En Haïti, les attaques des gangs redoublent depuis deux semaines à Port-au-Prince et dans sa région
Plus de 40 000 personnes ont été déplacées en seulement dix jours en Haïti, selon l’ONU. Depuis deux semaines, les gangs ont lancé un nouvel assaut sur Port-au-Prince et sa région, dans un contexte de flambée de violences. Les gangs se sont réunis au début de l’année dans une coalition, « Viv Ansamn ». Ils contrôlent déjà au moins 80% de la capitale.
En mars dernier, les gangs avaient réussi à obtenir la démission du Premier ministre Ariel Henry en Haïti. Coïncidence, les nouvelles attaques ont été lancées le 11 novembre, le jour même de l’entrée en fonction d’un nouveau Premier ministre, Alix Didier Fils-Aimé. Au moment où il promettait dans son discours de rétablir la sécurité, les gangs attaquaient de nouveau Solino, un vaste quartier du centre-ville de Port-au-Prince – qui est tombé entre leurs mains quelques jours après.
Cela faisait des mois qu’ils tentaient de s’emparer de cette zone stratégique qui leur permet, entre autres, de connecter le centre-ville avec d’autres quartiers qu’ils contrôlent déjà. Les habitants de Solino ont dû s’enfuir, tout comme ceux des quartiers voisins qui craignaient d’être les prochaines cibles. En une semaine, selon l’ONU, 20 000 personnes ont fui et au moins 150 ont été tuées.
Des hôpitaux débordés
Ce mardi, l’hôpital universitaire de la Paix expliquait à RFI avoir reçu, en dix jours, 89 blessés par balles, sans compter les blessures à l’arme blanche. La situation des établissements de santé est d’autant plus difficile que, la semaine dernière, l’ONG Médecins sans frontières a annoncé qu’elle n’accueillait plus de nouveaux patients dans ses cinq hôpitaux de la zone de Port-au-Prince, pour cause de menaces répétées de la part de la police et du meurtre de plusieurs de ses patients.
Car les violences commises par des groupes d’autodéfense, un mouvement appelé « bwa kale », sont en augmentation. La semaine dernière, les gangs ont lancé une attaque contre la commune de Pétion-Ville, dans la banlieue de Port-au-Prince. La police, mais aussi des habitants de Port-au-Prince, ont intercepté des membres présumés de gangs et les ont tués. Au moins 108 personnes, dont des enfants, auraient ainsi été assassinées, selon le Réseau national de défense des droits humains : « L’État s’est effondré, et la population se fait justice elle-même », explique son directeur.
Une force multinationale en suspens
Pourtant, la force multinationale dirigée par le Kenya, et sous mandat de l’ONU, a commencé à être déployée. Le problème, c’est que pour le moment sur les 2 500 hommes promis, elle ne compte que 400 policiers. Une conseillère du président kényan estime qu’aujourd’hui, les gangs profitent du « déploiement sous-optimal » de la mission pour « intensifier leurs activités criminelles ».
D’autant qu’en pleine flambée de violence, la grande question ce n’est pas ce que cette force peut et doit faire, mais c’est, aujourd’hui encore, la nature de cette force : les États-Unis voudraient qu’elle soit transformée en force des Nations unies pour faciliter, entre autres, son financement et l’envoi d’hommes par d’autres pays. Bon nombre de membres du Conseil de sécurité semblent ouverts à cette idée, mais la Chine et la Russie, qui ont un droit de veto, sont réticentes. Et les discussions continuent. La violence aussi.
SOURCE RFI