters du Sénégal et de la Côte d’Ivoire de la Coupe du monde 2026, qui se tiendra aux États-Unis, au Canada et au Mexique du 11 juin au 19 juillet.

Par TV5MONDE

Le décret présidentiel, intitulé « Restreindre et limiter l’entrée des ressortissants étrangers pour protéger la sécurité des États-Unis », suspend l’entrée sur le territoire américain des ressortissants sénégalais et ivoiriens. Les supporters de ces deux pays ne pourront pas obtenir de visas touristiques pour se rendre aux États-Unis et assister aux matchs de la Coupe du monde. La mesure entrera en vigueur le 1er janvier 2026.

Des exemptions sont prévues pour les joueurs, les membres des staffs techniques et leurs proches immédiats, mais pas pour les supporters. Les athlètes, les diplomates et « les individus dont l’entrée sert les intérêts nationaux des États-Unis » peuvent également entrer sur le territoire américain.

Des problèmes de dépassement de visas

L’administration Trump justifie cette interdiction par des problèmes de dépassement de visas. Selon les autorités américaines, certains ressortissants de ces pays restent illégalement sur le sol américain après l’expiration de leur visa. Le Sénégal affiche un taux de dépassement de 4,30% pour les visas touristiques et de 13,07% pour les visas étudiants, selon le rapport du département de la Sécurité intérieure. La Côte d’Ivoire présente des taux de 8,47% et 19,09% respectivement.

Le Sénégal et la Côte d’Ivoire rejoignent l’Iran et Haïti sur la liste des pays participants à la Coupe du monde soumis à des restrictions d’entrée aux États-Unis. Ces deux derniers pays font face à des interdictions encore plus strictes depuis juin 2025, date à laquelle Trump avait déjà imposé un premier « travel ban ».

Un calendrier qui offre une porte de sortie partielle

Le calendrier de la compétition offre néanmoins une lueur d’espoir pour certains supporters africains. La Côte d’Ivoire, placée dans le groupe E, affrontera l’Allemagne à Toronto, au Canada, le 20 juin. Le Sénégal, versé dans le groupe I, disputera son troisième match de poule contre le vainqueur d’un barrage encore indéterminé (Bolivie, Irak ou Suriname) le 26 juin, aussi à Toronto. Ces rencontres programmées au Canada permettront aux supporters concernés d’assister à au moins un match de leur équipe nationale en dehors du territoire américain. En revanche, les deux autres matchs du Sénégal se dérouleront au MetLife Stadium de East Rutherford, dans le New Jersey : contre la France le 16 juin et contre la Norvège le 23 juin. Les Lions de la Téranga doivent également affronter les États-Unis en match de préparation le 31 mai à Charlotte, en Caroline du Nord. La Côte d’Ivoire affrontera l’Équateur et le Curaçao à Philadelphie, aux États-Unis, les 15 et 25 juin.

Des interrogations sur la mise en œuvre

Andrew Giuliani, directeur exécutif du groupe de travail de la Maison Blanche sur la Coupe du monde 2026, a déclaré dans une interview accordée au New York Times« Avant tout, la sûreté et la sécurité sont la priorité numéro un pour cette Coupe du monde. Chaque décision de visa est une décision de sécurité nationale. »

Il a précisé que « le président, même dans son décret sur les pays restreints, a tout de même accordé une exemption aux joueurs, au personnel de soutien direct et à la famille immédiate pour ces pays sur la liste ». Interrogé sur d’éventuelles restrictions supplémentaires, Giuliani s’est refusé à tout commentaire.

Début décembre, l’administration Trump a dévoilé un système de visas accéléré pour les visiteurs assistant à la Coupe du monde, conçu pour placer les détenteurs de billets en tête de file pour les entretiens de visa. Il reste toutefois inconnu comment ce système traitera les demandes provenant des pays affectés par l’interdiction de voyage.

Une contradiction avec les engagements de la FIFA

Cette politique migratoire restrictive entre en contradiction avec les déclarations passées de Gianni Infantino, président de la FIFA. En 2017, un an avant que les États-Unis obtiennent les droits d’organisation du tournoi 2026 aux côtés du Canada et du Mexique, Infantino avait déclaré aux journalistes: « C’est évident que lorsqu’il s’agit de compétitions de la FIFA, toute équipe, y compris les supporters et les officiels de cette équipe, qui se qualifient pour une Coupe du monde doivent avoir accès au pays, sinon il n’y a pas de Coupe du monde. »

Début décembre, la FIFA a pourtant remis à Donald Trump son premier prix inaugural « FIFA Peace Prize: Football Unites the World », Infantino saluant Trump comme un leader qui « rassemble les gens dans un esprit de paix ».

Une mesure controversée

Les organisations de défense des droits des migrants ont vivement critiqué cette extension des interdictions de voyage. « Cette interdiction élargie ne concerne pas la sécurité nationale mais constitue une autre tentative honteuse de diaboliser des personnes simplement en raison de leur origine », a déclaré Laurie Ball Cooper, vice-présidente des programmes juridiques américains au International Refugee Assistance Project.

À Dakar, selon le site d’information marocain Le360 Afrique, la nouvelle a suscité « choc et consternation »« Honnêtement, c’est une surprise. Le Sénégal a toujours été présenté comme un modèle de démocratie en Afrique de l’Ouest », a réagi Al Amine Senghor, journaliste sénégalais. Les restrictions ont déjà touché le sport sénégalais : cinq joueuses et treize membres du staff de l’équipe nationale féminine de basketball se sont récemment vu refuser le visa américain.

Une extension massive des restrictions

Au total, le décret du 16 décembre 2025 élargit les restrictions de voyage à 20 pays supplémentaires et à l’Autorité palestinienne, portant à 39 le nombre de nations concernées. Sept pays font désormais l’objet d’une interdiction totale, dont cinq africains : le Burkina Faso, le Mali, le Niger, le Soudan du Sud et la Sierra Leone, ainsi que le Laos et la Syrie.

Quinze autres pays, dont le Sénégal et la Côte d’Ivoire, subissent des restrictions partielles : l’Angola, Antigua-et-Barbuda, le Bénin, la Dominique, le Gabon, la Gambie, le Malawi, la Mauritanie, le Nigeria, la Tanzanie, les Tonga, la Zambie et le Zimbabwe.

La proclamation présidentielle maintient également les restrictions complètes pour 12 pays identifiés en juin 2025 : l’Afghanistan, la Birmanie, le Tchad, la République du Congo, la Guinée équatoriale, l’Érythrée, Haïti, l’Iran, la Libye, la Somalie, le Soudan et le Yémen.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *