Tennis: Nadal-Djokovic-Federer, les trois fantastiques
Il ne restera bientôt plus que Novak Djokovic: après la retraite de Roger Federer, l’annonce de celle de Rafael Nadal, probablement en 2024, signe la fin d’une époque bénie du tennis mondial au cours de laquelle les « trois fantastiques » se sont taillés les plus beaux palmarès de tous les temps.
La concomitance de leurs parcours aurait pu limiter l’ampleur de leur palmarès or, au contraire, ces trois géants dominent de la tête et des épaules les statistiques, à commencer par celles des victoires en Grand Chelem: 20 pour le Suisse, 22 pour l’Espagnol et le Serbe, ce dernier pouvant encore augmenter son total. Le quatrième, Pete Sampras, n’a « que » 14 trophées.
Les trois ont aussi le plus grand nombre de succès en Masters 1000 (38 pour Djokovic, 36 pour Nadal, 28 pour Federer, le suivant étant Andre Agassi avec 17). Le Serbe est en tête au nombre de semaines à la première place mondiale (387) devant le Suisse (310), le Majorquin n’étant que 6e (209). Au nombre total de titres de l’ATP, les 109 de Jimmy Connors devraient rester inégalés, mais les trois comparses suivent avec 103 pour Federer, 93 pour Djokovic et 92 pour Nadal.
Durant ces quinze années qui seront sans doute considérées comme un âge d’or par les historiens du sport, il y a eu pas moins de 59 Nadal-Djokovic, le match le plus joué de toute l’histoire du tennis (30-29 pour le Serbe), 50 Djokovic-Federer (27-23 pour « Djoko ») et 40 Federer-Nadal (24-16 pour le Majorquin).
Qui est le meilleur ?
Des trois, qui a été le meilleur? C’est l’affaire du GOAT (Greatest of all time en anglais, soit le meilleur de tous les temps), qui n’a pas fini d’alimenter les conversations entre passionnés.
Chacun a ses arguments. Les partisans de Nadal soulignent qu’il a le dessus sur les deux autres en finales de Grand Chelem (5-4 contre Djokovic et 6-3 contre Federer, le Serbe dominant le Suisse 4-1) et qu’il est le seul à avoir gagné la médaille d’or olympique en simple (à Pékin en 2008). Ceux de Federer affirment que c’est lui qui a apporté le plus au tennis grâce à son jeu offensif.
Mais les critiques du Bâlois remarquent que, étant le plus âgé (né en 1981, Nadal en 1987 et Djokovic en 1987), il a commencé son parcours avant les autres et a pu garnir son armoire à trophées en battant en finale des adversaires qui n’ont plus existé une fois le « Big Three » installé (comme Mark Philippoussis, Lleyton Hewitt, Andy Roddick, Fernando Gonzalez ou Marcos Baghdatis).
Ceux du Majorquin soulignent le déséquilibre de son bilan, dont la taille repose sur sa supériorité sur terre battue (14 Roland-Garros sur 22 titres du Grand Chelem, 26 Masters 1000 sur 36, 63 titres sur 92 au total sur sa surface préférée).
Djokovic s’impose comme le N.1 en chiffres: il est en tête dans les combats singuliers; il est le seul à posséder la collection complète des neuf Masters 1000, en plus de celles des quatre Grands Chelems que ses deux rivaux ont également; il a aussi gagné le Masters à six reprises, un record qu’il partage avec Federer. Un 23e Majeur ne serait pas loin de mettre fin au débat.
Des matches de légende
Étant le plus jeune et pas le plus précoce, il a dû affronter la concurrence des deux autres à leur meilleur pour bâtir la quasi-totalité de son palmarès. Lorsqu’il a été sacré pour la première fois en 2008 à l’Open d’Australie, Federer avait déjà 12 titres au compteur et Nadal 3. Quand il en a ajouté un deuxième, toujours en Australie en 2011, Federer était à 16 et Nadal à 9. Depuis la domination du Serbe est très nette: 21 titres depuis 2011 contre 13 à Nadal et 4 à Federer.
La rivalité Federer-Nadal est celle qui a suscité le plus de passion, peut-être parce que Djokovic s’est immiscé dans la lutte plus tard. Mais parmi les 149 matches entre ces trois champions, dont 23 finales de Grand Chelem, il y a eu des duels de légende dans les trois sens: le Djokovic-Federer de la finale de Wimbledon 2019 gagné par le Serbe dans un interminable tie-break (13-12, après deux balles de match manquée par le Suisse), la finale de l’Open d’Australie 2012 arrachée en près de six heures par Djokovic contre Nadal, et bien sûr le célèbre Federer-Nadal de 2008 à Wimbledon remporté par le Majorquin à la tombée de la nuit, le plus grand match de l’histoire pour beaucoup.
La cote d’amour, elle, ne s’exprime pas en chiffres. Djokovic n’arrivera certainement jamais à refaire son retard, malgré ses tentatives de séduction. Si Nadal a rassemblé une nombreuse « aficion » bien au-delà de son pays, c’est bien Federer et son jeu à hauts risques qui reste le plus acclamé aux quatre coins du monde.