G20 au Brésil: la taxation des multinationales et des milliardaires au menu du sommet
Les dirigeants des pays du G20 se réunissent à Rio du lundi 18 au mardi 19 novembre pour discuter de la réforme de la gouvernance mondiale, mais aussi de nouvelles ressources pour financer le développement et la transition énergétique. Dans un contexte économique et international très tendu, le président brésilien Luiz Inacio Lula da Silva, hôte du sommet, va tenter de faire avancer les projets de taxation mondiale des multinationales et de taxation des milliardaires.
La première séance plénière du G20 sera consacrée à l’Alliance mondiale contre la faim et la pauvreté, chère au président brésilien. La deuxième étudiera comment ouvrir davantage l’actionnariat du FMI et de la Banque mondiale aux pays émergents. La troisième session sera consacrée à la finance verte, c’est-à-dire comment rationaliser les multiples fonds climat, un chantier lancé par le Brésil, et comment créer de nouvelles ressources.
Il y sera de nouveau question de taxer les transports aérien et maritime. Mais c’est la taxation des multinationales qui sera au cœur des discussions – anciennement appelée taxe Gafam, en référence aux géants du numérique Google, Apple, Facebook Amazon et Microsoft. Selon le ministère français de l’Économie, 98 % des compromis seraient atteints, mais les 2 % restants – à savoir où localiser les bénéfices – sont les plus durs à atteindre. Car les États-Unis et l’Inde sont parmi les plus difficiles à convaincre.
Enfin, c’est la première fois que le G20 se penchera sur une future taxation mondiale des milliardaires. Comment lutter contre les pratiques dommageables ? Partager l’information sur les patrimoines ? Ce sera le début d’un long travail pour les ministres des Finances du G20, qui sera présidé l’an prochain par l’Afrique du Sud.
« Liaison entre le sud global et le vieux monde des vieilles puissances »
Pour Bertrand Badie, professeur émérite à Sciences Po Paris et spécialiste des relations internationales, « on est comme crispé autour de cette élection américaine, mais le G20 présente des enjeux autrement plus importants que l’élection de [Donald] Trump. Le G20 est probablement la seule instance multilatérale qui puisse faire la liaison entre le « Sud global » et le vieux monde des vieilles puissances. »
Pour ce G20 à Rio, beaucoup de pays ont à gagner, parmi lesquels le pays hôte, le Brésil. C’est ce que rappelle notamment Hervé Théry, géographe, directeur de recherche au CNRS et professeur à l’Université de São Paulo.
Selon Hervé Théry, géographe et professeur à l’Université de São Paulo, le Brésil veut se «redonner l’image d’un des porte-paroles des pays du Sud», bien que l’«agenda sociale soit un peu menacé»RFI
« C’est un pays qui a toujours su ménager son rapport à l’Occident C’est vraiment un pays trait d’union. Et évidemment, à côté du président Lula, il faudra voir comment la Chine se comporte. On voit que la Chine est de plus en plus active, même sur le continent latino-américain », poursuit Bertrand Badie. Les pays occidentaux ont tout à perdre à continuer à ignorer cette nouvelle configuration internationale.
Depuis la COP29, les ONG vont avoir les yeux rivés sur ce sommet, d’autant que le Brésil doit aussi accueillir l’année prochaine la COP30. « Ce qui nous intéresse particulièrement, c’est la question de la taxe sur les ultra-riches que le Brésil entend pousser et qui permettrait de lever les milliers de milliards dont on a besoin pour financer la transition [écologique] et l’adaptation », explique Nicolas Haeringer, de l’ONG 350.org.
La taxation des ultrariches, un thème qui mobilise la société brésilienne
Pour le sommet du G20 qui débute ce lundi à Rio de Janeiro, un thème attire l’attention et c’est une proposition ambitieuse du Brésil : taxer les plus riches. Cette proposition mobilise les Brésiliens, rapporte notre correspondante à Rio, Sarah Cozzolino.
Pour certains, c’est une mesure de justice sociale urgente. Tamara est une étudiante et indigène, venue de Brasília dans le cadre du G20 social. « C’est absolument nécessaire, parce que si aujourd’hui, il y a des ultrariches, c’est parce qu’ils ont exploité des gens. Donc, le moment est venu de rendre à ceux qui ont été exploités », assure-t-elle.
L’argent récolté par ces impôts sur les grandes fortunes devrait être investi dans la lutte contre le changement climatique et pour les victimes de ces phénomènes, selon Bob, militant des droits de l’Homme : « Les gens qui polluent plus doivent payer plus. Les 10 % les plus riches émettent les 50 % de CO2 qui pollue dans le monde. Donc, ils ont leur responsabilité. Ce n’est pas que payer des impôts, mais il faut qu’ils s’engagent, parce qu’ils ont leur responsabilité au plus haut niveau », juge-t-il.
Mais un grand nombre de brésiliens doutent que les grandes puissances arrivent à un accord commun. « Je pense que c’est plutôt un thème qu’on doit résoudre au niveau interne, en tant que société. Le G20 peut servir de point de départ, mais je pense que la discussion doit se faire au niveau du Parlement national », dit Caio, un infirmier. En portant ces propositions dans le cadre du G20, le président brésilien Lula veut jouer un rôle central dans la lutte contre les inégalités.
SOURCE RFI