Initiative – Politique de développement du Sénégal : La Société civile lance l’initiative Demain Sénégal
Avec la création de Demain Sénégal, qui est une initiative citoyenne, la Société civile vise la construction du Sénégal de demain avec les Sénégalais d’aujourd’hui. Elle va s’adosser aux conclusions des Assises nationales. Lors de son lancement, plusieurs intellectuels ont analysé la situation actuelle du pays.
Par Justin GOMIS – Demain Sénégal… C’est une nouvelle vision pour mettre le Sénégal sur les rampes du développement, «au grand bonheur de tous». Cette initiative est portée par la Société civile, qui rêve d’un Sénégal prospère. «Son objectif, c’est de donner le pouvoir de décision et d’action au Peuple sénégalais, en particulier à ceux qui sont le moins attendus et ceux qui sont les plus représentatifs de la population, à savoir les jeunes et les femmes», expose la présidente de la structure, Thiaba Camara Sy, qui a été à la cérémonie de lancement du mouvement ce mercredi. Elle questionne déjà sur l’état du pays qu’on devra laisser aux générations futures. «Il faut que nous arrivions à faire entendre l’ensemble des voix. Demain Sénégal se propose d’être une plateforme d’échanges pour que ces voix puissent être entendues pour à la fois exprimer des problèmes et chercher des solutions», assène Mme Sy.
Demain Sénégal a fondé son ambition sur cinq problématiques : la promotion de l’Etat de Droit et la bonne gouvernance, l’emploi et l’entrepreneuriat, l’éducation et la formation, la santé, l’habitat et le cadre de vie. «Si nous arrivons à trouver des solutions sur ces cinq piliers, de manière positive et concrète, et qui viennent des Sénégalais pour des Sénégalais, cela sera un socle pour un développement harmonieux», espère Thiaba Camara Sy. La présidente de Demain Sénégal insiste sur la concertation, en mettant en avant nos valeurs culturelles. Bien sûr, Demain Sénégal ne va pas réinventer la roue, mais elle va adosser ses activités aux conclusions des Assises nationales rangées dans les tiroirs depuis plus de 10 ans. «Nous estimons que le travail qui a été fait par les Assises, il y a une dizaine d’années, est un travail méticuleux. Elles ont fait ressortir une demande citoyenne qui était clairement formulée. C’est un travail qui sert de socle à ce que nous sommes en train de faire. Nous ne partons pas de zéro. Les Assises nationales ont proposé une méthodologie», rappelle Thiaba Camara Sy.
Aujourd’hui, le pays est confronté à «un problème d’ingénierie de changement». Pour Penda Mbow, «il faut une dose de patriotisme» dans les engagements politiques. «Nous refusons de nous sacrifier pour le collectif. Cet état d’esprit, nous le voyons chez les jeunes, qui refusent de s’engager à faire des sacrifices pour l’intérêt général. Ils pensent à leur avenir, à leur réussite», dit-elle. Elle poursuit : «Quand nous regardons la liste des étudiants à l’Ucad, nombre d’entre eux nous viennent des régions périphériques et qui continuent encore à croire en l’université. Mais ce n’est pas le cas des jeunes qui habitent Thiès, Baol, le Ndiambour. Ils s’intéressent plutôt au commerce, à l’informel et à voyager, s’ils ne sont pas dans les cours des marabouts.»
Par ailleurs, l’historienne a souligné les questions liées à l’accès à la terre. «C’est très facile d’acquérir une terre au Sénégal. Le Sénégal est un pays où l’étranger peut acquérir facilement un terrain. Ce qui n’est pas possible dans d’autres pays. Beaucoup d’immeubles appartiennent à des étrangers et nous risquons de perdre un jour Dakar», met-elle en garde tout en dénonçant une mauvaise politique d’urbanisation à Dakar sans «espaces de convivialité». «Il n’y a plus de quartier résidentiel à Dakar. C’est comme un travail de Sisyphe, nous n’avons jamais progressé malgré les conclusions des Assises nationales», ajoute la professeure d’histoire à l’université Cheikh Anta Diop de Dakar. Et sa conclusion est sans appel : «Ce sont les hommes politiques qui bloquent notre développement.» Que faire ? «Nous devons revenir à la réflexion pour pouvoir mettre ensemble ce que les réflexions comme les Assises ont produit. Il faut passer des sociétés traditionnelles aux sociétés modernes», enchaîne Pr Mamadou Diouf. Qui déplore par contre la détérioration du statut des femmes, «devenues dans ce pays des actrices de toutes les insultes que l’on entend à l’Assemblée nationale».
En écho, Pr Ibrahima Khadim Bamba Diagne pense que le Sénégal a un problème d’adaptation de ses stratégies. Il dit : «67% des emplois au Sénégal sont des emplois vulnérables. Ils ne permettent pas aux jeunes de prendre en charge leurs besoins. Les autorités n’aident pas nos entreprises locales à être compétitives et à se développer.»