Introduction des céréales locales dans le pain : les boulangers du Sénégal font le plaidoyer
La Fédération nationale des boulangers du Sénégal (Fnbs), en collaboration avec la Confédération nationale des employeurs du Sénégal (Cnes) et d’autres partenaires tels que Feed the future Sénégal et l’Usaid, a organisé une rencontre avec les professionnels des médias hier, jeudi 29 août, au siège du CNES. Cette rencontre visait à pérenniser les mesures de réduction de la baguette de pain, à améliorer sa qualité et à valoriser les céréales locales.
Dans le cadre de cette initiative, une dynamique nationale de discussion a été lancée, regroupant leaders d’opinion, acteurs politiques, civils et professionnels des chaînes de valeur. L’objectif est de repenser ensemble un agenda d’information et d’implication du public, des consommateurs et des décideurs, en prévision de la semaine du pain aux céréales locales qui se tiendra du 2 au 7 septembre 2024. Cette rencontre a permis de partager avec les médias les actions entreprises pour modifier le décret n°79-665 du 7 juillet 1979, qui prévoyait d’intégrer 20% de mil dans la production du pain, et pour réformer la fiscalité sur les farines de céréales locales.
L’introduction des céréales locales dans la production du pain est perçue non seulement comme un enjeu de souveraineté alimentaire, mais aussi de santé publique. Elle permettrait de réduire la dépendance à la farine de blé importée et d’économiser les 60 milliards de FCFA actuellement alloués aux subventions du blé, fonds qui pourraient être réaffectés à l’industrialisation de la transformation de la production agricole nationale. Cette initiative pourrait également profiter aux producteurs locaux, notamment dans la fabrication de fertilisants pour des exploitations agricoles pauvres en magnésium.
Le président de la Fnbs, Amadou Gaye, a souligné que le Sénégal importe près de 900 000 tonnes de blé par an, exposant ainsi l’économie aux fluctuations des prix internationaux et aux perturbations d’approvisionnement, comme observé pendant la crise russo-ukrainienne. Pour renforcer la souveraineté alimentaire du pays, la Fnbs s’engage à accompagner l’État dans la promotion d’initiatives visant à réduire cette dépendance au blé importé. L’accent sera mis sur l’importance d’incorporer de la farine à base de céréales locales dans la production de pain.
Pour atteindre cet objectif, la FNBS a défini une stratégie basée sur la production de connaissances, en tirant parti des expériences passées pour créer un argumentaire solide. Ce dernier vise à informer et à sensibiliser le grand public, les acteurs concernés et les décideurs sur l’importance de l’incorporation des céréales locales dans la panification.
Selon une étude réalisée en novembre 2021, le Sénégal compte 2521 unités de boulangeries et 7 minoteries. Cependant, seulement 159 boulangeries, soit 6% du total, proposent régulièrement du pain avec au moins deux types de céréales locales. Pour remédier à cela, les boulangers suggèrent la mise en place d’un programme de formation pour maîtriser l’utilisation des nouvelles farines composées, ainsi que l’octroi de subventions pour l’achat d’équipements et des incitations fiscales pour les boulangers utilisant des farines locales. Enfin, ils préconisent l’installation d’une minoterie capable de fournir aux boulangers des farines prêtes à l’emploi, par exemple, composées de 80% de blé et 20% de mil.
Cette concertation de la Fnbs entend en fait être un levier dynamique pour valoriser les céréales locales et atteindre la souveraineté alimentaire. Mme Safy Ly, ancienne rédactrice en chef de Sud Quotidien, a rappelé à ce niveau le rôle crucial des médias dans ce contexte, en soulignant que ceux-ci sont essentiels pour informer, éduquer et sensibiliser le public. Enfin, il a été rappelé que le Sénégal importe 1 800 000 tonnes de mil par an, selon l’Agence nationale de la statistique et de la démographie (ANSD), ce qui met en évidence la nécessité de valoriser les céréales locales pour atteindre la souveraineté alimentaire.
LAMINE DIEDHIOU
SUDQUOTIDIEN