Frank Timis, les Fermes de la Téranga et les 26 650 hectares : du rêve agricole au mirage financier
Un empire de terres… et de promesses non tenues . Les 26 650 hectares des Fermes de la Téranga devaient être le symbole d’un ambitieux projet agricole au Sénégal. Aujourd’hui, ils ne sont plus qu’un vaste territoire en friche, marqué par l’abandon, les dettes et les désillusions. Derrière ce fiasco, un nom revient avec insistance : Frank Timis. L’homme d’affaires, connu pour ses investissements controversés en Afrique, a mis la main sur cette immense concession via African Agriculture Inc. (Aagr), après son rachat aux Italiens de Tampieri Financial Group. Une opération qui interroge sur la véritable finalité de cette acquisition.
D’après Libération, Tampieri Financial Group avait obtenu ces terres gratuitement grâce à un décret d’utilité publique avant de les revendre à Timis pour 7,6 millions d’euros. Mais au moment de leur départ, les Italiens ont laissé derrière eux une ardoise fiscale de plus d’un milliard de francs CFA. Trois ans plus tard, le projet agricole promis par Frank Timis est au point mort.
L’eldorado agricole en panne sèche
L’objectif annoncé était de produire de la luzerne à grande échelle, mais depuis plusieurs mois, les activités sont totalement arrêtées. Pire, les 71 employés de la ferme ne perçoivent plus leurs salaires et attendent toujours cinq mois d’arriérés. Un ouvrier témoigne dans Libération : « Tout est à l’arrêt. Ils parlent sans cesse de nouveaux partenaires, mais on dirait qu’ils ne cherchent qu’à lever des fonds. »
L’analyse des événements donne du poids à ces soupçons. En mars 2022, Frank Timis a tenté d’introduire African Agriculture Inc. en bourse pour lever 40 millions de dollars. Mais l’opération a été un échec cuisant. En septembre 2024, l’entreprise a été suspendue du Nasdaq après la chute vertigineuse de son action sous la barre du dollar.
Des terres en friche et des populations en colère
Alors que la ferme ne produit plus rien, les populations locales subissent de plein fouet les conséquences de ce naufrage. « Au lieu des investissements promis, ils ont juste installé des barbelés qui tuent nos animaux. Nous demandons aux nouvelles autorités de s’intéresser à ces terres, comme elles s’intéressent aux terres de Dakar et de Thiès. », s’indigne El Hadji Samba Sow, président du collectif pour la défense de Ndiael.
Malgré une saisine de l’Inspection du Travail et un procès-verbal de conciliation, rien n’a bougé. Les employés restent sans salaire, et les terres restent inexploitées. Le projet, qui devait transformer la région, est devenu une coquille vide.
Une bombe foncière prête à exploser ?
Avec les récents changements politiques au Sénégal, ce dossier pourrait bien refaire surface. La gestion foncière est déjà un sujet brûlant dans les zones urbaines, et l’affaire des Fermes de la Téranga illustre parfaitement les dérives de l’attribution des terres agricoles.
Le Sénégal laissera-t-il Frank Timis et ses partenaires spéculer sur ces 26 650 hectares sans contrepartie réelle pour l’économie locale ? Libération a mis en lumière un scandale grandissant. Reste à savoir si l’État agira avant qu’il ne soit trop tard.
SOURCE DAKARACTU