Mali: interdiction aux médias de parler de la « suspension » des activités des partis politiques

Les autorités maliennes interdisent le 11 avril aux médias toute publication sur les activités des partis politiques. La veille, elles ont ordonné la suspension « jusqu’à nouvel ordre » des activités des partis et des associations à caractère politique, coupables, selon elles de « discussions stériles » et de « subversion ».

La Haute autorité de la communication (HAC) « invite tous les médias (radios, télés, journaux écrits et en ligne) à arrêter toute diffusion et publication des activités des partis politiques et des activités à caractère politique des associations », dit-elle dans un communiqué. La HAC ne précise pas à quoi s’exposeraient les médias qui contreviendraient.
Cette annonce intervient au lendemain d’une autre restriction à toute expression d’opposition ou de dissidence démocratiques à l’égard du pouvoir détenu par les militaires depuis août 2020.

« Nous sommes profondément préoccupés par le décret suspendant les activités des partis politiques et autres associations civiques. Il doit être immédiatement abrogé », a indiqué le Haut-Commissariat sur le réseau social X.

Une transition qui dure

Ce nouveau tour de vis survient alors que les militaires se sont maintenus à la tête du pays au-delà du 26 mars 2024. C’était l’échéance à laquelle ils s’étaient engagés, sous la pression de la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest (Cédéao), à céder la place à des civils élus. Ils n’ont pas non plus organisé de présidentielle en février 2024 comme ils en avaient pris l’engagement.

Le colonel Maïga a justifié la suspension des partis en invoquant un « dialogue » national initié le 31 décembre par le colonel Goïta. Le lancement de ce « dialogue » ainsi que le non-respect de l’échéance du 26 mars ont donné lieu à des « discussions stériles », a dit le colonel Maïga.

« On ne peut pas mener un dialogue aussi crucial que l’est le dialogue direct intermalien dans la cacophonie et la confusion », a-t-il dit. « On ne peut pas accepter que des forces politiques, pour une raison ou une pour autre, prennent en otage une initiative aussi salvatrice », a-t-il insisté.

« Vide juridique et institutionnel »

Plusieurs partis et organisations de la société civile se sont émus, dans une déclaration commune le 31 mars, du « vide juridique et institutionnel » laissé par le non-respect de l’échéance du 26 mars. Ils ont réclamé des militaires une « concertation rapide et inclusive » pour la tenue de la présidentielle « dans les meilleurs délais » et se sont réservés la possibilité de « toutes les voies légales et légitimes » pour le retour du pouvoir aux civils.

Un collectif d’organisations de défense des droits humains a estimé le même jour que le Mali se trouvait « dans une impasse » et qu’il était temps pour les militaires « de retourner dans les casernes » et de « laisser d’autres citoyens élus gérer les affaires publiques du pays ».

« On n’est pas du tout dans un vide juridique, la transition continue », a rétorqué le colonel Maïga le 10 avril en parlant de la période supposée transitoire entre l’arrivée au pouvoir des colonels et la rétrocession de celui-ci à des civils.

Périmètre de sécurité

Le colonel Maïga a aussi invoqué la poursuite de la lutte contre les groupes armés djihadistes et indépendantistes touareg. « Le Mali est dans une phase critique », a-t-il déclaré. « Dans ces circonstances, on ne peut pas accepter que des débats politiques stériles nous ramènent là d’où nous venons », a-t-il dit.

Le communiqué du conseil des ministres annonce par ailleurs l’extension du périmètre de sécurité autour de l’aérodrome militaire et de la poudrière de la cité garnison de Kati, centre névralgique de la junte à une quinzaine de kilomètres de Bamako.

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