Ukraine à l’UE: inquiétude des agriculteurs européens

Les ministres de l’Agriculture et de la Pêche européens sont réunis à Bruxelles pour parler de la situation du marché commun. Il est aussi question de l’agriculture ukrainienne avant l’examen de la candidature de l’Ukraine dans l’Union européenne (UE) lors du sommet, les 14 et 15 décembre. Si le processus d’adhésion s’est accéléré après l’invasion russe, l’agriculture est au centre des débats.

Par : Agnieszka Kumor

L’adhésion de l’Ukraine à l’Union européenne est indispensable « sur le plan humain et géopolitique », martèle Christiane Lambert, présidente du Copa, premier syndicat d’agriculteurs en Europe. Mais elle suscite aussi des inquiétudes. Les agriculteurs européens craignent notamment un déferlement de produits ukrainiens peu chers sur le marché commun : « L’Ukraine est un pays agricole très grand avec des conditions de production très différentes. Son adhésion aura un impact très fort sur l’économie européenne et sur le marché commun. Et si ce processus est mal préparé, il y aura un certain nombre de concurrences qui seront difficiles. »

Le règlement européen à respecter

À quoi pense la patronne du syndicat européen ? « Il faudra travailler sur plusieurs thèmes. L’un d’eux, c’est d’expliquer aux agriculteurs ukrainiens que leurs collègues européens sont soumis à beaucoup de règlementations, notamment environnementales, sociales ou encore sanitaires qui sont très exigeantes et qui impactent nos coûts de production. Ce qui fait que nous avons des contraintes de production plus lourdes à supporter, et cela grève notre compétitivité. Il faudra que les mêmes règles puissent s’appliquer aux produits qui viendront d’Ukraine. »

Il faudra sans doute passer par une période de transition car « tout ne pourra pas se faire d’un seul coup » et tirer des leçons de l’élargissement précédent. « Il faut éviter ce qui s’est produit avec l’adhésion en 2004 des pays anciennement sous influence soviétique qui sont entrés très vite, mais sans cette mise à niveau. À titre d’exemple : tout le monde se rappelle que dans les années 1990, quand il était question de faire venir la Pologne, le prix des veaux laitiers, des veaux naissant de huit jours s’est effondré en Europe. Et ce parce que les conditions de production étaient différentes ».

Le transit sans visas et ses effets sur le marché intérieur

Aujourd’hui, les produits agricoles en provenance d’Ukraine entrent dans l’Union européenne sans taxes via « des couloirs de solidarité »L’accord passé avec Kiev pour aider ce pays en guerre a eu déjà des conséquences économiques pour le marché intérieur. Selon les organisations syndicales agricoles européennes, les arrivées de poulets ont augmenté de 180%, celles de céréales, de blé et de maïs, elles ont aussi augmenté. Cela provoque des inquiétudes. Notamment en Pologne, l’autre puissance agricole au sein de l’UE. Un contentieux lie déjà Varsovie à Kiev sur les céréales ukrainiennes. Le Copa demande« dès aujourd’hui à ce qu’ils soient établis des volumes précis de marchandises qui transiteront par l’Europe pour aller vers l’Afrique et le Moyen-Orient, mais qui ne resteront pas en Europe pour ne pas créer une surcharge de production et donc un effondrement des cours ».

Produits agricoles, semences, machines agricoles, engrais… Sans oublier des aléas climatiques. « Cela fait beaucoup de chambardement ». La Commission européenne devra être méthodique, insiste la présidente qui est aussi agricultrice dans le Maine-et-Loire, dans l’ouest de la France. Mais elle pense d’ores-et-déjà que le processus d’adaptation de l’Ukraine aux normes européennes pourrait prendre six, sept, voire dix ans.

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