Hyper présidentialisme, reforme des institutions et renforcement de l’Etat de droit au Sénégal : les candidats mis au défi
Instauré par le président Léopold Sédar Senghor au lendemain de la crise de 1962, l’hyper-présidentialisme, globalement ce système présidentiel marqué par la trop grande concentration de pouvoirs entre les mains du Chef de l’Etat, est de nouveau rattrapé par le débat politique dans le cadre de la campagne électorale en cours. En effet, avec la tentative avortée de l’actuel chef de l’Etat et des députés du groupe parlementaire du Parti démocratique sénégalais (Pds) de reporter jusqu’au 15 décembre prochaine la date de la présidentielle du 24 mars initialement prévue le 25 février dernier, certains candidats sont partis en croisade contre le maintien de ce système qui est de plus en plus décrié par des organisations de la société civile et des universitaires.
Le Sénégal devrait-il tourner la page du système présidentiel instauré par le président Léopold Sédar Senghor au lendemain de la crise de 1962 ? S’il est difficile de trancher cette question, force est de reconnaitre que tel un serpent de mer de la politique au Sénégal qui ressurgit à la veille de chaque élection présidentielle depuis 2012, le débat sur l’hyper-présidentialisme s’invite à nouveau dans la campagne électorale en cours pour la présidentielle du 24 mars prochain. En effet, depuis le lancement de cette campagne électorale le 10 mars dernier, certains candidats en piste pour cette élection, prenant la relève des organisations de la société civiles et des universitaires, agitent de plus en plus cette question de réforme des institutions avec en toile de fond la réduction des pouvoirs du président de la République. Se basant sur la tentative avortée de l’actuel chef de l’Etat et des députés du groupe parlementaire du Parti démocratique sénégalais (Pds) de reporter jusqu’au 15 décembre prochain la date de la présidentielle du 24 mars initialement prévue le 25 février dernier, ces candidats dénoncent les limites de ce système instauré par le premier président de la République du Sénégal, feu Léopold Sédar Senghor au lendemain de la crise de 1962. En effet, selon eux, ce mode de gouvernance fragilise les institutions au profit du président qui concentre l’essentiel des pouvoirs.
Parmi eux, nous pouvons citer le candidat de la coalition Tekki 2024, Mamadou Lamine Diallo. Dans le pilier 2 intitulé : « Réconcilier le Sénégalais avec ses Institutions » de son programme de gouvernance dénommé « Agenda de redressement national du Sénégal », le candidat de la coalition Tekki 2024 s’engage s’il est élu à proposer dès sa prise de fonction des reformes basées sur le modèle des Assises nationales et la Commission nationale de réforme des institutions (Cnri) pour arriver à un rééquilibrage des pouvoirs entre les institutions de la République. « Il nous faut renforcer le modèle démocratique sénégalais en réduisant les pouvoirs du président de la République, et en rééquilibrant les pouvoirs à la fois législatif, exécutif et judiciaire. On a vu ce que ça donne d’avoir un présidentialisme absolu, avec les difficultés que nous avons eu pour pouvoir aller à l’élection présidentielle : le fameux coup d’État constitutionnel du 3 février du président Macky Sall », a déclaré Mamadou Lamine Diallo en faisant référence à l’abrogation du décret convoquant le corps électoral par le chef de l’Etat à l’origine du chamboulement du processus électoral en cours.
Outre le candidat de la coalition Tekki 2024, celui de la coalition « Khalifa Président », Khalifa Ababacar Sall semble également dans cette dynamique. La preuve, lors de son passage dans la Petite côte (département de Mbour), l’ancien maire de Dakar a clairement affirmé son intention s’il est élu de « mettre en place des institutions fortes pour que n’importe quel président de la République ne puisse les utiliser pour combattre des adversaires » en se référant sur le modèle des Assises nationales. Autre candidat qui s’est également engagé en faveur des réformes pour en finir avec l’hyper-présidentialisme, le candidat Bassirou Diomaye Faye. Lors de la conférence de presse de présentation de son programme politique qu’il a co-animée avec son ami et leader, Ousmane Sonko, le candidat de la coalition « Diomaye président » a fait part de son intention de mettre fin à ce système « dommageable pour l’économie, la paix et la stabilité du pays ». C’est ainsi qu’il a annoncé des réformes qui devraient aboutir à la suppression de la Primature et l’instauration d’un poste de vice-président dont l’occupant devrait être «élu en tandem avec le président de la République» lors de la présidentielle de 2029.
NANDO CABRAL GOMIS
SUDQUOTIDIEN