Pressions électorales en 2020: «Cette affaire et celle de Géorgie sont de loin les plus dommageables pour Trump»

La date est fixée : Donald Trump sera jugé à partir du 4 mars prochain, en pleine campagne électorale. L’ancien président devra s’expliquer devant un tribunal fédéral de Washington sur ses tentatives d’inverser le résultat de l’élection présidentielle de 2020, qui a vu la victoire de Joe Biden. 

Lauric Henneton, spécialiste de l’histoire et de la civilisation américaine et auteur d’un livre intitulé Le rêve américain à l’épreuve de Donald Trump, revient sur 2024, qui s’annonce comme une annus horribilis pour Trump, puisqu’il sera impliqué dans plusieurs autres procès en pleine campagne électorale. Entretien.

RFI : Jusqu’ici, Donald Trump a surfé sur ses déboires judiciaires. Mais cette fois-ci, on a vu ses avocats tout faire pour repousser la date du procès. Est-ce que cette affaire inquiète plus le camp Trump que les précédentes ?

Lauric Henneton : Celle-ci et l’affaire de Géorgie, pour laquelle on n’a pas encore de date de procès, sont de loin les plus importantes et les plus dommageables pour Donald Trump. D’ailleurs, ce n’est pas que les autres ne sont pas importantes, mais comparativement, ce n’est vraiment pas la même division si on veut. Donc là, c’est vrai que ça commence à être particulièrement ennuyeux. Ce qu’il faut bien voir, c’est que le début du procès n’est pas la condamnation, donc cela restera de l’ordre de l’événement médiatique. Ce que vous disiez est vrai : il a tiré profit, littéralement, des mises en accusation. Là, on sera dans quelque chose de différent. Il pourra difficilement réitérer les levées de fonds qu’il a pu faire, parce qu’il n’y a plus vraiment l’élément de nouveauté.

Ce jugement est prévu à la veille du « Super Tuesday », alors que le processus des primaires sera bien avancé. Ce procès peut-il le servir ou le desservir ?

Ni l’un ni l’autre. Car ce n’est pas un jugement, c’est le début du procès. Donc, comme je disais, ce sera un événement médiatique et pas encore un événement judiciaire. Ce sera une sorte de petit théâtre qui va faire beaucoup de mousse, de grands titres, de la couverture médiatique, mais il n’y aura rien de véritablement jugé. Il n’y aura pas de condamnation le 4 mars. Il y a deux scénarios : soit il est déjà bien avancé vers la qualification, parce qu’il a dans les précédents caucus et primaires – Iowa, New Hampshire, Nevada – déjà emporté l’essentiel. Et donc, peu importe finalement ce qui se passe, il a déjà assuré l’essentiel ; ou alors, on a quelque chose d’un peu plus inattendu où il est plus en difficulté, et là, il pourrait y avoir quelque chose de l’ordre du rebattage de cartes. Mais le problème, à ce stade, c’est qu’il y a énormément de candidats républicains et l’offre anti-Trump ou non-Trump est très fragmentée. Donc, il faudrait voir d’ici début mars combien de républicains restent en course et comment tout cela s’agence. C’est vraiment essentiel et, pour l’instant, on n’a aucune idée.

Quelles réactions peut-on attendre des avocats de Trump aujourd’hui ? Est-ce qu’il leur reste des recours ?

Très simplement, ils vont essayer de faire tout ce qui est en leur pouvoir pour intenter des manœuvres dilatoires : soit techniques – pour les différents procès, parce qu’en mars, il y en a au moins deux, peut-être trois avec la Géorgie –, soit politique, c’est-à-dire de dire que ça interfère avec le processus électoral. Mais la juge, par exemple, a dit qu’elle jugerait Trump malgré son calendrier professionnel comme elle jugerait un athlète indépendamment des compétitions dans lesquelles il serait impliqué. Là, on a déjà, de la part d’au moins une juge – c’est très intéressant –, une réflexion avancée sur cette thématique de la justice dans la démocratie.

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