«L’Etat a encore un grand rôle à jouer dans la promotion du marché de l’assurance caution»
La SONAC (Société nationale d’assurance du crédit et du cautionnement) qui exerce ses activités depuis 1987, est la seule compagnie de la zone Cima (Conférence interafricaine des marchés d’assurance) spécialisée et agréée dans les branches « Crédit » et « Caution ». Cette précision est de M. Gora Mangane, son Directeur Général. Dans cet entretien au Journal de l’économie sénégalaise (Lejecos), M. Mangane revient sur l’historique de la Sonac et ses missions. Le lancement de nouveaux produits au profit des Pme-Pmi, le rôle de l’assurance caution pour ces dernières, le secteur informel sont autant de questions abordées dans cette interview exclusive. Titulaire d’un DESS Banque/Assurance et d’un DEA en Droit privé, Gora Mangane a intégré la Sonac en Avril 2002 comme Directeur des Affaires Juridiques et des Prestations de Services. Un poste qu’il va occuper jusqu’en juillet 2011. De 2011 à Décembre 2013, il est Directeur Commercial. Il occupe les fonctions de Directeur Général depuis 2014.
Monsieur le Directeur général, pouvez-vous brièvement nous présenter la Sonac? Et comment se porte-t-elle aujourd’hui ?
La SONAC est la seule compagnie de la zone CIMA spécialisée et agréée dans les branches « Crédit » et « Caution ». La SONAC– Sa spécialisée dans les branches crédit et caution, est la marque du partenariat public – privé. En effet, créé initialement par l’Etat du Sénégal sous le nom d’ASACE, la SONAC fait partie depuis 1997 du Groupe SONAM. Elle a pour mission de couvrir les crédits fournisseurs, bancaires ou autres contre la défaillance de paiement des acheteurs et emprunteurs. Elle accompagne également les PME /PMI pour l’accès au crédit et la réalisation de leurs marchés publics ou privés.
La SONAC est une compagnie qui connait une croissance régulière. Elle est aujourd’hui dans une situation financière conforme à la règlementation posée par le Code des Assurances de la CIMA.
La SONAC a connu une évolution de ses activités notamment avec le lancement de nombreux produits et services au profit des PME/PMI. Pouvez-vous nous en dire en peu plus sur ces innovations ?
L’innovation est, pour nous, la meilleure garantie de la pérennité de notre compagnie. Nous essayons toujours d’être à l’écoute du marché, afin d’avoir des produits et services qui répondent à la demande des PME-PMI. C’est ainsi que nous avons mis récemment sur le marché un nouveau produit comme « LOCASSUR », dont l’objet est de sécuriser les loyers contre les risques d’impayés des locataires. Nous visons tous les loyers, de biens immobiliers comme de biens meubles. Ce produit donne aux agences immobilières un avantage comparatif, en ce sens qu’elles ont des garanties de paiement des loyers. Ce qui pourrait à terme, avoir un effet sur le prix des loyers dans notre pays. Par extension ce produit est destiné aux entreprises de crédit-bail.
Nous avons mis dernièrement sur le marché un produit dénommé « Assurance Affacturage ». Comme son nom l’indique, ce produit est destiné à couvrir les factors et surtout les factors sans recours contre le défaut de paiement à terme des factures financées. Il s’agit pour notre compagnie, de favoriser la mobilisation anticipée de leurs créances, afin de protéger leur patrimoine financier, d’assurer la continuité de leur exploitation et par voie de conséquence leur développement.
Nous avons également plusieurs autres produits qui peuvent être consultés sur notre site internet www.sonac.sn.
Notre pays fait face à de nouvelles opportunités telles que le gaz, le pétrole, les nouvelles zones économiques spéciales, etc. Quelle est la place de l’assurance-crédit et du cautionnement devant cette dynamique ?
Il faut déjà rappeler que les risques pétroliers, en raison de l’importance des montants en jeu et de leur technicité, sont gérés sur le marché sénégalais par un pool créé autour de l’Association des assureurs du Sénégal. Les risques « Crédit/ caution » qui se présenteront sur le marché sénégalais seront gérés par les compagnies agréées à cet effet. Avec l’économie pétrolière et gazière, il y aura une démultiplication des volumes d’affaires dans tous les secteurs annexes et connexes qui vont nous donner davantage de matière assurable. Concernant les zones économiques, la plupart des entreprises qui y sont installées ont une vocation exportatrice qui est accompagnée par le premier produit de la SONAC depuis sa création, qui est l’assurance à l’exportation contre les risques commerciaux mais également politiques.
Notre tissu économique est composé essentiellement de PME, en quoi l’assurance caution est un levier de croissance pour ces dernières ?
L’Assurance-Caution constitue un fort levier de croissance pour les PME/PMI dans la mesure où elle leur permet non seulement de concourir à l’accès à la commande publique, mais également à leur réalisation dans des conditions optimales. Les cautionnements que nous délivrons ont largement permis à de nombreuses entreprises de passer de la toute petite entreprise à petite et moyenne entreprise et enfin à la grande entreprise et dans les secteurs les plus divers de l’économie, comme le secteur du bâtiments et travaux publics, les fournitures de biens et services et les prestations intellectuelles telles les études et contrôle de marché, et j’en passe.
Avec les solutions d’assurance-crédit, les PME/PMI peuvent trouver des solutions à leur équipement. Les vendeurs de biens d’équipement octroient des facilités de paiement aux entreprises, parce que derrière il y a une couverture en assurance. C’est le cas aussi pour le financement de la production. Les bons de commande ou les marchés obtenus par les PME/PMI sont réalisés avec l’intervention de l’assureur crédit qui se porte garant de la bonne fin des opérations de crédit.
Dans un contexte où les PME/PMI et particulièrement celles du secteur informel rencontrent d’énormes difficultés pour l’accès au financement (crédit, marchés publics, etc.), quelles sont les solutions proposées par la SONAC pour accompagner ces segments ?
Nous accompagnons les entreprises du secteur informel par une mutualisation et une collectivisation des risques. Nous avons souvent essayé et réussi, par l’instauration d’un système de solidarité entre les différents membres, à faciliter l’accès individuel au crédit au profit de regroupement d’agents économiques. L’histoire retiendra que pour le renouvellement des cars rapides, nous avions accompagné les groupements de transporteurs pour le financement de l’apport personnel auprès des banques. C’était également le cas pour le renouvellement des taxis ; par conséquent le dispositif existe chez nous.
Quelle est l’incidence de la crise sanitaire sur votre portefeuille d’activités et sur la carte des risques ? Ces risques émergents sont-ils assurables ? Quelles actions ont été déployées pour contrecarrer de tels risques ?
La crise sanitaire a sérieusement impacté l’exploitation de nos compagnies. Nous avons enregistré plusieurs sinistres qui sont la conséquence des restrictions de déplacement à l’intérieur du pays, des interdictions de regroupement, de la fermeture des frontières, de l’indisponibilité et du renchérissement exponentiel des intrants. Comme précisé à votre première question, la SONAC est une compagnie spécialisée « Crédit » / Caution ». Elle ne couvre pas les risques émergents. Mais ces risques peuvent sérieusement affecter son exploitation et sont de plus en plus pris en compte dans l’appréciation des risques de crédit que nous couvrons ou des garanties que nous émettons.
Quelles sont les ambitions de la SONAC sur le marché sénégalais ?
L’ambition de la SONAC est de demeurer un assureur crédit de référence non seulement sur le marché sénégalais mais aussi sur celui de l’UEMOA. La SONAC est l’une des premières compagnies de la CIMA spécialisée dans l’assurance-crédit et les cautionnements. De ce point de vue, il est important de montrer qu’il est possible d’avoir une compagnie viable et pérenne dans cette zone. La SONAC s’aligne sur les standards mondiaux dans la gestion d’une compagnie d’assurance-crédit et elle a su souvent se réinventer en préservant les fondamentaux de son modèle économique.
Qu’est-ce que le numérique peut apporter au secteur de l’assurance caution ?
Le numérique nous apporte à la fois : proximité, développement et sécurité. Le numérique nous permet d’étendre notre zone d’intervention, de nous rapprocher davantage de nos clients, d’une part, avec une meilleure célérité dans la prise en charge de leurs demandes et, d’autre part, une meilleure connaissance des risques que nous prenons. Derrière le numérique, il faut considérer le Big-data qui nous permet de développer des modèles assez précis de gestion des risques. Les masses d’information disponibles et traitées nous permettent de couvrir certains risques sur lesquels, avant l’avènement du numérique, nous n’avions pas assez de visibilité pour les couvrir. Le numérique est un tournant important qu’aucune compagnie ne peut se permettre de rater au risque de tout simplement disparaitre.
Est-ce que l’Etat a un rôle à jouer dans la promotion du marché de l’assurance caution ?
L’Etat a encore un grand rôle à jouer dans la promotion du marché de l’assurance caution. Il faut rappeler que la première expérience d’assurance caution dans notre pays était à l’initiative de l’Etat du Sénégal par la création de l’ASACE, la devancière de la SONAC. L’Etat peut être un catalyseur de la branche notamment par exemple en rendant obligatoire certaines assurances qui sont d’ailleurs de son propre ressort. Il s’agit principalement de l’assurance à l’exportation contre le risque politique pour laquelle il existe déjà un fonds de garantie dont la gestion est déléguée à la SONAC. L’Etat pourrait aussi conjuguer l’intervention de certains fonds de financement à la souscription des assurances contre les risques d’impayés. Ainsi ces fonds seront non seulement préservés mais également renforcés pour atteindre l’objectif qui lui est assigné. Les assureurs crédit sont partout les premiers délégataires de gestion des fonds qui ne sont rien d’autre qu’un mécanisme d’assurance.
Lejecos Magazine